La libération conditionnelle est une décision juridictionnelle accordant un mode d’aménagement de l’exécution d’une peine privative de liberté.
Elle permet à un condamné ayant purgé une partie de sa peine (appelée "temps d’épreuve") d’être libéré par anticipation sous la condition de respecter certaines obligations pendant le délai de liberté conditionnelle.
Cette possibilité est encadrée par les articles 729 à 733 du Code de procédure pénale.
Cette demande doit respecter des conditions de fond et de forme afin d’être admise par la juridiction compétente (I) qui rendra une décision pouvant être assortie de certaines conditions et/ou mesures (II).
I / La demande de libération conditionnelle.
Afin d’envisager une demande de libération conditionnelle, il est nécessaire de vérifier que les conditions de fond sont réunies (A) avant d’envoyer une requête à la juridiction compétente (B).
A) Le comportement du condamné et la peine.
i) Le comportement.
L’article 729 du Code de procédure pénale dispose que pour prétendre à la libération conditionnelle, le condamné doit présenter des efforts sérieux de réadaptation sociale.
Il doit également justifier :
soit de sa participation essentielle à la vie de famille,
soit de la nécessité de suivre un traitement médical,
soit des efforts pour indemniser les victimes,
soit d’implication dans tout projet sérieux d’insertion ou de réinsertion.
Toutefois, la personne condamnée pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, ne pourra se voir accorder de libération conditionnelle si elle refuse pendant son incarcération de suivre le traitement proposé par le juge de l’application des peines, ou ne s’engage pas à suivre après sa libération, le traitement proposé.
ii) La peine.
Il doit également avoir exécuté une partie de sa peine (appelée « temps d’épreuve »).
Ce temps varie en fonction des distinctions opérées par la loi [1] :
Ce temps est égal à la moitié de la peine prononcée mais ne peut dépasser 15 années ou en cas de récidive légale, 20 années.
Pour les condamnés à perpétuité ce temps est égal à 18 années, ou en cas de récidive légale, 22 années.
Pour les condamnées de plus de 70 ans, ces temps ne sont pas applicables et la libération conditionnelle peut être accordée dès que l’insertion ou la réinsertion du condamné est assurée.
Pour les condamnées ayant bénéficié d’une suspension de peine en raison d’un problème de santé engageant leur pronostic vital, ou pour incompatibilité de leur état de santé avec la détention si un an après cette suspension une nouvelle expertise établie le maintien de cette incompatibilité.
L’article 729 précise que ces dispositions ne sont applicables que sous réserve qu’une peine de sûreté n’a pas été prononcée en vertu de l’article 123-32 du Code pénal.
Par ailleurs, la situation de chaque condamné doit être examinée une fois par an afin de déterminer s’il peut valablement être admis à une libération conditionnelle.
Il s’agit d’un contrôle administratif, s’appuyant sur un fichier tenu dans tous les établissements pénitentiaires.
Le greffe avise en temps utile le condamné lorsqu’il est admissible à la libération conditionnelle [2].
De même, pour chacun des condamnés relevant de l’article 723-19 du Code de procédure pénale, le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation examine en temps utile leur dossier, afin de déterminer notamment, s’ils peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle [3].
B) Les conditions de forme et la procédure.
i) Les conditions de forme.
Les juges ne sont pas tenus de répondre aux requêtes ne respectant pas les conditions de forme prévues par l’article D.49-11 du Code de procédure pénal.
La demande doit être écrite et signée du condamné ou de son avocat. Elle est remise au greffe du juge de l’application des peines contre récépissé ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Si le condamné est détenu, elle peut faire l’objet d’une déclaration auprès du chef de l’établissement pénitentiaire dans les conditions prévues aux deux derniers alinéas de l’article 148-7 du Code de procédure pénale.
Les demandes de libération conditionnelle sont irrecevables lorsqu’elles sont formulées alors qu’il n’a pas encore été statué par la juridiction d’application des peines du premier degré compétente sur une première demande ou que le délai d’irrecevabilité éventuellement arrêté par la chambre de l’application des peines après rejet d’une première demande n’est pas écoulé.
