Le nouveau décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 (JORF n°0304 du 31 décembre 2023) entre en vigueur le 1ᵉʳ septembre 2024. Il est applicable aux instances d’appel et aux instances consécutives à un renvoi après cassation introduites à compter de cette date.
Il ne s’agit en aucun cas de mesures coercitives mais bien uniquement incitatives dans le but de renforcer le rôle de l’auxiliaire de justice de l’avocat.
Ainsi, avocats et magistrats pourront ensemble élaborer l’oeuvre de justice à laquelle ils aspirent.
Suivre les notions de base et les recommandations de ce guide, c’est aussi éviter les risques de responsabilité professionnelle.
I - La présentation générale des écritures en appel.
Le décret n°2023-1391 du 29 décembre 223 portant simplification de la procédure d’appel en matière civile qui a été publié au Journal officiel du dimanche 31 décembre 2023 a procédé à un « toilettage » de l’article 954 du Code de Procédure civile.
Le second alinéa dispose désormais que : « les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens et un dispositif dans lequel l’appelant indique s’il demande l’annulation ou l’infirmation du jugement et énonce, s’il conclut à l’infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués, et dans lequel l’ensemble des parties récapitule leurs prétentions ».
L’article 954 du Code de Procédure Civile pose donc par écrit :
L’exigence jurisprudentielle de demander l’annulation ou l’infirmation dans le dispositif des conclusions d’appelant.
L’obligation d’énoncer les chefs du dispositif du jugement critiqué dans le dispositif des conclusions d’appelant et d’appelant incident.
Attention ! Mécaniquement, une lecture croisée des nouveaux articles 915-2 et 954 du Code de Procédure Civile permettrait de déduire que si l’appelant n’a pas énoncé les chefs du dispositif du jugement critiqués dans ses premières conclusions d’appelant, c’est qu’il les a retranchés !
L’article 954 définit ce que doit être le contenu des conclusions soumises à la Cour d’appel et différencie d’une part les prétentions et, d’autre part, les moyens de fait et de droit.
Les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation.
Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.
La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.
La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
L’article 961 (modifié par décret n°2017-891 du 6 mai 2017) précise que les conclusions des parties sont signées par leur avocat et notifiées dans la ferme des notifications entre avocats. Elles ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées 8 l’alinéa 2 de l’article précédent n’ont pas été fournies. Cette fin de non-recevoir peut ère régularisée jusqu’au jour du prononcé de la clôture ou, en l’absence de mise en état, jusqu’à l’ouverture des débats.
La communication des pièces produites est valablement attestée par la signature de l’avocat destinataire apposée sur le bordereau établi par l’avocat qui procède à la communication.
II - Les mesures suivantes sont recommandées.
Afin d’harmoniser la présentation des écritures, faciliter leur lisibilité et permettre une appréhension plus rapide et plus claire, les mesures suivantes sont recommandées :
1° - Identification complète des parties au litige.
L’identification des parties doit être précise et complète et comporter :
pour les personnes physiques : prénom, nom de famille (et le cas échéant d’usage ou d’épouse), date et lieu de naissance, domicile, le cas échéant la nature de la mesure de protection (sauvegarde de justice, curatelle simple ou renforcée, tutelle), son étendue (biens et/ou personne) et le visa de la décision correspondante, nationalité (notamment en matière de droit des personnes) ;
pour les personnes morales : le nom et la forme sociale, la mention de la qualité de son représentant légal, l’adresse du siège social, le cas échéant l’existence d’une sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaires avec indication de la décision correspondante et de l’identité et la qualité des organes de la procédure collective désignés par celle-ci ;
les noms, adresses et barreaux d’appartenance de l’avocat plaidant et de l’avocat postulant ;
le cas échéant l’indication de la date et de la teneur de la décision du bureau d’aide juridictionnelle ou la date du dépôt de la demande d’aide juridictionnelle.
2° - Intitulé précis des conclusions.
Les écritures doivent comporter :
la mention du numéro de RG du dossier concerné ;
la désignation du magistrat ou de la juridiction saisie (Cour, conseiller de la mise en état, président...) ;
un titre indiquant leur qualification (conclusions, conclusions d’incident, conclusions d’intervention volontaire...) ;
une numérotation chronologique en cas de jeux successifs (ex. conclusions récapitulatives n° 2) ;
l’indication par l’intimé de l’existence d’un appel incident ou non (ex : conclusions d’intimé AVEC ou SANS appel incident) ;
Il est rappelé que le désistement d’appel, qui emporte acquiescement au jugement, doit nécessairement prendre la forme de conclusions saisissant le conseiller de la mise en état (ou le président de la chambre dans les procédures sans mise en état) et que les saisines aux fins de constat d’un désistement d’appel par courrier sont irrégulières.
3° - Présentation formelle des conclusions.
