Les principales dispositions concernant la fiscalité des sociétés sont les suivantes :
1. Contribution additionnelle de 3% sur les distributions de dividendes (Art 5)
Le projet de loi prévoit l’instauration d’une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés assise sur les montants distribués, qu’il s’agisse de dividendes ou des sommes assimilées au sens fiscal.
Cette taxe serait due par toute entreprise ou organisme français ou étranger imposable en France à l’impôt sur les sociétés à l’exception des sociétés répondant aux critères de la « PME communautaire » c’est-à-dire celles qui emploient moins de 250 salariés et qui réalisent moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires ou dont le total du bilan est inférieur à 43 M€.
Seraient toutefois exclus, les dividendes exonérés en application de l’article 119 ter du CGI, de ceux correspondant à titres « éligibles » au régime « mère-fille » sous réserve qu’ils proviennent de titres de participation représentant au moins 10% du capital de la société émettrice.
Constitueraient donc la base de cette contribution les revenus distribués aux personnes physiques, aux sociétés et personnes morales détenant des participations inférieures à 10% ou constitutives de valeurs mobilières de placement et aux organismes publics (le sort des dividendes versés aux sociétés mères domiciliées dans des Etats tiers doit être clarifié).
Cette contribution, à la charge de la société distributrice, serait égale à 3% du montant des revenus distribués et devrait être payée spontanément au plus tard le dernier jour du deuxième mois qui suit la mise en paiement de la distribution.
Elle s’appliquerait également aux résultats des établissements stables de sociétés étrangères lors de leur mise à disposition du siège étranger (en principe hors Union européenne).
Les crédits d’impôt ne seraient pas imputables sur la contribution à l’exception probable des crédits d’impôt étrangers imputables en application d’une convention fiscale.
La contribution serait applicable aux montants mis en paiement ou considérés comme mis en paiement à compter de la date de publication de la loi au JO.
2. Versement anticipé de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés de 5% (Art 9)
Instaurée par l’article 30 de la loi de finance rectificative pour 2011, la contribution exceptionnelle de 5% sur l’impôt sur les sociétés est actuellement due en même temps que la liquidation du solde de l’impôt. Aussi, pour les entreprises clôturant au 31 décembre 2012, cette contribution aurait dû être versée le 15 avril 2013.
Le projet de loi prévoit d’instaurer un acompte à cette contribution qui serait versé en même temps que le 4ème acompte d’impôt sur les sociétés des grandes entreprises, soit le 15 décembre.
Cet acompte serait dû par les « grandes entreprises » dans les conditions suivantes :
75% du montant estimé pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires compris entre 250 millions et 1 milliard d’euros,
95 % du montant estimé pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros.
S’agissant des sociétés membre d’un groupe fiscal intégré, ces seuils seraient appréciés au niveau du groupe.
Enfin, seules les erreurs de plus de 20% et 100 000 € par les entreprises redevables de l’acompte de 75% et de plus de 20% et de 400 000 € par celles redevables de l’acompte de 95% entre le montant estimé et le montant réellement seraient soumises à intérêt de retard et majoration.
Cet acompte serait applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012.
3. Non déductibilité des abandons de créance à caractère financier (Art 14)
Le dispositif prévoit de rendre non déductibles du bénéfice imposable des entreprises, à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés, les aides à caractère financier qu’elles accordent à d’autres entreprises, le plus souvent à leurs filiales. Seules resteraient donc déductibles les aides à caractère commercial.
Ce texte est présenté comme un moyen de dissuader une société mère de recapitaliser sa filiale en difficulté, en accordant une aide fiscalement déductible plutôt que d’opérer une recapitalisation affectant la seule valeur des titres (donc sans déduction fiscale).
Si l’objectif avoué est de lutter contre les pratiques « conduisant à la remontée en France de pertes étrangères », le texte ne fait aucune distinction selon que la filiale serait étrangère ou établie en France pour éviter tout reproche de discrimination. Par ailleurs, l’imposition chez la société qui consent l’aide n’est pas exclusive de l’imposition chez la société qui en bénéficie, en l’absence d’augmentation de capital.
Ces modifications s’appliqueraient aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012 et affecteraient donc des abandons de créance déjà effectués au cours de l’exercice en cours.
4. Imposition du profit résultant de l’apport d’actifs à valeur décotée (Art 15)
Ce texte propose de mettre fin aux difficultés comptable et fiscale liées à l’incorporation au capital d’une société d’une créance décotée.
La société bénéficiaire de l’incorporation devrait constater un produit taxable à concurrence de l’excédent de la valeur de l’apport (la créance décotée) sur la valeur réelle des titres émis en contrepartie de l’incorporation (ou de l’accroissement de la valeur des titres existant).
Corrélativement, la plus ou moins value réalisée par la société apporteuse lors de la cession des titres émis à cette occasion serait déterminée en considération de la valeur réelle des titres reçus et non de leur valeur nominale.
