Ce premier rapport note que la France est 1ère destination touristique mondiale, 3ème en matière de recettes, presque 7 % du PIB, un impact économique transversal reconnu, et au final une baisse du programme tourisme dans le projet de loi de finances pour 2012 (- 18,3 % pour les autorisations d’engagement et - 12,3 % pour les crédits de paiement). En outre, après avoir donner un avis favorable à ce vote, le rapporteur spécial « note toutefois que, contrairement à son prédécesseur Hervé Novelli – dont le parcours a été remarquable –, son successeur ne s’implique guère dans la politique du tourisme ».
Le projet de loi supprime la date butoir du 23 juillet 2012 date à laquelle les classements antérieurs des meublés de tourisme devaient cesser de produire leurs effets. Les effets du classement actuel de chaque meublé iront donc jusqu’aux termes des 5 ans, date à laquelle au plus tard, les propriétaires, le souhaitant, pourront demander le renouvellement en appliquant la nouvelle procédure et respecter les nouveaux critères.
Après l’échec des 2 dernières taxes tourisme (parcs de loisirs, taxe sur les nuitées des hôtels de luxe), la hausse du taux réduit de TVA à 7 % (projet de loi) pour la restauration, l’hôtellerie, les chambres d’hôtes, les vendeurs de sandwiches ou autres guides touristiques considérés comme des livres…, la réforme de la taxe de séjour sera t-elle la solution ?
Dans l’état, le projet de loi ou les rapports ne prévoient aucune réforme globale de la taxe, le premier objectif est de venir en aide à Atout France en créant une nouvelle taxe additionnelle au profit d’un fonds national constituant ainsi « un début de solution au problème de financement d’Atout France ». A quand une part additionnelle régionale ?
Le deuxième objectif (projet de loi) est de créer un double régime pour les « mobil-homes » : taxe de séjour « au réel » durant les périodes de flux touristiques et forfaitaire en dehors lorsqu’ils offrent une habitation résidentielle de longue durée pour les propriétaires sans être considérée comme résidence secondaire, ou d’offrir un habitat précaire pour des personnes en difficulté passagère. Un régime particulier de taxe d’habitation « ingérable en droit et en pratique » étant écarté. Ce projet de loi propose également une notice d’information pour les acquéreurs relatives aux obligations et au mode de jouissance de ces habitats, un contrat formalisé entre les établissements pouvant accueillir ce type d’hébergement et le propriétaire du bien (des précisions seront apportées par décret), une déclaration obligatoire et annuelle en mairie, un contrôle possible, même inopinée, par le maire et pour le locataire d’une période supérieure à 3 mois obligation lui est faite de fournier au propriétaire un justificatif de sa résidence principale de moins de 3 mois.
Autre point de ce projet portant sur la modification de l’article L324-1-1 du Code du tourisme, qui vient préciser que la déclaration d’un meublé est obligatoire « que celui-ci soit classé ou non… », « du fait d’une interprétation restrictive de la définition d’un meublé… ».
Concernant la taxe de séjour, on constate donc qu’il s’agit de 2 nouveaux paramètres « spécifiques », alors que le rapporteur estime « qu’il faudrait à la fois simplifier la structure et sécuriser le recouvrement de cette taxe et la rendre obligatoire… » et rappelle que moins de la moitié des communes touristiques ont instauré la taxe de séjour.
En 2001 un rapport de la commission des finances (4) faisait déjà état d’une nécessité de réformer la taxe de séjour. Le régime de la taxe devait s’adapter à l’évolution de la clientèle alors que la création de la taxe de séjour forfaitaire ne donnait pas le résultat escompté face aux réticences des professionnels.
Il est effectivement difficilement compréhensible, de voir des collectivités qui mènent des actions en faveur de la promotion du tourisme, ne pas instaurer la taxe de séjour comme moyen de les financer, alors que les réformes successives pèsent soi-disant sur leurs budgets. Aussi étonnant que fut la réaction de certains hébergeurs, contestant la méthode de perception des deux taxe, alors qu’ils disposent d’une ressource publique locale affectée en grande partie à la promotion de leurs établissements.
De rendre cette taxe obligatoire est certes une évidence pour les communes qui agissent au développement de leur potentiel touristique, mais le plus important serait d’expliquer, de démontrer et de prouver annuellement à l’ensemble des hébergeurs l’intérêt et l’affectation de cette taxe. Les collectivités qui optent pour cette méthode obtiennent de très bons résultats.
Favoriser la fréquentation touristique, c’est l’objectif de cette taxe depuis sa création en 1910 (sur une idée Allemande : la « Kur-taxe »). Favoriser c’est investir, mais c’est aussi promouvoir en rendant la destination France attractive. Promouvoir c’est financer une campagne publicitaire, informer par tous les moyens médiatiques et technologiques, éditer et distribuer des documents sur les salons, expositions… Qui est concerné, qui en bénéficie ?
