Gabrielle Halpern, philosophe et auteur, a beaucoup travaillé sur ce sujet de l’hybridation [2], qui dépasse largement le sujet présentiel / télétravail, trop simpliste.
Elle détaille la définition : "L’hybridation, c’est mettre ensemble des choses, des métiers, des compétences, des matériaux, des secteurs qui, a priori n’ont pas grand-chose à voir mais qui créent quelque chose de nouveau une fois mis ensemble. S’hybrider, ce n’est ni fusionner, ni coexister sans se voir, ni s’affronter mais c’est se combiner afin de se transformer et de se féconder l’un l’autre sans menacer la singularité de chacun." [3]
On est donc bien plus loin que le seul sujet du moment "distanciel / présentiel", qui n’est qu’une transformation physique de l’organisation du travail.
"Dans l’entreprise, chacun peut l’observer : de nombreux métiers qui fonctionnaient en silo s’entrecroisent (...) Désormais, les périmètres se métamorphosent réciproquement et donnent naissance à de nouvelles compétences, (comme par exemple) entre le directeur financier et le directeur RSE qui s’hybrident sous la pression de l’évaluation extra-financière.
Sur le marché de l’emploi, on le voit dans les offres : les employeurs recherchent des talents avec plusieurs casquettes qui relevaient de métiers distincts jusqu’alors. La combinaison de compétences pointues métamorphose ces métiers et ce n’est que le début…"
Et évidemment on pensera aussi aux soft skills, ces compétences comportementales et non techniques (mais qui s’apprennent aussi !).
C’est aussi un sujet d’imbrication dans un écosystème, les entreprises prennent de plus en plus conscience de leur responsabilité sociale et on assiste bien à une forme d’hybridation entre l’entreprise et la société... qui implique d’autres façons de concevoir le travail et d’être au travail.
Plus que jamais placé au coeur de l’entreprise et des activités, le juriste est la personne idéale pour tenter cette métamorphose et se rapprocher de collaborateurs d’autres directions. Mais évidemment l’hybridation fait peur, particulièrement à ceux qui préfèrent un monde bien étiqueté, prévisible, conforme à une ancienne image. C’est bien normal d’ailleurs, personne n’a appris ce qui nous attend, et si on a une vision d’un métier en s’y formant, force est de constater qu’elle est, en pratique, déjà faussée en 2023 car elle n’intègre pas les changements actuels et futurs [4], même si les formations essaient d’en tenir compte, mais avec de nombreuses incertitudes.
Et pourtant, sans verser dans les théories presqu’apocalyptiques sur l’avenir du travail [5], il y a certainement une certaine gratification à trouver dans un travail coopératif, stimulant, évolutif.
Pour preuve, le grand plaisir qui ressort des témoignages de professionnels du droit "hybridés", des juristes Legaldesigners jusqu’aux moutons à cinq pattes...
Pour autres exemples, le métier de LegalOps ou de responsable de l’innovation en Direction juridique.
S’emparer du potentiel de la technologie, de nouvelles pratiques (le Legal Design par exemple, ou encore la médiation), c’est s’adapter au monde actuel en pleine effervescence et renouveau.
Pour un avocat ou un commissaire de justice, adopter de nouvelles pratiques, de la Legaltech par exemple et côtoyer des développeurs, c’est à coup sûr s’enrichir - avant même que d’enrichir son offre.
Cette hybridation dépasse largement les sujets d’acquisition d’une seule compétence complémentaire (vous vous rappellerez peut-être du "juriste-codeur" par exemple) pour aller vers l’invention d’un nouveau métier, souvent à l’intersection de plusieurs.
Quelle peut être l’incidence de tout cela sur le marché de l’emploi ? Important !
Tant du point de vue des recruteurs, qui ont de nouveaux besoins mais souvent doivent intégrer la formation et l’évolution dans les postes proposés, que du point de vue des candidats, qui ont à la fois de nouvelles envies de carrières mais doivent envisager d’acquérir de nouvelles compétences... Tout le monde doit s’y mettre, évoluer et envisager de remettre en cause les acquis précédents, comme par exemple la "mono-spécialisation" croissante des métiers qui va souvent à l’encontre de l’enrichissement par de nouvelles connaissances et rend difficile le fait de s’ouvrir à d’autres secteurs, d’autres horizons, à des méthodes et dispositifs issus d’autres univers professionnels... ce qui permettrait pourtant d’être plus créatif et innovant.
