« B2B » : Que change la loi Hamon entre professionnels ?

Par Yaël Cohen-Hadria, Avocate.

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Explorer : # relations commerciales # loi hamon # conditions générales de vente (cgv) # clauses abusives

Depuis quelques années, la loi et la jurisprudence évoluent et tendent à encadrer les relations contractuelles entre professionnels. C’est ce que rappelle la loi HAMON et sa mise en application.

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Il a toujours été admis qu’entre deux professionnels seul le contrat prévaut et des clauses parfois même quelque peu « abusives » pouvaient être signées car elles intégraient une économie générale du contrat ou un contexte économique propre à un secteur d’activité.

Cette pratique tend à être révolue et les relations commerciales « B2B » (« Business to Business »), entre les entreprises, connaissent une réelle métamorphose. La règle est désormais l’encadrement ces relations « B2B » ou inter-entreprises.

La première forte évolution en la matière est la loi Hamon du 17 mars 2014 et la suivante arrive en septembre 2016 avec la réforme du droit des contrats, qui permettra notamment au juge de s’insérer dans les contrats, même entre professionnels.

Après 2 ans d’application de la loi Hamon, il est clair que cette loi a apporté des modifications contraignant certains professionnels à modifier leurs habitudes contractuelles : Faudrait-il changer ses CGV (Conditions Générales de Vente) en 2017 ?

Comme le rappelle l’article L441-6 du Code de Commerce, « Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Elles comprennent : les CGV, le barème des prix unitaires, les réductions de prix et les conditions de règlement ».

Les CGV du vendeur professionnel sont donc bien le socle de toute relation contractuelle « B2B » et prévalent en principe, sur les conditions générales d’achat comme le rappelle l’article susvisé : « Les CGV constituent le socle unique de la négociation commerciale. ».

Il est donc essentiel de s’assurer que les CGV sont en conformité avec les dispositions de la loi Hamon. Si ces CGV ne sont pas à jour il est impératif de les modifier et notamment sur les points suivants.

Le droit de rétractation pour certains professionnels ?

Oui ! Il faut mettre une clause « droit de rétractation dans les CGV », pour certains professionnels. Toutefois attention, il y a des conditions pour que ces professionnels bénéficient du droit de rétractation, et pas des moindre. Le droit de rétractation de 14 jours à compter de la réception du bien ou de la date de conclusion du contrat de service s’applique aux professionnels qui (article L121-16-1 du Code de la consommation) ont moins de 5 salariés dans l’entreprise et si l’objet du contrat n’est pas dans le champ d’activité principale de l’entreprise.

Or, la jurisprudence n’a pas donné de nouvelle définition du droit de rétractation à jour. Pour le moment nous pouvons seulement nous baser sur le rapport direct avec l’activité principale. A titre d’exemple un site internet serait dans le champ d’activité car il permet d’exercer l’activité, surtout si c’est pour vendre en ligne ses produits. En revanche un contrat d’assurance-vie du professionnel ou de vidéosurveillance d’un magasin ne serait pas dans le champ d’activité. Reste à la DGCCRF et aux juges du fond de définir ce qui entre ou non dans le champ de l’activité principale de l’entreprise.

Les délais de paiements ont-ils changés ?

Les conditions générales de vente peuvent prévoir un délai de paiement fixé à 30 jours à compter de la réception des marchandises ou de l’exécution de la prestation fournie. Le délai peut toujours être plus court ou être prolongé. Toutefois, si vous souhaitez prolonger ce délai, il ne doit pas dépasser les 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d’émission de la facture.
Que faire en cas de facture périodique ? Le délai de paiement ne peut être supérieur à 45 jours à compter de la date d’émission de la facture.
Attention :  n’oubliez pas de mettre à jour vos factures, notamment pour les conditions de règlement et les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date (40 euros).

Le devoir d’information est-il renforcé comme pour les consommateurs ?

A la lecture de l’article L441-6 du Code de commerce, il apparaît que même entre professionnels l’obligation d’information complète doit être fournies et même renforcée car la loi assimile ici le professionnel à un consommateur.