Ces modifications s’appliqueraient aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012. Autrement dit, pour les entreprises clôturant au 31 décembre, cette disposition serait rétroactivement applicable à compter du 1er janvier 2012.
5. Création d’une contribution exceptionnelle due par certains établissements de crédit (Art 7)
Cet article prévoit l’exigibilité, au titre de l’année 2012, d’une contribution additionnelle de même montant que la taxe de risque systémique déjà acquittée au titre de 2012.
6. Doublement du taux de la taxe sur les transactions financières (Art 6)
A compter du 1er août 2012, les transactions assujetties à la taxe sur les transactions financières verraient leur taux doubler et passer de 0,1 à 0,2 % du montant de ces transactions.
7. Art 209 II et 221 5 du CGI - Lutte contre les transferts abusifs de déficits (Art 12)
La gestion des déficits des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés, déjà mise à mal par la loi de finances rectificative pour 2011, est à nouveau limitée par cette disposition.
Le projet prévoit d’une part de limiter les possibilités d’obtenir par agrément le transfert de déficits en cas de fusion ou apport partiels d’actifs.
Désormais, les sociétés absorbantes ou bénéficiaires des apports devraient s’engager à ne pas opérer de « changement significatif » de l’activité à l’origine de ces déficits notamment en termes de clientèle, d’emploi, de moyens d’exploitation effectivement, de nature et de volume d’activité.
Seraient par ailleurs expressément exclus les déficits provenant de la gestion d’un patrimoine mobilier par une société dont l’actif est principalement composé de participations financières et ceux résultant de la gestion d’un patrimoine immobilier.
D’autre part, même en dehors de la procédure d’agrément, les possibilités de conserver les déficits lorsque l’entreprise procède à un changement de son activité déficitaire sont considérablement limitées.
La notion de « changement d’activité réelle » est désormais définie selon des critères stricts. En cas d’adjonction d’ activité, nouvelle ou existante, une augmentation du chiffre d’affaires ou de l’effectif moyen du personnel et du montant de l’actif immobilisé de plus de 50% pendant les deux premières années engendrerait la perte des déficits.
De même, une baisse de 50% de ces mêmes éléments de l’activité initiale et dans les mêmes délais entrainerait également la perte du droit au report des déficits.
A défaut de respect de ces conditions, une procédure de maintien des déficits par agrément serait toutefois proposée lorsque les opérations sont indispensables à la poursuite de l’activité et à la pérennité de l’emploi.
Ces modifications s’appliqueraient aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012. Autrement dit, pour les entreprises clôturant au 31 décembre 2012, cette disposition serait rétroactivement applicable à compter du 1er janvier 2012.
Cette réforme rendrait notamment sans effet, dans la plupart des cas, la solution consistant à faire absorber une société bénéficiaire par une société déficitaire pour préserver les déficits de cette dernière car une telle opération entraînerait probablement un changement d’activité de l’absorbante.
8. Dispositif anti abus relatif aux schémas de désinvestissement (Art 13)
Sont notamment visés par ce dispositif, les schémas consistant pour une société, moins de deux ans après l’acquisition des titres d’une autre société, à absorber cette dernière sous le régime de faveur des fusions et à déduire, à cette occasion, une moins-value à court terme résultant de l’annulation des titres de la société ainsi absorbée : cette moins-value ne serait plus déductible à concurrence des distributions reçues de la société acquise ayant ouvert droit au bénéfice du régime mère-fille.
Cette disposition s’appliquerait aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012 et serait donc applicable aux opérations d’absorption réalisées à compter du 1er janvier 2012 pour les entreprises clôturant au 31 décembre.
9. Art 209 B du CGI - Renversement de la charge de la preuve pour l’application de la clause de sauvegarde (Art 11)
Actuellement, l’article 209 B du CGI n’est pas applicables aux entités bénéficiant d’un régime fiscal privilégié et implantées dans un Etat non membre de l’Union européenne si cette entité exerce une activité industrielle ou commerciale effective sur le territoire de cet Etat. La société française doit toutefois apporter la preuve que cette localisation ne répond pas à un objectif principalement fiscal lorsque les revenus de cette entité proviennent pour plus de 20% de revenus passifs ou de 50% de revenus passifs et de prestations de services intragroupe.
Le projet de loi étant le renversement de la charge de la preuve de sorte que pour toute activité bénéficiant d’un régime fiscal privilégié, et ce, indépendamment de tout seuil, la société française devra démontrer que sa localisation ne répond pas à un motif fiscal prépondérant, démonstration qui sera présumée effectuée si l’entité exerce une activité industrielle ou commerciale effective dans l’Etat considéré.
Enfin, la distinction avec les Etats ou Territoires Non Coopératifs (ETNC) serait supprimée.
Cette disposition serait applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012.
10. Suppression de la retenue à la source applicable aux OPCVM étrangers situés dans un Etat membre de l’Union européenne (Art 5)
Pour répondre aux conséquences induites par l’arrêt « Santander » de la CJUE du 10 mai 2012 au titre duquel la retenue à la source appliquée aux dividendes versés aux OPCVM situés dans un Etat de l’Union européenne avait été déclarée contraire au droit communautaire, cette retenue serait supprimée en sorte que l’exonération déjà applicable aux organismes français leur soit étendue.
