Tout savoir sur la décision 48SI.

par Julien Gueguen-Caroll, Avocat.

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Explorer : # annulation de permis # notification administrative # recours gracieux # droits des administrés

La décision 48 SI est une décision administrative individuelle. Cette décision est née de la fusion entre la lettre 48 et la lettre 49 qui enjoint de restituer son permis de conduire. Ainsi, depuis le décret n°2008-754 du 30 juillet 2008, la décision 48 SI récapitule donc l’ensemble des pertes de points en mentionnant la date, l’heure et le lieu de l’infraction, ainsi que le nombre de points retirés pour chacune des infractions.

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Cette décision constate également la nullité du permis de conduire pour solde nul et enjoint à son titulaire de le restituer auprès des services préfectoraux dans un délai de 10 jours à compter de la réception de celle-ci.

Textes de référence

Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : article 19, article 20,

Loi n°78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal : article 8

Code de Justice administrative : article R421-1

Code de la Route : article L.223-1, article L223-3, article L223-5, article R.223-1, article R.223-2, article R.223-3

Loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public : article 1, article 3

Éléments fondamentaux : les garanties de l’administré face à la décision 48SI

  • L’auteur de la décision

Celui-ci ou celle-ci doit être clairement identifiable. En l’espèce, il s’agit du ministre de l’Intérieur – le service national du fichier des permis de conduire. C’est auprès de ce dernier que les recours gracieux contre la décision 48 SI devront être effectués.

  • L’accusé de réception des demandes faites par les administrés (Article 19 de la Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations)

Dans le cadre d’une annulation de permis, il est d’usage d’effectuer un recours gracieux contre l’autorité administrative auteur de cette décision avant tout recours contentieux devant le juge administratif. Le ministre de l’Intérieur n’est pas dans l’obligation de répondre, cependant il a l’obligation d’accusé réception de la demande en indiquant tout d’abord si cette demande peut ou non faire l’objet d’une décision implicite de rejet, puis, dans un second temps, indiquer les voies et délais de recours à l’encontre de la décision. Le défaut d’accusé de réception est sanctionné par l’inopposabilité à l’auteur de la demande des voies et délais de recours contre la décision.

  • La garantie que la demande de l’automobiliste sera dirigée vers l’autorité compétente (Article 20 de la Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations)

En cas d’erreur de l’administré, l’administration a l’obligation de transmettre la demande à l’autorité compétente. Par conséquent, la réclamation à l’encontre de la décision 48 SI sera toujours transmise par l’autorité compétente au Ministre de l’Intérieur.

  • La connaissance des motifs

Les décisions administratives individuelles défavorables doivent être motivées. Cette obligation légale de motivation des décisions individuelles défavorables s’étend notamment aux décisions qui « constituent une mesure de police  » ou « infligent une sanction ». La motivation doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait de nature à permettre au requérant de faire part de ses observations. Cependant, les simples mentions figurant sur la décision 48SI ne sauraient satisfaire aux exigences de la loi du 11 juillet 1979, car cette décision ne peut se contenter de mentionner la date et l’heure de l’infraction et le nombre de points retirés. En effet, la lettre 48SI devrait au minimum comporter des éléments afférents aux circonstances dans lesquelles ont été commises les infractions pour remplir les conditions posées par la loi du 11 juillet 1979. Le Conseil d’État dans ses éminents arrêts : Dame Veuve Trompier Gravier (CE, 5 mai 1944) et Aramu (CE 26 octobre 1946) proclame le principe général du droit de la défense impliquant que les administrés aient étés mis en mesure et disposent des moyens nécessaires pour présenter utilement leur défense. Or, force est de constater que l’inexistence de motivation de la décision 48 SI ne permet en aucun cas pour les automobilistes de connaitre les motifs de cette décision et par conséquent de pouvoir présenter utilement leur défense.

Cette motivation est donc insuffisante car la décision ne mentionne pas les textes prévoyant un retrait de point pour chacune des infractions. En outre ce document n’apporte pas la preuve que l’automobiliste ait été informé au préalable d’un retrait de point pour chacune de ses infractions. Par conséquent, celui-ci se retrouve dans une situation lui portant préjudice, en effet celui-ci n’ayant pas était informé au moment de chaque infraction d’une perte de point, il n’a pas pu contester ces mêmes infractions devant les tribunaux judiciaires et n’a pas pu effectuer de stage de récupération de points lui permettant ainsi de compenser les pertes de points et par extension éviter une annulation du permis de conduire pour solde nul.

L’automobiliste supporte donc un préjudice qui s’analyse en la perte de chance de contester ces infractions, d’effectuer un stage de récupération de point et d’éviter une annulation du permis de conduire. Cependant, les juridictions administratives considèrent la motivation de la décision 48 SI comme suffisante. En jugeant l’inverse cela conduirait tout simplement à déclarer illégales l’ensemble des décisions portant annulation du permis de conduire pour solde nul.