Ainsi « tout prestataire de services est tenu à l’égard de tout destinataire de prestations de services (professionnel, non-professionnel ou consommateur) des obligations d’information » définies aux articles L111-1 et L111-2 du Code de la consommation. L’information porte notamment sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix, la date d’exécution des prestations si ce n’est pas immédiat, l’identité exacte et complète du prestataire de services ou fournisseur de biens.

Exemple de l’information sur les contenus numériques :
- Le professionnel doit fournir : « Les informations relatives à son identité et ses activités, aux garanties, aux fonctionnalités du contenu numérique et le cas échéant à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ».

La liste des pratiques dites « abusives » a-t-elle- été modifiée ?

Les principales clauses et pratiques dites « abusives » ont été maintenues. Toutefois, il convient de souligner que l’article L442-6 du Code de commerce a été modifié pour ajouter de nouvelles pratiques condamnables si elles créent un déséquilibre significatif entre les parties au contrat. La jurisprudence sur la rupture brutale des relations d’affaire est donc plus que jamais au goût du jour.

Tableau présentant les pratiques « abusives » :

Obtenir un avantage ne correspond à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Obtenir un avantage, sans l’assortir d’un engagement écrit sur un volume d’achat disproportionné.
Créer un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Obtenir des avantages sur les modalités du contrat en menaçant d’une rupture brutale des relations d’affaires.
Rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale. Participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau.
Soumettre un partenaire à des conditions de règlement manifestement abusives. Refuser ou retourner des marchandises ou déduire d’office du montant de la facture sans que l’autre partie ait pu en vérifier le bien fondé.
Ne pas communiquer le CGV. Refuser au fournisseur de mentionner son nom, son adresse sur le produit.

A notamment été ajoutée la pratique illicite consistant à facturer une commande de produits ou de prestations de services à un prix différent du prix convenu aux CGV ou lors de négociations. Il convient donc de bien mettre à jour les CGV et notamment circonscrire les conditions de facturation des services complémentaires.

En conclusion : il est impératif de mettre à jour les conditions générales de vente pour l’année 2017 en prenant en compte les obligations liées à la loi Hamon, à la réforme du droit des contrats mais également à jurisprudence sur les clauses abusives entre professionnels ou encore au regard de la nouvelle définition du consommateur.

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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 1er juin 2017 à 10:23
    par ALMANZA , Le 20 janvier 2017 à 11:56

    Bonjour, j’ai signé un contrat avec une société, qui me fourni un site web et u placement sur internet, ils n’ont qu’une obligation de moyen, contrairement à ce qui a été démarché par le commercial. Quatre mois de collaboration je paie et toujours pas de client. Après une tentative de résiliation à l’amiable qui m’a été refusée, je me pose beaucoup de questions quand au sérieux et professionnalisme de cette boite.
    Fautes d’orthographe et de syntaxe sur le site, et dans le contrat nous sommes responsable de tout et eux de rien. A priori ils ont le droit de résilier le contrat comme bon leurs semble mais pas le client ?.
    Pas de clauses de résiliation dans le contrat.
    J’aimerai faire lire les CGV à quelqu’un qui peut m’aider voir si ce contrat est légal, merci

    • par Christine Fournier-Blanc , Le 24 janvier 2017 à 13:12

      Bonjour, Comme Mr ALMANZA j’ai signé auprès de la même société, à quelques jours d’écarts, le même contrat pour une campagne de communication sur internet pour booster mon activité comme ils disent.
      Je paie très cher et cela ne me rapporte absolument rien. De plus j’ai un gros doute concernant l’authenticité des factures, j’en ai eu une d’un montant conséquent avant que la compagne me soit annoncée comme être opérationnelle. Comment est-ce possible ? J’ai demandé une résiliation amiable, à trois reprises, et je n’ai pas de réponse. Seulement un accord sur la non reconduction du contrat à la prochaine échéance soit le 07 Octobre 2017, mais aucune réponse à ma demande. Les CG du contrat que j’ai signé sont un peu différentes de celles du contrat de Mr Almanza.
      Puis les transmette à votre organisme, pour avoir un avis.
      Avec tous mes remerciements,

    • par Linda , Le 25 mai 2017 à 08:43

      Bonjour,
      J’ai le même souci que vous. Je ne sais pas si la société est la même mais de grosses sommes me sont prélevées et j’aimerais résilier.
      Les CGV leur permettent tout et moi je n’ai qu’à payer.
      Ils peuvent annuler le contrat mais je devrais payer moi le montant restant dû.
      Ma signature concernant les CGV ne se trouve pas sur celle-ci. Comme si on m’avait transmis d’autres CGV que celles que j’ai lu.
      Merci pour votre aide car les montant sont exorbitants !

