Dans le présent article [1], nous traitons les aspects légaux liés à l’arrêté des comptes et leurs approbations. Les opérations comptables relatives à la clôture des comptes ne feront pas l’objet de traitement sauf si le contexte l’exige.
La clôture comptable est une période très particulière compte tenu des contraintes liées au timing de sa réalisation ainsi qu’à la nature des opérations devront être réalisées. Cette période est appelée aussi par abus de langage « période fiscale », cette dernière qualification est due au fait que pour beaucoup d’opérateurs la fonction de la comptabilité est limitée au calcul et détermination du résultat fiscal.
La date de la clôture des comptes est différente de celle d’arrêté des comptes.
Certes, la plupart des opérations réalisées en cette période sont récurrentes mais ne font jamais le quotidien du personnel comptable, mieux encore certaines opérations liées à la clôture sont ponctuelles et en conséquence elles sont source d’erreurs dont les conséquences sont graves.
Nous pensons que toutes les opérations comptables traduisant une décision de l’assemblée des actionnaires, constituent une source de difficulté de traitement comptable ou fiscal ou les deux à la fois.
Nous citons à titre d’exemple les opérations sur le capital ou le résultat telle que l’augmentation, ou la réduction de capital social ; l’amortissement du capital ou l’annulation d’actions, souscription au capital avec libération partielle. Certes le traitement comptable devrait être réalisé à la date de l’assemblée qui a décidé cette opération, mais l’inventaire prévu à l’article 5 de la loi 9/88 relative aux obligations comptables, impose la revue de ces postes à la date de clôture tant par le commissaire aux comptes [2] que l’expert-comptable s’il en existe.
L’article 5 de la loi 9/88 relative aux obligations comptables des commerçants ne prévoit pas de sanctions pénales pour les dirigeants, mais l’article 386 de la loi 17/95 relative à la société anonyme prévoit une amende pénale allant jusqu’à 200 000,00 dirhams à l’encontre des dirigeants.
La clôture est une étape cruciale dans le processus d’arrêté des comptes par les dirigeants en vue de les proposer à l’approbation de l’organe compétent.
A la différence de la date de clôture qui est fixée par les statuts, la date d’arrêté des comptes est fixée librement par l’organe compétent pour l’arrêté des comptes. Nuance faite pour les délais nécessaires pour la convocation de l’assemblée générale statuant sur l’approbation des comptes, ainsi que le délai légal pour la mise à disposition des documents prévus à l’article 141 de la loi sur la SA.
En effet, la liberté de fixation de la date d’arrêté des comptes doit être laisser le temps nécessaire au commissaire aux pour la réalisation de sa mission et à la mise à disposition aux actionnaires des documents dans les délais légaux, et pour ce pour éviter la demande du report de l’assemblée par voie de référé, pour éviter tout recours en annulation des décisions prises par l’assemblée
Cette liberté du choix de la date d’arrêté pourrait aussi poser des problèmes pour la détermination des événements post clôture [3] dont le traitement par le commissaire aux comptes varie en fonction de leurs avènements par rapport à la date d’arrêté des comptes.
Nous signalons au passage que la clôture des comptes est une opération technique qui permet de s’assurer que toutes les écritures comptables dites d’inventaires ont été effectuées à la bonne date, et ce dans le but de produire des états de synthèses qui donnent une image fidèle conformément aux disposition du code général de normalisation comptable.
A la différence de la clôture des comptes qui est une opération purement technique, sous la responsabilité du chef d’entreprise, confiée généralement au personnel comptable de la société, éventuellement avec l’assistance d’un expert-comptable. L’’arrêté des comptes, qui est un acte juridique incombant à l’organe collégial (directoire ou conseil d’administration suivant les cas pour la société anonyme), il marque le transfert de la responsabilité du contenu des comptes, au moins partiellement, de la direction exécutive vers le collège des administrateurs, d’où la nécessité pour le conseil de constituer des comités ad hoc en vue de lui rendre compte avant de statuer sur l’arrêté des comptes.
En effet, le législateur Marocain accorde une importance majeure à l’acte d’arrêté des comptes en insistant que le commissaire aux comptes doit être convoqué obligatoirement à la réunion de l’organe compétent pour l’arrêté des comptes. Article 171 de la loi 17/95 telle qu’elle a complétée ou modifiée.
Cet acte rend les comptes figés et définitifs en vue de leurs certification par le commissaire aux comptes, et en conséquence toute modification des comptes à l’initiative de la direction de la société ou du commissaire aux comptes doit faire l’objet d’un nouveau arrêté par le conseil d’administration ou du directoire et ce dans les conditions et formes prévues par la loi.
Par ailleurs, nous précisons que le même conseil d’administration procède à « l’approbation » du rapport de gestion, fixe la date de l’assemblée des actionnaires et arrête le projet des résolutions à soumettre à son approbation, autorise le cas échéants les conventions soumises à cette formalité. Le même conseil doit vérifier les mandats des administrateurs ainsi que celui du commissaire aux comptes en vue de proposer leur renouvellement ou révocation.
La clôture des comptes vise la production d’états comptables conformes à la réglementation et donnant une image fidèle, et l’arrêté des comptes confirme cette présomption
Le législateur Marocain accorde une grande importance à l’acte d’arrêter les comptes, En effet les établissements publics soumis à l’obligation de publier des comptes au bulletin officiels, indiquent aux lecteurs de ces états s’ils ont été arrêtés ou non par l’organe compétent ou non.
Pour les sociétés de droit privé, La simple présentation des comptes arrêtés aux actionnaires en vue de leur approbation constitue une publication des comptes, crée en conséquence des effets juridiques, notamment la présentation des états de synthèse ne donnant pas une image fidèle, la poursuite d’activité déficitaire, la distribution de dividende fictifs …
En fin, nous signalons que les arrêtés de comptes de cette année doivent tenir compte de plusieurs facteurs externes tels que le risque d’inflation, de change, de continuité d’exploitation pour les sociétés dont les partenaires sont situés dans des zones de conflit ou sous embargo.
Dans ce sens, le haut conseil du commissariat aux comptes en France a publié un communiqué [4] en date du 2 mars 2022 en vue d’alerter les CAC sur la modification de la légalité de certaines opérations, et en conséquence, nous pensons que les contrôles légaux des filiales des entreprises françaises au Maroc devraient en tenir comptes, abstraction faite du principe de la territorialité.