Les conclusions doivent être rédigées avec la même police Times New Roman 12 sur l’intégralité du document, sous format PDF afin de permettre une océrisation et présenter une numérotation systématique de chaque page.
Éviter l’usage du caractère gras dans le corps des écritures.
Dans le même objectif, les écritures devront formaliser par une ligne verticale en marge gauche du document les prétentions, moyens ou développements nouveaux par rapport aux précédents écrits déposés.
Pour chaque prétention doit être indiquée(s), sous forme de visa dans le corps des écritures, la ou les pièce(s) invoquée(s) avec son numéro et un bordereau récapitulatif des pièces doit être annexé à chaque jeu de conclusions (article 954 alinéa 1 du code de procédure civile).
Dans chaque bordereau les pièces nouvellement communiquées devront apparaître en caractère gras.
4° - Rédaction du dispositif des conclusions.
L’article 954 du code de procédure civile, depuis le décret du 9 décembre 2009, consacre la distinction entre le "dispositif" des conclusions, qui ne doit contenir que les prétentions principales, reconventionnelles et accessoires (le texte précisant que la Cour n’est saisie que par les prétentions énoncées au dispositif) et le corps des conclusions qui doit contenir les prétentions ainsi que les moyens de fait et de droit fondant ces prétentions avec indication de la règle de droit invoquée, fit-elle basique.
Dans un souci de lisibilité, en cohérence avec l’article 954, le dispositif doit donc proscrire la reprise ou la référence aux moyens développés au soutien des prétentions, même de façon synthétique, lesquels auront été présentés et développés dans le corps des écritures.
Le dispositif doit débuter par une formule claire en référence à la décision déférée : (confirmer, infirmer, confirmer en toutes ses dispositions, continuer le jugement déféré sauf en ce qu’il a ...).
Il doit impérativement proscrire :
les "donner acte" (formule dépourvue de toute portée juridique) ;
les "constater" (sauf exception telles que notamment le constat de l’acquisition d’une clause résolutoire ou le constat d’une extinction d’un état d’enclave - art. 685- l du code civil), qui sont en pratique la reprise des moyens développés dans le corps des écritures et qui alourdissent inutilement le dispositif ;
les "rappeler" ;
les formules types telles que "déclarer l’appel recevable" notamment si aucune fin de non recevoir relevant de la compétence de la Cour n’est soulevée, "dire l’appel bien ou mal fondé" (formule redondante avec celle tendant à solliciter l’infirmation ou la confirmation de la décision querellée) ;
les formules antinomiques (ex : "condamner conjointement et solidairement") ;
en cas de demande de confirmation, la reprise des dispositions du dispositif de la décision déférée ;
les demandes de condamnation de la partie adverse à rembourser la somme acquittée à raison de l’exécution provisoire assortissant la décision déférée (l’arrêt infirmatif emportant de plein droit obligation de restitution des sommes versées) ;
les demandes d’exécution provisoire d’un arrêt contradictoire ou réputé contradictoire.
Il est recommandé d’une façon générale de privilégier les écritures concises et structurées et d’y annexer éventuellement un plan, lorsque la complexité du litige nécessite de plus longs développements.
Il est rappelé enfin qu’en application de l’article 912 du code de procédure civile, applicable à la Cour d’appel dans les procédures écrites, les dossiers comprenant les copies de pièces visées dans les conclusions et numérotées dans l’ordre du bordereau récapitulatif doivent être déposées à la cour 15 jours avant la date fixée pour l’audience de plaidoiries avec deux exemplaires des dernières conclusions (les feuilles d’une même pièce devant être agrafées).
Source :
Décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 (JORF n°0304 du 31 décembre 2023) entre en vigueur le 1ᵉʳ septembre 2024.
Discussions en cours :
Bonjour
Je ne suis pas avocat, et je dois répondre en appel de la sécurité sociale suite à une expertise qui m’est favorable.
« ... Dans le même objectif, les écritures devront formaliser par une ligne verticale en marge gauche du document les prétentions, moyens ou développements nouveaux par rapport aux précédents écrits déposés ... »
Dois-je comprendre, que ces nouvelles dispositions semblent ressembler à un tableau ?
Par ailleurs, est-il toujours vrai que les conclusions de L’expert s’impose à la CGSS ?
Dans l’attente de vos lumières
Recevez, mes respectueuses salutations
Bonjour.
Bien que j’apprécie la démarche de "vulgarisation", d’explication, encore faudrait-il que les éléments présentés soient en cohérence avec la source désignée. Or, malgré une lecture attentive de l’article 954 CPC, dont extrait ci-dessous, je ne peux que m’interroger ; aurais-je loupé quelque chose ?
Article 954 CPC : "Les conclusions d’appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée. Elles comprennent en outre l’indication des pièces invoquées. A cet effet, un bordereau récapitulatif leur est annexé. Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance. La partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs".
CQFD !
article très pédagogique - le formalisme en droit français est encore rigide, à quand la simplification des procédures ?