Telles étaient en substance les questions posées à la première chambre civile de la Cour de Cassation dans son arrêt en date du 18 mai 2011.
Par cette décision la première chambre civile de la Cour de Cassation est venue préciser la lettre de l’article 262-1 du Code civil concernant la prise d’effet du jugement de divorce entre les époux. En effet, par cette solution elle rappelle que la date de report des effets patrimoniaux du divorce est fixée à la date de l’ordonnance de non-conciliation. Mais le juge peut à la demande des époux fixer les effets du jugement à la date à laquelle les époux ont cessé de cohabiter et de collaborer.
Or, dans de cet article il n’est pas clairement précisé si cette date peut être postérieure à l’ordonnance de non-conciliation. Par cet arrêt la Cour de Cassation souligne l’impossibilité pour les époux de fixer les effets du divorce à une date postérieure à l’ordonnance de non-conciliation :
« Attendu qu’il résulte du premier alinéa de ce texte qu’à défaut d’accord des époux, le jugement de divorce prend effet dans leurs rapports patrimoniaux à la date de l’ordonnance de non conciliation ; que, dès lors, si, selon l’alinéa deux du même texte, le juge peut, à la demande de l’un d’eux, fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer, cette date ne peut qu’être antérieure à celle de l’ordonnance de non-conciliation ».
Le litige opposait deux époux qui avaient contracté mariage le 12 juillet 1997 et dont le divorce fut prononcé le 20 septembre 2007. La Cour d’appel par un arrêt du 25 juin 2009 a fixé la date des effets du divorce au 31 octobre 2005, soit postérieurement à la date de l’ordonnance de non-conciliation rendue le 17 juin 2005. L’épouse avait alors formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt d’appel. La Cour de cassation censurait les juges du fond en éclaircissant le texte de l’article 262-1 du Code civil par le fait que les juges ne peuvent reporter les effets du divorce à une date postérieure à l’ordonnance de non-conciliation ; celle-ci ne pouvant être qu’antérieure. Cet arrêt admet donc que la date définitive pour fixer les effets du jugement du divorce est celle de l’ordonnance de non-conciliation et que si la cohabitation et collaboration des époux cesse après la date de l’ordonnance de non-conciliation celle-ci ne pourra être prise en compte.
Dans cet arrêt une seconde question a été soulevée par la Cour de Cassation quant à la prestation compensatoire et l’appréciation de l’existence de ce droit par le juge. En l’espèce, la Cour d’appel a rejeté la demande de prestation compensatoire de l’épouse en retenant que la différence sensible de revenus qui existait entre les époux préexistait au mariage et que celle-ci ne résultait pas des choix opérés en commun par les époux.
Selon l’article 271 du Code civil la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce. Pour apprécier l’existence du droit à prestation compensatoire le juge doit se fonder sur la situation des époux au jour du prononcé du divorce. Or, il ressort des faits que la Cour d’appel s’appuie sur des circonstances antérieures pour justifier le refus de la demande de prestation compensatoire de l’épouse. En effet, elle retient que la différence de revenus entre les époux existait avant le mariage. La Cour de Cassation censure les juges du fond dans la mesure où la finalité de la prestation compensatoire est de compenser les disparités nées du divorce entre les époux.
D’autre part, la Cour d’appel pour justifier son refus exige que la disparité résulte de choix opérés en commun par les époux. Selon la Cour de Cassation, elle ajoute donc une condition non prévue par la loi. En effet, selon l’article 270 du Code Civil la disparité doit résulter de la rupture du mariage et non être causée par le mariage lui-même et les mauvais choix qu’auraient fait les époux. Une telle condition ne peut donc fonder le refus du droit à prestation compensatoire :
« Attendu que, pour rejeter la demande de prestation compensatoire de Mme X..., l’arrêt énonce que, s’il existe entre les époux une différence sensible de revenus, il ressort néanmoins que celle-ci préexistait au mariage et qu’en aucune façon elle ne résulte des choix opérés en commun par les conjoints ;
Qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel qui, d’une part, s’est fondée sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce pour apprécier l’existence du droit de l’un des époux à bénéficier d’une prestation compensatoire et, d’autre part, a ajouté une condition non prévue par la loi, a violé les textes susvisés ».
Cet arrêt apporte donc une clarification importante des textes relatifs à la prise d’effet du divorce et des conditions d’acceptation de la prestation compensatoire.
Sources : Cass. 1ère, 18 mai 2011, n°10-17.445, articles 270 et 271 Code Civil, Revue de droit de la famille n°7, juillet 2011.