Charte "chance collaboration", assurance perte collaboration, acte d'avocat... Nos questions à Christiane Féral-Schuhl, Bâtonnier de Paris

Charte "chance collaboration", assurance perte collaboration, acte d’avocat... Nos questions à Christiane Féral-Schuhl, Bâtonnier de Paris

Propos recueillis par Laurine Tavitian
Village de la justice

2355 lectures 1re Parution: 4.5  /5

Explorer : # collaboration # charte # assurance # gouvernance

Le Village de la Justice a interrogé pour vous le nouveau Bâtonnier de Paris, Me Christiane Féral-Schuhl, sur ses projets pour l’Ordre mais aussi sur les diverses questions qui font l’actualité de la profession :
La Charte "chance collaboration" et l’assurance "perte collaboration" sont des sujets forts ; voici donc des précisions sur ces sujets notamment.

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Madame le Bâtonnier, pensez-vous que l’avocat a sa place dans l’entreprise ?

Christiane Féral-Schuhl "Je pense que l’avocat a toute sa place dans l’entreprise à condition qu’il puisse conserver ses prérogatives dont son indépendance et son secret professionnel. J’ai beaucoup écouté mes confrères pendant ma campagne et je sais qu’aujourd’hui beaucoup ne sont pas prêts à accepter cette évolution. Il m’apparaît donc essentiel d’avancer en concertation sur la question avec le Conseil National des Barreaux et la Conférence des bâtonniers et d’exprimer un point de vue partagé par les avocats parisiens. Le consensus me parait indispensable pour avancer. On doit pouvoir procéder par étapes.

Encadrer le détachement des jeunes avocats dans les entreprises peut, par exemple, être un moyen d’évoluer sur cette question. Les jeunes générations sont plus ouvertes à cette idée car davantage influencées par des exemples étrangers, ils ont pu rencontrer des avocats en entreprise dans d’autres pays. C’est un sujet sensible et prioritaire, mais c’est un sujet sur lequel il faut que nous arrivions à trouver un consensus."

Les avocats du barreau de Paris se sont exprimés récemment sur la gouvernance de la profession ; quelle suite entendez-vous donner à cette question ?

"Les résultats de ce référendum doivent être analysés et replacés dans leur contexte strictement parisien. Un ordre national est peut être inéluctable et je veux bien rejoindre cette idée. Cependant, il ne peut pas être le fruit d’un référendum parisien mais d’un travail collectif associant tous les acteurs concernés : les autres barreaux de France, le Conseil National des Barreaux, la Conférence des bâtonniers, les associations et les syndicats de la profession. Il est indispensable que nous puissions avancer ensemble pour plus de solidité et d’efficacité."

Comment entendez-vous promouvoir la charte chance collaboration au sein des cabinets d’avocats ?

"La Charte chance collaboration est un travail collectif de plusieurs mois réalisé par des avocats collaborateurs, des avocats associés et des jeunes installés. Elle sera officialisée après sa validation par le conseil de l’Ordre. Ensuite, nous lancerons une campagne d’incitation et d’information auprès des cabinets. Beaucoup de cabinets de tailles différentes nous ont déjà dit qu’ils adhéreraient sans problème à cette charte. Il y a un intérêt réciproque des cabinets et des collaborateurs à cette adhésion qui devrait se faire sans trop de difficultés. L’idée dans cette charte est d’énoncer un certain nombre de règles que nous connaissons mais qui ont vocation à faciliter le quotidien des avocats. L’une des exigences des jeunes collaborateurs est la conciliation entre leurs vies et professionnelle.

L’idée est donc de tenir compte de certaines contraintes de jeunes parents, des conditions de travail des collaboratrices enceintes ou mères de très jeunes enfants, de manière à inculquer ces valeurs de respect de la vie privée qui ne doivent pas pour autant nuire à la vie professionnelle. Cela suppose une approche responsable de tous les acteurs y compris des collaborateurs, l’idée n’étant pas de profiter d’une situation, ni de créer un déséquilibre mais d’instaurer un respect mutuel des valeurs citoyennes qui sont celles de notre société. De manière générale, et je l’ai souvent dit lors de ma campagne, je crois à la contamination positive des bonnes idées. Quand quelque chose marche, cela permet de faire avancer la réflexion, les comportements et la culture. "

Comment le respect de cette charte va-t-il être assuré ?