Au contraire, "demain, on ne parlera plus de “métier”, mais de socle de compétences" [6].
"L’hybridation est un mouvement permanent. On n’arrête jamais de s’hybrider. Pour autant, il ne s’agit pas de s’éparpiller, ni d’empiéter sur le territoire de l’autre, il s’agit tout simplement d’être en mesure de le comprendre et de parler la même langue que lui." [7]
Il y a donc des sujets de sensibilisation, de formation permanente, de méthode de collaboration, de recrutement... et de management, puisque le rôle du manager de l’entreprise est de plus en plus de favoriser les ponts entre différents métiers, aux langages différents.
Un sujet à suivre... Mais dans tous les cas, considérons cette évolution comme une chance, résolument, mais lucidement.
NDLR : Notez que le sujet de l’hybridation est un des thèmes favorisés par le congrès des RDV Transformations du Droit, qui réunit chaque année les acteurs de la transformation - "des" transformations même, à la rencontre de la Legaltech, du Legal Design, de l’évolution de la formation et de nouvelles pratiques dans l’exercice du Droit.
Discussions en cours :
Ne devrait il pas y avoir deduction des indemnités d’occupation par l’époux non propriétaire .
Ce dernier a en effet occupé la maison gratuitement pendant toutes ces années puisqu’il va recevoir une recompense de tout l’argent qu’il a investi.
Il est le grand gagnant, il a vécu gratuitement plusieurs années chez sa femme s’il recoit une récompense. C’est illogique.
Il devrait y avoir le calcul d’un loyer mensuel à deduire de la récompense. Car ailleurs il aurait payé un loyer .
Bonjour
Pourriez-vous s’il vous plaît m’éclairer.
Mon oncle décédé en 1985 possédait un terrain en propre en Corse.
Marié sous le régime de la communauté sans donation au dernier vivant, il a construit une maison sur ce terrain sans recourir à un credit.
A son décès en 1985 les règles applicables en Corse permettant l’indivision, ses héritiers n’ont pas demandé l’ouverture de la succession et ont autorisé son épouse à rester dans la maison.
Son épouse qui est décédée en 2016 a 3 enfants d’un premier lit.
Nous ne sommes pas en conflit.
Doit-il y avoir recompense ?
Si oui Devons-nous calculer la recompense = valeur de l’ensemble - valeur actuelle du terrain ?sachant que mon oncle a construit la maison avec ses économies mais que nous ne pouvons pas le prouver.
Un notaire nous dit qu’il faut appliquer un loyer pour l’occupation de la maison depuis le décès est-ce exact ?
Question subsidiaire comment évaluer le prix d’un terrain en le séparant de l’ensemble ? Est une estimation par notaire ou par agence immobilière ?
je vous remercie par avance pour votre réponse.
Bonjour,
Lors d’une donation de terrains de la mère décédée pour ses 3 enfants, l’un d’entre eux a réglé la totalité de l’indivision car les 2 autres ne pouvaient pas payer. Un chèque au nom de M. et Mme a été fait à ce moment là.....donc un chèque de la communauté.
Une habiation a été construite sur le terrain revenant à Madame.
Au divorce Monsieur a la copie du reçu de ce règlement.
Monsieur a droit a la moitié du prix de la maison mais qu’en est-il pour le terrain appartient-il qu’à Madame puisque c’est la communauté qui a réglé la totalité de la donation pour partage des terrains. Monsieur n’est-il pas de ce fait "propriétaire" par moitié du terrain où se trouve l’habitation ? Madame ne doit-elle pas récompense à cet effet ? Aquel prix doit être évélué le terrain à l’époque c’était un terrain agricole qui valait environ 20 francs du M2 et quel est le recours concernant les 2 autres enfants qui n’ont jamais remboursés leur part...