Le recours à un expert par le CSE.

Par Franck Le Louedec.

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Explorer : # expertise cse # droit du travail # dialogue social # conditions de travail

Le CSE (Comité Social et Économique) peut faire appel à un expert pour l’assister dans le cadre de ses missions légales
Dans les entreprises de 50 salariés et plus, le CSE est un acteur fondamental du dialogue social. Pour éclairer ses travaux et ses avis, il peut, dans certaines circonstances, s’appuyer sur des experts indépendants.
Dans quels cas ? Qui finance l’expertise ? Quelle procédure ?

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Un droit reconnu pour mieux exercer ses missions.

Le recours à un expert par le CSE est un droit reconnu par le Code du travail. L’article L2315-81 dispose que le comité peut se faire assister d’un expert de son choix, rémunéré sur son propre budget, pour préparer ses travaux.

La loi prévoit certaines situations où le CSE peut faire appel à un expert habilité, notamment en matière de santé et de sécurité, dont les honoraires peuvent être pris en charge, en tout ou partie, par l’employeur [1]. Ces situations sont encadrées :

  • Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, qu’il soit ou non lié à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, est constaté dans l’établissement [2] ;
  • En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou de travail [3].

Financement de l’expertise.

Les frais d’expertise sont pris en charge selon le cas [4] :

À 100% par l’employeur lorsqu’il s’agit d’une expertise en lien avec un risque grave (art. L2315-96, 1° c. trav.) ou de certaines consultations obligatoires comme la politique sociale ou les orientations stratégiques [5].

À 80% par l’employeur et 20% par le CSE, sur son budget de fonctionnement, dans les cas tels qu’un projet important modifiant les conditions de travail [6].

Et contrairement à une idée reçue, aucun devis ni appel d’offres n’est requis pour désigner un expert, même dans les structures soumises aux règles des marchés publics [7] Il faut tout de même choisir un expert habilité [8].

L’employeur peut toutefois contester le coût ou la nécessité de l’expertise devant le juge [9].

Une procédure à respecter.

L’expert, une fois désigné par le CSE, doit adresser à l’employeur une demande d’informations complémentaires sous 3 jours [10]. L’employeur a 5 jours pour y répondre.

Dans un délai de 10 jours, l’expert transmet ensuite le coût prévisionnel, la durée et l’étendue de l’expertise [11]. Le CSE peut aussi formaliser un cahier des charges.

En l’absence d’accord spécifique, l’expert remet son rapport 15 jours avant la fin du délai de consultation du CSE [12]. Lorsque la loi ne fixe pas de délai de consultation, le rapport doit être rendu sous 2 mois, renouvelable une fois, avec accord [13].

Un accord collectif ou un simple accord entre l’employeur et le CSE en réunion peut aussi aménager les délais [14].

Contestation par l’employeur.

L’employeur dispose de 10 jours pour contester :

  • La nécessité de l’expertise : à compter de la délibération du CSE ;
  • Le choix de l’expert : à compter de sa désignation ;
  • Le contenu ou le coût prévisionnel : à compter de leur notification ;
  • Le coût final de l’expertise : dès sa communication [15].

Le juge statue en référé, dans un délai de 10 jours, en premier et dernier ressort. La procédure suspend les effets de la décision du CSE ainsi que les délais de consultation, jusqu’au jugement.

En cas d’annulation définitive, l’expert doit rembourser les sommes perçues à l’employeur, sauf si le CSE décide de les prendre à sa charge.

Recours à l’expert et ordre du jour du CSE.

En principe, le CSE ne peut voter une délibération que sur un point inscrit à l’ordre du jour. Toutefois, si l’expertise est liée à un sujet déjà inscrit, elle est considérée comme valable, même sans mention explicite [16].

Le CSE peut recourir à un expert-comptable dans différentes situations : pour les consultations récurrentes sur la situation économique et financière [17], la politique sociale, l’emploi et les conditions de travail [18], les frais sont pris en charge par l’employeur. Il en est de même en cas de licenciement économique avec PSE [19], de projet de fermeture d’un site dans une entreprise d’au moins 1 000 salariés [20], ou pour certaines consultations ponctuelles comme les opérations de concentration ou l’exercice du droit d’alerte économique [21].

En revanche, pour la consultation sur les orientations stratégiques [22], le financement est en principe partagé (80% employeur, 20% CSE), sauf si le budget de fonctionnement est insuffisant et non abondé depuis 3 ans, auquel cas l’employeur assume l’intégralité du coût. Enfin, l’expert peut aussi assister les syndicats dans la négociation d’un accord de performance collective ou d’un PSE [23].

En résumé.

Le recours à l’expertise est un moyen pertinent pour le CSE, lui permettant de remplir pleinement ses missions, notamment de pouvoir rendre des avis éclairés et motivés lors de ses consultations.

Encadré juridiquement, le recours à l’expert reste un levier essentiel du dialogue social que les employeurs et les représentants du personnel doivent bien maîtriser.

Franck Le Louedec
Ancien conseiller prud’homal, consultant

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Notes de l'article:

[1Art. L2315-94 c. trav.

[2Art. L2315-94, 1° c. trav.

[3Art. L2315-94, 2° c. trav.

[4Art. L2315-80 c. trav.

[5Art. L2315-88, L2315-91, L2315-92, 3° c. trav.

[6Art. L2315-87 et L.2315-94, 2° c. trav.

[7Cass. soc. 28 mars 2018, n° 16-29106 ; 4 avril 2018, avis n° 15005 et n° 15006.

[9Art. L2315-86 c. trav.

[10Art. R2315-45 c. trav.

[11Art. L2315-81-1 et R2315-46.

[12Art. L2315-85 c. trav.

[13Art. R2315-47 c. trav.

[14Cass. soc. 8 juillet 2020, n° 19-10987.

[15Art. L2315-86, R2315-49, R2315-50 c. trav.

[16Cass. soc. 19 nov. 2014, n° 13-21.523 ; 27 mai 2021, n° 12-24.344.

[17Art. L2315-88 c. trav.

[18Art. L2315-91 c. trav.

[19Art. L1233-34 et L2315-92, I c. trav.

[20Art. L1233-57-17 c. trav.

[21Art. L2315-92, I c. trav.

[22Art. L2315-87 c. trav.

[23Art. L2315-92, II c. trav.

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