Dans l’arrêt du 19 décembre 2024, la Cour de cassation rappelle les critères légaux pour la remise en cause de l’assurance-vie par les héritiers et affirme leur exhaustivité (Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 décembre 2024, n° pourvoi 23-19110).
L’assurance-vie est un contrat qui bénéficie d’un régime spécifique dans le cadre de sa transmission.
En effet, la somme reçue par le bénéficiaire désigné au contrat (capital ou rente) ne fait pas partie du patrimoine successoral et n’est donc pas partagée avec les héritiers du défunt.
L’assurance-vie pourrait ainsi apparaitre comme un moyen indirect de « déshériter » certains descendants.
Ceux excluent du bénéfice de ces contrats souhaitent que les fonds versés par le défunt, appelés primes d’assurances, soient réintégrés dans la succession.
Ces héritiers doivent alors démontrer que les « sommes versées par le contractant à titre de primes aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés » selon les dispositions de l’article L132-13 alinéa 2 du Code des Assurances.
La notion de primes manifestement exagérées, a été déterminée par les tribunaux selon trois critères : l’âge du souscripteur, sa situation patrimoniale et familiale, l’utilité de la conclusion de ce contrat pour lui.
Ces trois critères doivent être démontrés comme « inexistants » par les héritiers demandeurs pour qu’il puisse être prononcé par les juges le rapport au patrimoine successoral des primes d’assurances versées par le défunt.
En outre, le caractère exagéré des primes d’assurances doit être analysé au jour de leur versement par le défunt, et non au jour de son décès.
Dans l’espèce soumise à l’analyse de la Cour de cassation, il s’agissait d’un contrat d’assurances-vie souscrit par un parent, avec un unique enfant, qui avait pourtant désigné comme bénéficiaire exclusif une association d’intérêt public.
Étant donné que la réserve du descendant unique est de la moitié du patrimoine de son parent, le versement de primes d’assurances pour un total de 274 800 euros peut apparaitre « moralement » comme excessive vu qu’elle représenterait 75% de l’actif existant au décès.
La cour d’appel avait alors ordonné la réduction des primes d’assurances versées par la mère à hauteur de 130 000 euros et ordonné la réintégration à sa succession de 144 800 euros au bénéfice de l’enfant unique.
Pour autant, la Cour de cassation a « annulé » la décision d’appel au motif que l’intérêt des héritiers réservataires n’est pas un critère pour l’appréciation de la notion de primes manifestement exagérées [1].
L’exclusion de critère(s) « étranger(s) » à l’analyse par les tribunaux du caractère exagéré des primes d’assurances-vie avait déjà été tranché par la Cour de cassation, comme par exemple l’intention du souscripteur du contrat d’échapper aux règles du droit successoral [2].
Par cette récente décision, la Cour de cassation précise l’exhaustivité des trois critères d’appréciation et refuse leur extension jurisprudentielle.
Enfin, le recours à une décision de justice pour « limiter » le montant des primes versées hors de la succession n’est pas obligatoire. Il peut y avoir une transaction conclue entre avocats si un accord amiable est trouvé entre les héritiers et le bénéficiaire de l’assurance-vie.