Un nouvelle structure apparait désormais dans le paysage administratif judiciaire. Un décret n° 2023-579 du 7 juillet 2023, publié au Journal Officiel du dimanche 9 juillet 2023, crée des groupes locaux de traitement de la délinquance.
Ce texte précise les missions et la composition des groupes locaux de traitement de la délinquance, conformément à l’article L132-10-2 du Code de la sécurité intérieure créé par l’article 74 de la loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés, lequel pour rappel dispose :
« Lorsque, en application de l’article L132-4, un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance est mis en place, le procureur de la République ou son représentant peut créer et présider un ou plusieurs groupes locaux de traitement de la délinquance. Les missions et la composition de ces groupes sont précisées par décret ».
Il convient de rappeler que le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance constitue en application de l’article D132-7 du Code de la sécurité intérieure le cadre de concertation sur les priorités de la lutte contre l’insécurité et de la prévention de la délinquance dans la commune. Il vise à favoriser l’échange d’informations entre les responsables des institutions et organismes publics et privés concernés et peut définir des objectifs communs pour la préservation de la sécurité et de la tranquillité publiques. Il assure l’animation et le suivi du contrat local de sécurité lorsque le maire et le préfet de département, après consultation du procureur de la République et avis du conseil, ont estimé que l’intensité des problèmes de délinquance sur le territoire de la commune justifiait sa conclusion. Il est consulté sur la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des actions de prévention de la délinquance prévues dans le cadre de la contractualisation entre l’Etat et les collectivités territoriales en matière de politique de la ville définie à l’article 1er de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.
En application des dispositions de l’article D132-8 du Code de la sécurité intérieure, il est présidé par le maire ou son représentant. Il comprend le préfet de département, le procureur de la République ou leurs représentants, le président du conseil départemental ou son représentant, des représentants des services de l’Etat désignés par le préfet de département, le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, compétent en matière de dispositifs locaux de prévention de la délinquance et auquel la commune appartient ou son représentant et des représentants d’associations, établissements ou organismes œuvrant notamment dans les domaines de la prévention, de la sécurité, de l’aide aux victimes, du logement, des transports collectifs, de l’action sociale ou des activités économiques, désignés par le président du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance après accord des responsables des organismes dont ils relèvent. En tant que de besoin et selon les particularités locales, des maires des communes et des présidents des établissements publics de coopération intercommunale intéressés ainsi que des personnes qualifiées peuvent être associés aux travaux du conseil. La composition de ce conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance est fixée par arrêté du maire.
Il convient de préciser que la loi n° 2014-896 du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales confère au maire un rôle singulier dans le traitement des questions relatives à l’exécution des peines et à la prévention de la récidive, devenant le pilote communal de la politique locale de prévention de la délinquance.
Il convient de rappeler que le maire exercice des pouvoirs de trois ordres :
En premier lieu, au titre de son pouvoir de police générale, qui a pour objet l’exécution des lois et des règlements ainsi que des mesures de sûreté générales, agissant à ce titre en tant qu’agent d’Etat, sous l’autorité du préfet qui peut se substituer à lui.
En deuxième lieu, au titre de ses pouvoirs de polices spéciales, dont celle de la police municipale ayant pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique.
En troisième lieu, au titre de ses attributions d’officier de police judiciaire et d’officier d’état civil, exercés sous la surveillance du procureur de la République.
Il en résulte que l’exécutif communal est par définition au sein de sa commune le garant de la tranquillité publique dans le cadre de ses prérogatives détenues en matière de police administrative générale et spéciale.
Pourtant le décret du 7 juillet 2023 a une conception très judiciaire et fermée du groupe local de traitement de la délinquance.
Composé de quatre articles dont deux sont essentiels, l’article 1er se rapporte aux modalités de création du groupe local de traitement de la délinquance.
Elles sont très souples et laissent une très grande et large latitude aux chefs des parquets près des tribunaux judiciaires.
Lorsque le procureur de la République estime nécessaire en raison du nombre ou de la nature des infractions commises dans tout ou partie de son ressort, il peut créer un ou plusieurs groupes locaux de traitement de la délinquance pour une durée et dans un périmètre qu’il détermine.
C’est donc le procureur qui apprécie seul au regard d’un critère alternatif (nombre d’infractions ou nature des infractions commises dans tout ou partie de son ressort) la nécessité de créer le groupe local de traitement de la délinquance.
Il présidé par le procureur de la République et est composé des services de police judiciaire.
Cependant, le procureur de la République peut toute inviter toute autre personne dont la participation lui parait utile en tenant compte de la nature des infractions et du périmètre géographique concerné.
Ce groupe a été pensé pour être un nouvel outil de travail entre le procureur et les services judiciaires stricto sensu fonctionnant en circuit fermé, dans une optique d’efficacité et de limiter certainement la circulation d’informations et des risques de fuites.
Cependant, nous imaginons mal que le chef du parquet n’invitât pas, dans certaines situations, les élus locaux, dont les maires qui sont des acteurs de proximité dans la lutte de prévention de la délinquance.
Le secrétariat du groupe local de traitement de la délinquance est assuré par les services du parquet.
L’article 2 du décret du 7 juillet 2023 a trait aux missions assignées au groupe local de traitement de la délinquance qui a notamment pour mission :
1° De déterminer les actions coordonnées à mettre en œuvre pour lutter contre les infractions ayant motivé sa création et favoriser leur prévention ;
2° De déterminer les moyens à mettre en œuvre pour le traitement des procédures judiciaires ;
3° De veiller aux échanges d’informations entre les services de police judiciaire concernés ;
4° De constituer un cadre privilégié dans lequel le procureur de la République expose la politique pénale et communique ses instructions dans le cadre de sa mission de direction de la police judiciaire ;
5° De réaliser un bilan des actions menées et en assurer la communication.
S’agissant de matière régalienne, il convient de noter que l’article 3 du décret prévoit que ce texte est applicable directement sur l’ensemble du territoire de la République, cela indépendamment des statuts particuliers de certaines collectivités d’outre-mer lato sensu.
S’appliquant de la date d’applicabilité, il est indiqué que les dispositions du décret du 7 juillet 2023 entrent en vigueur à compter du lundi 10 juillet 2023.