La mode est au dépôt de dossier
La mode est au dépôt de dossier en début de l’audience et à la limitation du temps de plaidoirie ? Les magistrats ont moins d’attention à accorder aux avocats. Pourquoi ?
Ils en donnent à la rédaction de leurs jugements. Ils en consacrent à leur radio et leur télévision en plus de leurs livres de chevet. Ils en concèdent à leur portable et à leurs réseaux sociaux. Et il faut que les magistrats trouvent encore de l’attention pour écouter les plaidoiries.
La perte d’attention, mal d’une époque de sur-stimulation des esprits ? C’est probable. L’avocat doit s’en accommoder. Il peut développer, pour être écouté, une nouvelle habileté : le pitch judiciaire.
Pitchez !
Qu’est-ce qu’un pitch ? Une présentation synthétique d’une activité, d’un projet, d’une entreprise.
A l’origine, le pitch est utilisé par le scénariste pour vendre son histoire auprès d’un producteur. Il consiste en un résumé percutant de son scénario pour séduire, convaincre. Un enjeu décisif car tout se joue en quelques minutes.
Quand privilégier le pitch judiciaire ? En situation de dépôt commenté à l’appel des causes : le pitch doit être particulièrement ramassé. Également en fin d’audience matinale sur le coup de midi, quand vous êtes la dixième affaire plaidée. Il y a intérêt à faire court et percutant pour capter l’attention de la juridiction.
En pareil cas, il est sans doute vain de tenter de bâtir une plaidoirie avec ses composantes traditionnelles : Exorde, problématique, situation, argumentation, objections, conclusion, péroraison.
Pitchez !
L’art du pitch judiciaire ?
Ramassé en trois mots, il pourrait être selon Cicéron : Plaire, émouvoir, convaincre.
Certains spécialistes insistent sur une accroche vive. D’autres soulignent le fait que les derniers mots seront parmi ceux les plus gardés en mémoire ; ils doivent donc être percutants.
D’autres encore proposent une liste de savoir dire : Accrocher, proposer, argumenter, balayer les principales objections, inviter.
Une chose est sûre, en la matière et ce n’est pas nouveau « Les longs discours n’avancent pas plus les affaires qu’une robe traînante n’aide à la course ». (Francis Bacon – Les Essais)
NDLR : il est à noter que cette nouvelle façon de s’exprimer pour les avocats est dans l’air du temps, c’est d’ailleurs l’innovation proposée par l’un des candidats au Prix de l’innovation des avocats en relation client organisé par le Village de la Justice.
Discussions en cours :
Cela fait 20 ans que les avocats n’ont d autre choix que de « pitcher » voire de balbutier péniblement quelques mots... et même en étant « maître pitcheur », la contrainte quasi systématique du dépôt de dossier est devenue l’usage... je m’aperçois en fait que, dès ma prestation de serment, en 2000, cette sensation désagréable que l’avocat n’est qu’un nuisible du Palais m’a tenaillée... et rien n’y a fait... les avocats ont eu beau réduire les plaidoiries, se soumettre aux attentes interminables en audience, supporter l’accessibilité difficile aux dossiers d’instruction, l’exclusion progressive du Palais ultra sécurisé....plaider en 3 mn des dossiers qui en méritaient 45... préparer au mieux les dossiers pour compenser l’impossible plaidoirie... non, rien n’y a fait pour qu il soit à nouveau reconnu comme réel auxiliaire de justice et respecté en tant que tel.
Comme le disait un très Grand et Célèbre Publiciste : "Lorsque le droit bavarde, le Citoyen ne lui prête plus qu’une oreille distraite" Nos juges sont avant tout des Citoyens