"Nous sommes peut-être 24300 avocats mais je pense qu’une autorégulation peut se mettre en place. Si un cabinet a le label et ne respecte pas les principes fondamentaux de la charte, cela se saura. J’ai confiance dans l’information qui circule. L’idée n’est pas de sanctionner mais d’inciter et d’inviter les avocats à une culture moderne intégrant ces valeurs citoyennes. Afficher l’adhésion aux règles de cette charte qui n’est pas révolutionnaire mais qui énonce des principes de bon sens est une manière de faire adhérer progressivement un certain nombre de cabinets à ces valeurs et d’inciter les collaborateurs à vérifier que ces règles sont appliquées dans le cabinet. Pour l’apposition ou éventuellement le retrait du label, c’est le conseil de l’ordre qui décidera."

Comment l’assurance perte collaboration va-t-elle être mise en œuvre ?

"L’assurance perte collaboration est tout d’abord une assurance facultative parce qu’il n’est pas question de créer une charge supplémentaire pour la profession. Elle peut être souscrite par le cabinet pour le compte des collaborateurs mais ma préférence va à des collaborateurs qui agissent de manière responsable et souscrivent cette cotisation qui est peu élevée, 180 euros/an. C’est une charge déductible qui leur apporte une sécurité transitoire entre deux collaborations. Le temps moyen pour retrouver une collaboration est de 4 mois. Sachant que le délai de préavis est de 3 mois, le collaborateur bénéficie ainsi d’une période de sécurisation de l’ordre de 7 mois environ, ce qui est très raisonnable dans le marché que nous connaissons.

L’indemnisation de base est de 2500 € par mois pendant 4 mois, ce qui permet de faire face aux éventuelles charges que peut avoir le collaborateur. Des options permettent d’avoir des cotisations plus importantes et donc une indemnisation plus importante. Pour toucher cette indemnisation pendant 4 mois, deux conditions doivent être remplies : une présence du collaborateur dans le cabinet pendant un an préavis inclus et un délai de carence de 30 jours suivant la fin du délai de préavis.

A la fin de la mandature, un bilan sera fait sur le nombre d’adhésions. Pour que cette assurance puisse perdurer, il faut qu’il y ait un nombre significatif de collaborateurs qui y adhèrent."

L’acte d’avocat est devenu une réalité, comment entendez-vous en assurer le succès ?

"L’acte d’avocat a été un grand chantier de la mandature du Bâtonnier Christian Charrière Bournazel qui a été poursuivi par le Bâtonnier Jean Castelain. C’est une avancée pour les avocats et un moyen pour eux de se positionner dans le monde du droit. Il faut développer le concept et mener une campagne d’information afin que nos confrères intègrent cet outil dans leur pratique et s’emparent de ce marché. Les avocats peuvent ainsi devenir rédacteur d’actes dans beaucoup de domaines. Le meilleur moyen de développer cette pratique est sans doute de compléter la formation des avocats par l’élaboration d’un guide pratique. Par ailleurs, se pose la question de la conservation de l’acte d’avocat. C’est un véritable chantier à explorer sur lequel je souhaite avancer rapidement."

Comment fonctionne la centrale de référencement Praeferentia ?

"Praeferentia est un projet de bon sens qui consiste à se servir de notre force numérique pour réduire nos charges. N’importe quelle grande entreprise le fait aujourd’hui, donc a fortiori pourquoi pas un ordre organisé comme le nôtre ? Concrètement, entre le 11 janvier 2012, date du lancement du site internet Praeferentia et le 13 janvier 2012, le site a eu plus de 9.000 visites et 110.000 pages ont été consultées. C’est donc un très vif succès !

Les avocats du Barreau de Paris peuvent ainsi faire leurs achats en accédant au catalogue de produits présentés par famille. Pour les achats plus complexes, qui nécessitent aide et assistance, ils peuvent se faire aider directement par les prestataires référencés. Ces derniers ont été soigneusement choisis dans le cadre de consultations, aux termes desquelles des négociations ont été menées par l’Ordre des avocats. Grâce à une délégation du Bâtonnier Jean Castelain, j’ai pu avancer sur ce projet tout au long de l’année 2011. Cette centrale a nécessité 8 mois de travail avec toute une équipe mobilisée autour de ce projet et pilotée par Philippe Rochmann.

Je souhaite que cette centrale s’élargisse au personnel des cabinets et à d’autres barreaux. C’est pourquoi, nous avons choisi une appellation qui n’est pas marquée « Ordre de Paris » et qui peut bénéficier à d’autres."

Merci.

Voir aussi : "Innovation : Une assurance Perte de collaboration au barreau de Paris".

Propos recueillis par Laurine Tavitian
Village de la justice

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