    • par Debruyne Virginie , Le 1er juin 2017 à 10:23

      Bonjour,
      Je fais des études de DCG, à travers lesquelles j’ai découvert le droit qui me passionnent autant que la finance et la comptabilité.
      Tout d’abord, j’ai une question : avez-vous lu les conditions générales de vente avant de signer ?
      Le professionnel est dans l’obligation de fournir les CGV sur demande du client.
      Il me semble si j’ai bien compris, et j’aimerais que ce soit confirmé par un avocat membre du site, que si en effet, il y a obligation de moyens et pas de résultats, le professionnel est dans l’obligation de fournir une prestation de services conforme par la qualité et les caractéristiques à ce qui a été exposé au départ par ce professionnel. Ce qui signifie que le professionnel est dans l’obligation d’apporter tout le soin nécessaire pour fournir une prestation de services de qualité. Je crois, enfin me semble t-il, que les fautes d’orthographe sont la manifestation d’une absence de qualité. Quoique de nos jours......
      Et d’autre part, s’il est vrai que le code de consommation s’applique dans les relations b to c, lorsqu’un professionnel s’adresse à un autre professionnel, dans la mesure où le professionnel acheteur fait partie d’une branche d’activité complètement différente de celle du vendeur, les règles du code de consommation s’appliquent au même titre que dans le cas d’une relation B to C.

      Est-ce exact ?

      Merci pour votre réponse.
      Bien cordialement,
      Virginie D.

  • par brochard , Le 4 avril 2017 à 15:07

    Bonjour ;

    jeudi dernier deux commerciaux sont venus me démarcher sur mon épicerie pour des bijoux fantaisies, j’ai fais 5 cheques (bétise oui !!!! je débute )après leurs départ je les aient rappelés pour annulé il n a rien voulu savoir me disant que je ne pouvais rien faire et qu il avait la main sur mon compte pro j ai voulu utiliser la loi hamon mais il me dis que je n y ai pas le droit.j ai été à la gendarmerie mais il ne peuvent pas prendre de plainte. la société se trouve au maroc je n ai pas les noms des commerciaux juste une boite postale et un portable sois disant qu il ne travail sans carte que dois je faire ???? svp je suis perdu

  • par phil , Le 18 octobre 2015 à 19:19

    Bonjour,
    Je ne trouve pas la réponse à la question posée par "salek rachid".
    Qu’en est-il dans le cas d’un hébergement web entre les 2 professionnels ?

    Merci. Cordialement

  • Bonjour
    Qu’en est-il de la tacite reconduction entre pro ? Le loueur d’un service exemple hébergement web ou location d’un serveur, est-il tenu d’informer sont client par courrier de sa possibilité de résilier le service au plus tard 1 mois avant sa date de reconduction ?
    Il me semble que votre article ne couvre pas ce sujet
    Cordialement votre

    • par phil , Le 15 octobre 2015 à 16:26

      Bonjour,
      Je ne trouve pas la réponse à la question posée par "salek rachid".
      Qu’en est-il dans le cas d’un hébergement web entre les 2 professionnels ?

      Merci. Cordialement.

  • par jessie , Le 10 mai 2015 à 21:04

    bonjour,
    j’avais choisi un comptable qui m’avait envoyé sa proposition que j’avais accepté par mail, mais pas par contrat signé. Sur la proposition, les travaux concernant la "création de société", indiqué beaucoup de point qu’il faisait en matière sociale et facturerait 650€ .
    Toutefois, sur tous ces points, j’avais déjà fait la majorité des documents (statuts, PV d’assemblée, déclaration de non condamnation.....), il n’a donc exécuté qu’un tiers du descriptif).
    Il me demande malgré tout les 650€.
    Dois-je lui donner la totalité ou dois-je payer que les prestations qu’il a effectué réellement ? s’agit-il la d’une clauses abusives ?
    merci par avance
    jessie

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