La promotion « publique » est à la charge des OT, CDT, CRT et Atout France et comme le définit le 1er article du Code du tourisme cette promotion est réalisée en coopération et en coordination (Art. L111-1 du code du tourisme) ! Une mission commune à tous ! Dans son article 2 le même code renforce et précise clairement que « les collectivités territoriales sont associées à la mise en œuvre de la politique nationale du tourisme » ?!
Indépendamment de leurs propres campagnes promotionnelles, les retombées de cette promotion publique sont nombreuses, mais insuffisamment valorisées, pour : le transport, l’hébergement, la restauration, les musées, les monuments, les parcs de loisirs, les visites d’entreprises et de sites industriels, parcs animaliers et zoos, boutiques de souvenirs, activités sportives de loisirs, expositions, festivals, foires, salons, le tourisme religieux… autant d’activités pour réfléchir à l’élargissement de l’assiette de perception… et de revoir simultanément à la baisse le barème en l’adaptant au maximum d’hébergements touristiques (roulottes, camping-cars, cabanes dans les arbres, yourtes…).
A titre d’exemple, imaginons 76,8 millions de touristes (internationaux) auxquels s’ajoutent les 35 millions de français qui partent encore en vacances et qui pratiqueraient, sur une année, seulement 5 des activités citées plus haut (hors hébergements), à 0,35 € de taxe par activité : recette 200 millions d’euros … à rajouter aux 180 millions d’euros générés actuellement par les seuls hébergements…
Imaginons encore, les 15 sites touristiques français payants les plus visités, environ 60 millions d’entrées, toujours au tarif de 0,35 € : résultat encore 20 millions de recettes supplémentaires … sur seulement 15 sites !!!
Deux réflexions sans aucune prétention, mais qui autorisent à croire que le régime actuel n’est pas performant, déséquilibré selon les communes et qu’une réforme s’impose, notamment sur l’élargissement de l’assiette de perception, sans peser sur le chiffre d’affaires des entreprises et en répartissant une contribution moins élevée pour les touristes français et étrangers.
Réformer avant de subir une baisse significative du produit de la taxe de séjour, car il ne faudrait pas négliger les réactions significatives de certains hébergeurs : les propriétaires de meublés de tourisme peu enclins à faire reclasser leurs biens (seulement 150 000 sur les 800 000 ont fait la démarche en 1 an et demi) malgré l’avantage fiscal dont-ils disposent (71 % d’abattement de la base imposable contre seulement 50% pour un meublé non classé) ou encore les 53 % des hôteliers indépendants qui refusent le nouveau classement et ne souhaitent pas le demander (source : hjr infos) et enfin les résidences de tourisme qui n’ont pas les moyens de mettre leurs établissements en conformité avec les nouvelles normes et qui n’envisagent pas de demander le classement.
Un cercle « vicieux » se met en place, non classés, ces établissements ne seront plus promus, ni par Atout France, ni par les offices de tourisme et la taxe de séjour perçu au titre de ces hébergements sera réduite. Considérant, que la majorité du montant de la taxe est destiné à financer partie des missions des offices de tourisme (et bientôt Atout France ?) on comprend mieux maintenant pourquoi ces derniers, par manque de moyen, ne seront plus obligés de promouvoir les hébergements non classés et cela, au détriment de l’exhaustivité relevant de l’égalité du citoyen devant la charge publique. Pour la mission de service public confié à un office de tourisme, cela signifie que « toutes les personnes se trouvant placées dans une situation identique à l’égard du service doivent être régies par les mêmes règles » (CE, 29 déc. 1911, Chomel : Rec. CE 1911, p. 1265 ; S. 1914, 3, p. 102). Le Conseil constitutionnel reconnaît désormais expressément l’égalité devant le service public comme un principe à valeur constitutionnelle (Cons. const., 27 juin 2001, déc. n° 2001-446 DC, IVG : LPA 28 déc. 2001, p. 21, comm. B. Mathieu, M. Verpeaux).
Concrètement, ce principe est d’ailleurs appliqué à juste titre par les agents des DDCCRF obligeant notamment, lors de leurs contrôles, les offices de tourisme à lister tous les prestataires d’un même secteur d’activité tels que les restaurateurs, hébergeurs, centre de loisirs…
Aucune dérogation n’est donc recevable et à moins de discréditer certains hébergements qui ne voudraient pas être classés par choix de l’exploitant ou ne pourraient pas l’être par l’absence de réglementation (chambre d’hôtes), on conçoit donc difficilement la distinction faite, et, à plus forte raison, on peut s’interroger sur le fondement de la diffusion obligatoire ou facultative incombant à l’office de tourisme. Une contradiction créée par le critère de classement 1.2.3.1 de l’arrêté du 12 novembre 2010, qui reste infondée et discriminante.