Pour ce, les organismes étrangers devront toutefois fonctionner selon des conditions similaires à celles applicables selon la réglementation française.
Cette exonération serait applicable aux revenus versés à compter de la publication de la loi au JO.
11. Suppression de l’avantage fiscal lié à la provision pour investissement (Art 10)
La possibilité de constituer en franchise d’impôt une provision pour investissement pour les entreprises qui ont, soit adopté une formule dérogatoire de calcul de la participation des salariés, soit décidé de distribuer volontairement une participation serait supprimée à compter de la date de publication de la loi.
12. Contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers (Art 8)
Une contribution de 4% serait mise à la charge des entreprises détentrices de stocks de produits pétroliers et assise sur le volume de produits pétroliers placés sous un régime suspensif situés sur le territoire français. Il semblerait que le produit annoncé soit considérablement sous-évalué. Cette contribution serait probablement répercutée sur les consommateurs. Elle serait payée au plus tard le 15 décembre 2012.
13. Abrogation de la TVA sociale (Art 1)
En dépit des récentes recommandations de la Cour des comptes en faveur d’une augmentation du taux normal de TVA pour des raisons d’équilibre des finances publiques à horizon 2013, l’augmentation du taux de TVA de 19,6% à 21.20% qui devait s’appliquer au 1er octobre 2012 serait abrogée pour préserver le pouvoir d’achat des ménages. Corrélativement, la baisse de cotisations patronales familiales qui accompagnait cette hausse de la TVA serait également supprimée.
En revanche, la hausse de deux points des prélèvements sociaux sur les revenus du capital serait maintenue.
14. Rétablissement du taux réduit de TVA à 5,5% sur les livres (Art 24)
Le taux de TVA réduit de 5,5% serait de nouveau applicable à la fourniture et location de livre, quel que soit leur support (incluant le livre numérique), à compter du 1er janvier 2013.
On rappelle que l’application en France depuis le 1er janvier 2012 du taux réduit au livre numérique est actuellement discutée par la Commission européenne qui est susceptible d’engager une procédure d’infraction. Si une telle procédure devait aboutir, la France serait, en principe, dans l’obligation de revenir sur l’application du taux réduit au livre numérique.
Les principales dispositions concernant la fiscalité des particuliers sont les suivantes :
15. Contribution exceptionnelle sur la fortune au titre de l’année 2012 (Art 3)
Ce dispositif prévoit d’instaurer, pour les redevables de l’impôt sur la fortune au titre de l’année 2012 (patrimoine net imposable supérieur à 1,3 millions d’euros), une contribution exceptionnelle au titre de l’année 2012. Cette contribution serait calculée selon un barème progressif inspiré de l’ISF 2011 et le paiement serait à effectuer au plus tard le 15 novembre 2012. Cette contribution ne serait pas plafonnée en considération des revenus.
16. Aménagement des droits de mutation à titre gratuit (Art 4)
Le projet de loi propose d’abaisser de 159 325 € à 100 000 € l’abattement personnel applicable pour les donations et successions sur la part de chacun des ascendants et de chacun des enfants.
Il propose par ailleurs de porter de dix à quinze ans le délai de rappel fiscal des donations consenties entre ces mêmes personnes, délai qui avait déjà porté de six à dix ans en 2011. Il propose en outre de supprimer l’indexation sur le barème de l’impôt sur le revenu des tarifs et abattements applicables en matière de droits de mutations à titre gratuit.
La plupart d ces mesures seraient applicables à compter de l’entrée en vigueur de la loi.
17. Assujettissement aux prélèvements sociaux sur le capital des revenus immobiliers de source française (revenus fonciers et plus-values immobilières) perçus par les non-résidents (Art 25)
Par cette disposition, les personnes physiques non résidentes seraient assujetties aux prélèvements sociaux, soit 15,5%, à raison des revenus fonciers et des plus values immobilières réalisés en France, à l’instar des personnes fiscalement domiciliées en France déjà assujetties à ces prélèvements. L’applicabilité de ce dispositif aux personnes résidant dans un autre Etat de l’Union européenne est incertaine dès lors qu’elle repose sur l’idée que ces prélèvements ont le caractère d’un impôt, analyse qui ne semble pas en ligne avec celle de la Cour de justice.
18. Augmentation du forfait social (Art 27)
Le forfait social vise principalement les sommes affectées à la participation des salariés. Le taux de cette contribution passerait de 8 à 20% et serait applicable aux rémunérations versées à compter du 1er septembre 2012.
19. Hausse des contributions patronales et salariales sur les attributions de stock options et actions gratuites (Art 26)
Le taux de la contribution patronale due au moment de l’attribution des options ou des actions gratuites, passerait de 14% à 30%.
Le taux de la contribution salariale due lors de la cession des titres concernés, passerait de 8% à 10%.