Lorsqu’une entreprise entre en procédure de redressement judiciaire, s’ouvre une période d’observation de 6 mois, renouvelable 1 fois, et, exceptionnellement, 6 mois de plus, mais dans cette dernière hypothèse, seulement à la demande du ministère public.
Cette période est celle qui doit permettre au dirigeant, assisté par l’administrateur judiciaire, de restructurer son entreprise en vue de présenter au tribunal un plan de continuation, voire un plan de cession.
La loi prévoit, cependant, que pendant cette période, et à tout moment, l’administrateur judiciaire peut saisir le tribunal pour demander la liquidation judiciaire s’il considère que la situation de la société n’est plus viable.
Sur ce point, le dirigeant peut avoir une divergence d’analyse avec l’administrateur judiciaire, mais tout peut aller très vite, car l’administrateur a la maitrise de la saisine du tribunal.
Lorsque, sur proposition de l’administrateur et malgré l’opposition du dirigeant, le tribunal prononce la liquidation judiciaire, tout n’est pas perdu pour ce dernier.
L’appel de ce jugement lui est ouvert.
Le Jugement de liquidation judiciaire bénéfice, cependant, de l’exécution provisoire de droit en application de l’article R661-1 du Code de commerce, ce qui signifie que l’appel n’est pas suspensif.
L’appel du jugement de liquidation judiciaire doit donc s’accompagner d’une assignation des organes de la procédure en référé devant le Premier Président de la Cour d’appel qui a le pouvoir d’arrêté l’exécution provisoire et, dans ce cas, de maintenir l’entreprise en période d’observation le temps de la procédure devant la cour d’appel.
En application de l’article susvisé, le seul critère que doit retenir le Premier Président pour suspendre l’exécution provisoire est la démonstration que « les moyens à l’appui de l’appel paraissent sérieux ».
La formulation est volontairement vague, mais ces « moyens sérieux » sont analysés par la Cour, non pas à la date à laquelle la liquidation judiciaire a été prononcée par le tribunal, mais au moment où le Premier Président statue.
Il peut donc se passer 1 à 2 mois entre ces deux périodes.
Dans l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance rendue le 13 mars 2024 par le Premier Président de la Cour d’appel de Montpellier, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire d’une société à la demande de l’administrateur et contre le souhait du dirigeant qui attendait des encaissements importants qui n’avaient pas pu avoir lieu au moment où le tribunal de commerce a statué, c’est-à-dire le 17 janvier 2024.
Ces encaissements sont arrivés dans les jours suivants.
De plus, après le prononcé de la liquidation judiciaire, la société a réduit ses coûts en licenciant une partie de son personnel.
Bien que ces événements soient postérieurs au prononcé de liquidation judiciaire, le Premier Président les a pris en considération pour considérer qu’il existait des moyens sérieux de réformation, et a donc ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire, malgré l’avis négatif du parquet général et l’opposition des organes de la procédure [1].
Cette décision va donc permettre à la société de présenter un plan de redressement puisqu’en application de l’article L661-9 du Code de commerce :
« En cas d’appel du jugement statuant sur la liquidation judiciaire…… et lorsque l’exécution provisoire est arrêtée, la période d’observation est prolongée jusqu’à l’arrêt de la cour d’appel ».
Depuis le prononcé de l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement de liquidation judiciaire, l’entreprise est donc, de nouveau en période d’observation jusqu’à ce que la Cour statue sur l’appel de ce jugement.
Elle doit donc mettre à profit cette période avec l’administrateur judiciaire pour élaborer son plan de continuation, étant précisé que la Cour d’appel statuant sur la confirmation ou la réformation du jugement de liquidation judiciaire le fait, au regard de la situation de la société au moment où elle statue, et non au moment où la société a été mise en liquidation judiciaire par le tribunal. [2]
Enfin, il sera rappelé que lorsque la Cour infirme le jugement de liquidation judiciaire, elle peut renvoyer le dossier au tribunal pour l’adoption éventuel d’un plan et décider d’une nouvelle période d’observations de maximum 3 mois [3].