L’article L. 134-12 alinéa 1 du Code de commerce dispose ainsi qu’« en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. »
En application de l’article L. 134-16 du Code du commerce, toute clause ou convention contraire est réputée non écrite.
Cependant, l’article L. 143-12 alinéa 2 prévoit que « l’agent commercial perd le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits. »
L’indemnité compense la perte de toutes les rémunérations que l’agent aurait dû acquérir grâce à l’activité développée dans l’intérêt commun des parties pendant la durée de son contrat.
Lors de la rupture de leurs contrats, les agents commerciaux ne manquent pour la plupart pas d’invoquer le fait qu’il résulterait de la jurisprudence et des usages que cette indemnité de résiliation serait égale à deux années de commissions même lorsque la durée des relations contractuelles est inférieure à deux années.
De nombreux juges évaluent effectivement le montant de cette indemnité compensatrice au montant des commissions perçues sur deux années ; le calcul étant effectué en prenant pour référence les trois années précédant cessation du contrat (1).
Le montant d’indemnité demeure toutefois de l’appréciation des juges du fond et l’évocation d’éléments spécifiques permet d’obtenir des décisions évaluant le montant de cette indemnité à des montants tout de même inférieurs (2).
La seule possibilité pour le mandant d’éviter le paiement de toute indemnité compensatrice est la démonstration de l’existence d’une faute grave, une telle faute étant très rarement retenue par les juges du fond (3).
1 Le principe : une évaluation de l’indemnité équivalente à deux ans de commissions brutes
Il a ainsi été jugé que l’indemnité devait être évaluée à une somme correspondant à deux années de commissions brutes, bien que les relations contractuelles n’aient duré que neuf mois, la rupture soudaine étant imputable au mandant et fondée sur des motifs totalement étrangers à l’agent commercial ou à son activité (CA Nancy, 2e ch., 22-9-1999).
En effet, la jurisprudence réaffirme régulièrement que cette indemnité a pour but d’indemniser l’agent commercial du préjudice subi du fait de la rupture de son mandat et doit être fixée en fonction des données concrètes de chaque espèce.
Selon différentes Cours d’appel, l’indemnité de cessation de mandat reflète la part de marché que l’agent perd et que le mandant récupère à son seul profit en se passant de ses services (Cour d’appel de Reims, 6 septembre 2004, Les Annonces de la Seine n° 52 du 1er août 2005).
Cette perte de part de marché se traduit par la disparition du potentiel de commissions attaché au volant d’affaires développées par l’agent commercial.
L’indemnité de cessation de contrat a donc pour objet de réparer le préjudice subi qui comprend la perte de toute rémunération acquise à l’agent de par l’activité développée dans l’intérêt commun des parties (Cass. Com. 5 avril 2005, Les Annonces de la Seine n° 52 du 1er août 2005 ; Cass. Com. 26 mars 2008, Les Annonces de la Seine du 26 juin 2008).
C’est pourquoi l’augmentation de la clientèle ou du chiffre d’affaires par l’agent pendant la durée des relations contractuelles n’est pas une condition de l’indemnisation de l’agent commercial.
En effet, l’indemnité prévue par l’article L. 134-12 du Code de Commerce, nonobstant toute clause contraire, n’implique pas un apport initial ni une création de clientèle par l’agent (Cour d’appel de Paris, 25 février 2004, Les Annonces de la Seine du 1er août 2005).
2 Les conditions d’une évaluation de l’indemnité à moins de deux années de commissions
Afin d’amener les juges à évaluer l’indemnité compensatrice à un montant inférieur à deux années de commissions, le mandant doit d’abord apporter la preuve de sa totale bonne foi et démontrer que les relations commerciales n’ont pas été rompues de façon brutale.
Il est ainsi important de prévoir un délai de préavis conséquent. Il est dès lors conseillé au mandant de bien respecter le délai de préavis prévu au contrat, voire de l’augmenter pour permettre à l’agent commercial de trouver un autre mandant.
En outre, afin d’éviter l’évaluation de l’indemnité à deux années de commissions, le mandant doit démontrer que la rupture a été provoquée par un comportement fautif de l’agent commercial.
L’indemnité due à l’agent doit être minorée en cas de faute de l’agent, par exemple lorsque l’agent n’a pas envoyé régulièrement ses rapports d’activité comme le contrat lui en faisait l’obligation car, si ce manquement est insuffisant à justifier, à lui seul, la rupture du contrat d’agence, il a néanmoins privé le mandant d’une source régulière d’informations propres à l’éclairer dans ses choix stratégiques vis-à-vis de la concurrence (CA Paris 27 octobre 2000, Sté manufacture textile création c/ Ohaniantz, indemnité fixée à six mois de commission).
Par ailleurs, n’en déplaise à la jurisprudence précitée, une durée brève de relations contractuelles est prise en compte par certaines juridictions pour évaluer l’indemnité compensatrice à un montant inférieur à deux années d’ancienneté.