  • Les conditions de notification de la décision 48SI

La notification de la décision 48SI se fait par lettre recommandé avec accusé de réception, contrairement à la volonté des parlementaires qui désiraient employés la lettre simple lors des travaux parlementaires en 1989.

  • Lorsque la notification est régulière

Pour être valablement opposable, la décision 48 SI doit être envoyée par courrier recommandé avec AR, à défaut, l’administration n’apporte pas la preuve de cette notification et ainsi elle ne pourra aucunement opposer les voies et délais de recours contentieux (2 mois à compter de la notification de la décision 48 SI) au destinataire désireux d’attaquer cette même décision. En effet, la loi du 17 juillet 1978 dispose en son article 8 que « sauf disposition prévoyant une décision implicite de rejet ou un accord tacite, toute décision individuelle prise au nom de l’État, d’une collectivité territoriale, d’un établissement public ou d’un organisme, fût-il de droit privé, chargé de la gestion d’un service public, n’est opposable à la personne qui en fait l’objet que si cette décision lui a été préalablement notifiée ».

Bon à savoir : Attention il ne faut pas confondre la validité et l’opposabilité de la décision 48SI. Le Conseil d’État se refuse à conditionner la validité de cette décision à sa notification (CE 26 juin 1991requête n° 78111). Cela signifie que l’absence de notification de cette dernière est sans incidence sur sa validité. En d’autres termes, en cas de mauvaise notification, les voies et délais de recours pour contester la décision 48SI ne seront pas opposables à son destinataire.

De plus, le recommandé doit être signé par le destinataire de la décision et non par une autre personne. Dans le cas contraire, en rapportant la preuve devant le juge administratif que ce n’est pas le destinataire qui a signé le recommandé on considère que la décision n’a pas été notifiée. C’est ainsi que la notification adressée par pli recommandé mais remise au gardien de l’immeuble dans lequel se trouve la résidence du destinataire, est, en l’absence de procuration donnée à cet effet au gardien, irrégulière (Conseil d’État 30 novembre 1977 ; req N° 02135).

Bon à savoir : Attention si le recommandé dans ce cas est réceptionné et signé par le conjoint du destinataire, le Conseil d’État considère que la notification est valable.

  • Lorsque la notification est faite à l’adresse qui n’est plus celle de l’administré

Il arrive fréquemment que les automobilistes changent d’adresse et oublient d’informer l’administration de ce changement, par conséquent, si une décision 48 SI est prises à leur encontre, elle sera envoyée à leur ancienne adresse. Figurera alors, sur le relevé d’information intégral du destinataire la mention NPAI indiquant la date où la décision devant être notifiée n’a pas pu l’être en raison du changement d’adresse constaté par les services postaux. Si l’automobiliste n’a jamais reçu notification de la décision 48 SI car cette dernière n’a pas été envoyée à la bonne adresse et qu’il désire tout de même l’attaquer devant les juridictions administratives, il faut qu’il effectue au préalable une demande de notification de 48 SI au Ministère de l’Intérieur.

L’article R. 412-1 du Code de justice administrative dispose que « la requête doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ». Alors qu’auparavant de nombreuses cours administratives d’appels acceptaient de recevoir les demandes de contestation de décisions de retrait de points sur la simple base d’une production du relevé d’information intégral mentionnant la réception de la décision 48SI, une décision du Conseil d’État en date du 27 janvier 2010 (CE,27 janvier 2010 ; requête n° 318919) réprouve cette pratique et préconise une application littérale de l’article précité.

En vertu de cette décision, « le titulaire du permis qui demande l’annulation d’une décision portant retrait de points ou invalidation de son permis ne peut (…) se borner à produire le relevé d’information intégral issu du système national des permis de conduire où elle est enregistrée, mais doit produire la décision elle-même, telle qu’il en a reçu notification dans les conditions prévues à l’article R.223-3 du Code de la route ».

Il est néanmoins précisé plus loin qu’ « en cas d’impossibilité [il doit] apporter la preuve des diligences qu’il a accomplies pour en obtenir la communication ». Ainsi une personne n’ayant pas reçu la décision 48SI, ou l’ayant perdu pourra tout de même l’attaquer devant le juge administratif, en apportant simplement la preuve d’une demande effectuée auprès du ministère de l’Intérieur au service du fichier national des permis de conduire.

  • Lorsque la notification est faite l’adresse de l’administré lorsque celui-ci est absent : l’avis de passage

En principe la notification est valable à condition de vérifier que le destinataire a bien été avisé de l’avis de passage. Il ne faut donc pas se fier aux mentions indiquant l’avis de passage sur le relevé d’information intégral. En effet il y a souvent des erreurs, il est donc préférable de diligenter une enquête postale afin de s’assurer que le destinataire a bien été avisé. Dans le cas contraire les voies et délais de recours reste inopposable à l’égard du requérant.

Julien Guegen-Carroll - Cabinet d’avocats
Site internet : http://avocat-gc.com/permis

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