Et les autres ? Les inclassables : ni hôtel, ni résidence de tourisme, ni meublé et qui se dénomment résidences de vacances, résidences hôtelières, résidences services, location saisonnières… qui va les promouvoir, si les offices de tourisme n’y sont plus obligés ?
Dans le même cadre, les chambres d’hôtes qui ne peuvent être classées, ne disposeront (à condition d’adhérer) que des labels ou autres chartes pour leur promotion… alors que l’on constate selon les départements des disparités, voir des irrégularités en matière de promotion, selon le label et les « liens » dont il dispose avec le conseil général et le CDT ! En outre, rigueur budgétaire oblige, les financements de ces labels privés par les conseils généraux tendent à diminuer. A défaut, chacun ira de son blog pour rendre son hébergement visible. Et le client quelle lisibilité aura t-il de l’organisation touristique « d’excellence » à la française ???!!!
Paradoxal à l’application des articles D.324-1-1 et D.324-15 du Code du tourisme pour lesquels les listes des meublés de tourisme et des chambres d’hôtes sont consultables en mairie alors qu’elles le seraient de manière aléatoire dans les offices de tourisme chargés d’une mission de service public, dont la promotion, par cette même mairie !!!???
Paradoxal avec la déclaration de Frédéric Lefebvre sur la Corse : « Ce joyau est destiné à une clientèle à fort pouvoir d’achat, mais nous nous faisons forts de prendre en compte tous les types d’hébergement. Des offres qui doivent répondre aux attentes de tous les touristes » (source : Corse Matin) !!!
Pour conclure dans ce registre des contradictions qu’en est-il du sens à donner aux articles D.321-1 et L.321-1 du code du tourisme qui pour le premier affirme que « La résidence de tourisme est un établissement commercial d’hébergement classé… » et pour le second laisse la possibilité « S’il souhaite obtenir le classement, l’exploitant… » ?
Positivons, le projet de loi propose de supprimer « les chambres d’hôtes » à l’article L.141-2, al. 6, qui dans les missions d’Atout France est énoncé « - concevoir et tenir à jour les tableaux de classement … des chambres d’hôtes… », il était temps, ces dernières n’ont jamais pu être classées !
En marge une lettre ouverte du comité pour la modernisation de l’hôtellerie française s’interrogeait sur le partenariat entre Atout France et le Grouper Accord et le rôle exact d’Atout France « dont l’efficacité en termes de promotion touristique de la destination France et de budgets dépensés n’est jamais mesurée » (source : Comité de modernisation) et plus précisément encore, quel sens à donner à l’objectif de cet accord permettant à Atout France « de renforcer sa connaissance de l’activité hôtelière en France » et pour le Groupe Accord, devenir un interlocuteur privilégié (source : L’hôtellerie restauration), alors que l’une des missions d’Atout France et de « fournir une expertise à l’État, aux collectivités territoriales et aux partenaires privés ou associatifs membres du groupement, pour la définition et la mise en œuvre de leur politique touristique, concevoir et développer leurs projets, les conseiller en matière de formation, de recherche, d’innovation et de développement durable dans le secteur du tourisme et exporter son savoir-faire à l’international » (article L.141-2, al. 3 du code du tourisme). Les rôles s’inverseraient-ils ?
Après la simplification, puis la modernisation des textes afférents au tourisme, il serait temps de les clarifier et de les harmoniser (les paroles aux actes aussi), permettant une réelle cohésion à la fois entre les différents échelons territoriaux mais également avec tous les acteurs du tourisme. Et même si « l’excellence » de certains établissements ou certaines stations classées de tourisme doivent permettre une image forte de la France, il n’existe aucun intérêt à délaisser les autres acteurs. La quantité et la qualité ne sont pas incompatibles et soyons réalistes, il n’est pas possible pour tous d’accéder à cette « excellence », que l’on soit professionnel ou non professionnel ou simplement client et même si cela doit rester un objectif … ou un espoir pour tous !
Arrêtons de faire subir des « secousses » législatives et règlementaires qui découragent et fragilisent…. Affaires à suivre…
(1) Assemblée Nationale : Rapport n°3805 annexe n°18 (voir dernier paragraphe du n°23)
(2) Assemblée Nationale : Rapport n°3772
(3) Assemblée Nationale : Projet de loi adopté n°757
(4) Assemblée Nationale : Rapport n°3226 – juillet 2001