Il ne faut pas hésiter à rappeler aux juges la brièveté des relations commerciales en dépit de la jurisprudence récente ci-avant évoquée.
Rappelons ainsi que dans un arrêt du 2 mars 1983 (ch. 5, n° de rôle : J 1361) certes plus anciens que les arrêts de Cour d’Appel précités, reprenant une jurisprudence constante, la Cour d’Appel de Paris avait ainsi jugé que « l’indemnité compensatrice n’est pas nécessairement calculée sur la base de deux ans de commission dès lors qu’elle est destinée à compenser le préjudice subi par l’agent commercial du fait de la résiliation et doit par conséquent être ajustée à ce préjudice » ; la Cour ajoutant que « le contrat d’agent commercial (…) s’étant exécuté pendant une courte durée (en l’occurrence notification de la lettre de rupture après 9 mois et demi de contrat) le montant des commissions perçues ne constitue pas une référence suffisante du préjudice subi (…). »
De même, le fait que l’agent ait retrouvé sans difficulté une activité similaire aura également pour effet de minimiser le montant de l’indemnité due.
3 Une seule possibilité pour éviter toute indemnité compensatrice : la faute grave
Pour éviter d’avoir à verser toute indemnité compensatrice, la seule solution est de démontrer, en application de l’article L. 134-13 1° du Code de commerce, que « la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l’agent commercial. »
Les juges retiennent très rarement l’existence d’une faute grave qu’ils définissent de la façon suivante :
« La faute grave de l’agent commercial est celle qui justifie une cessation du contrat sans délai en portant atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et en rendant impossible le maintien du lien contractuel. » (Ccass. 21 juin 2011, n°10-19902).
Le seul manque d’efficacité de l’agent commercial n’est ainsi en aucun cas constitutif d’une faute grave.
Il a ainsi été jugé que n’avait pas commis de faute grave l’agent commercial qui n’avait pas prouvé avoir respecté les quotas contractuels pour cause de marasme économique, cette circonstance étant impropre à établir qu’il a commis une faute, seule condition pouvant le priver de son droit à indemnité (Cass. com. 13 novembre 1990, n° 89-16448).
En revanche, les juges ont notamment retenu l’existence d’une faute grave à l’encontre de l’agent commercial qui d’une part, a pris des contacts désordonnés, avec la clientèle, faisant des promesses en dehors des possibilités d’approvisionnement malgré les menaces et les avertissements du mandant et qui, d’autre part, a refusé de respecter les procédures de vente et a accordé des remises supérieures à celles préconisées sur le plan national (CA Paris, 4e ch. B, 4 octobre 1996, Socopral c/ Sté Domaines Michel Bernard).
En conclusion, il sera précisé que l’indemnité de fin de contrat peut se cumuler avec des dommages intérêts pour rupture abusive lorsque les circonstances de la rupture révèlent un comportement fautif du mandant.
Discussions en cours :
Bonjour , j ai annoncé a mon directeur d agence que j allais partir dans le but d ouvrir une agence , par contre je n ai pas envoye de lettre de démission étant donne que je n étais pas sur de l aboutissement de mon projet , je l ai prévenu donc , par simple correction pour qu’il puisse se retourner tranquillement en cas de départ , 15 jours plus tard je recevais un texto me demandant de lui remettre mes clés et mon portable et qu il avait affecté tous mes secteurs a mes collègues. Je précise a nouveau que je n ai rien signifie par écrit et que lui ne m a pas envoye de recommande ni de lettre de rupture . Ai je le droit a une indemnité ?
En cas de divorce, le montant des indemnités de rupture qui peuvent être escomptées lors de la cessation ultérieure d’activité (pour cause d’âge, santé, etc) doit il être intégré dans l’actif de la communauté, même si l’agent n’a pas acquis ses cartes sur les deniers de la communauté ?
je trouve une jurisprudence de la cour de cassation du 6/6/1968 indiquant que quand les cartes ont été acquises sur les deniers de la communauté, et que le délégué commercial peut espérer en retirer une valeur s’il présente un successeur à son mandant qui l’accepte, alors cette valeur rentre dans la communauté et doit être partagée. Mais je ne trouve rien sur les futures éventuelles indemnités de rupture, que les cartes aient été acquises sur deniers de la communauté ou pas.
Merci beaucoup
Bonjour
je recherche le témoignage d’agents commerciaux ayant divorcé : la valeur de leurs cartes a t’elle été intégré& dans l’actif de communauté à partager ?
MERCI
En cas de règlement judiciaire et de reprise de la société, que deviennent les contrats d’agents commerciaux ?
Doivent-ils être transférés sur le repreneur - si NON l’agent commercial a -t-il droit à l’indemnité de rupture de contrat ?