Les juridictions d’application des peines du premier degré peuvent néanmoins s’affranchir de ces irrecevabilités si elles l’estiment opportun [4].
ii) Les règles de compétence.
- La compétence matérielle
Le juge de l’application des peines est compétent pour statuer sur les demandes de libération conditionnelle des condamnés dont la peine privative de liberté prononcée est d’une durée inférieure ou égale à 10 ans ou dont la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à 3 ans, quelle que soit la peine initialement prononcée sauf en cas de compétence exclusive du tribunal de l’application des peines.
Le tribunal de l’application des peines pour examiner les demandes de libération conditionnelle des condamnés dont la peine privative de liberté prononcée est supérieure à 10 ans d’emprisonnement ou perpétuelle ou dont le reliquat est supérieur à 3 ans. Il est également compétent pour statuer sur les demandes des condamnées à des peines plus légères sur renvoi du juge de l’application des peines [5].
Le tribunal de l’application des peines à également compétence exclusive pour statuer sur les demandes des condamnés soit à des peines de réclusion à perpétuité, soit d’emprisonnement ou de réclusion criminelle supérieure à 15 ans pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru, soit d’emprisonnement ou de réclusion criminelle supérieure ou égale à 10 ans pour une infraction mentionnée à l’article 706-53-13 du Code de procédure pénale [6].
- La compétence territoriale
Le juge de l’application des peines territorialement compétent est le juge de la juridiction dans le ressort duquel est situé l’établissement pénitentiaire où est écroué
le condamné.
Si le condamné est libre, le juge de l’application des peines territorialement compétent est le juge de la juridiction dans le ressort duquel est situé la résidence habituelle du condamné. Si le condamné n’a pas de résidence en France, il s’agira du juge de l’application des peines dans le ressort duquel la juridiction de première instance à son siège [7].
II / La décision de libération conditionnelle.
La décision de libération conditionnelle ne fait pas toujours suite à un débat contradictoire et peut comporter un certain nombre d’obligations et mesures (A). Elle est susceptible de recours et de révocation (B).
A) La décision.
La décision statuant sur un placement en liberté conditionnelle est rendue après un débat contradictoire tenu en chambre du conseil. Il s’agit d’une décision motivée.
Toutefois, dans certains cas, la décision peut être prise sans débat contradictoire dans 4 hypothèses [8] :
Lorsque le juge de l’application des peines constate qu’une demande relevant de sa compétence ou de celle du tribunal de l’application des peines, est irrecevable [9].
Lorsque le juge de l’application des peines fait droit à la demande de modification d’un aménagement de peine précédemment accordé [10].
Lorsque le juge de l’application des peines relève, par une décision préparatoire à la décision au fond, un condamné de l’une des interdictions énumérées par l’article 712-22 du Code de procédure pénale, afin de permettre la mise en œuvre de la libération conditionnelle [11].
Lorsque le juge de l’application des peines reçoit l’accord du ministère public et du condamné ou de son avocat [12].
En dehors de ces hypothèses, la décision est prise à l’issue d’un débat contradictoire à l’occasion duquel le condamné peut être assisté d’un avocat.
La libération conditionnelle peut être assortie de conditions ou mesures [13]. Il peut s’agir notamment des obligations du sursis probatoire telles que l’obligation :
De recevoir les visites du travailleur social
De prévenir de ses changements d’emploi ou de résidence
D’exercer une activité professionnelle ou de suivre une formation
De suivre un traitement ou des soins
De réparer le dommage causé
De suivi socio-judiciaire en cas de condamnation pour une infraction pour laquelle il est encouru.
B) La remise en cause de la décision.
Le condamné, son conseil et le ministère public disposent d’un délai de dix jours pour faire appel du jugement [14].
En cas d’appel du condamné, le ministère public dispose d’un délai supplémentaire de cinq jours [15].
Si aucun appel n’est interjeté, la décision pourra toujours être remise en cause plus tard.
En effet, en cas de nouvelle condamnation, d’inconduite notoire, de non-respect des conditions ou mesures prises dans le cadre de la libération conditionnelle, la décision peut être révoquée. La juridiction compétente sera alors la chambre de l’application des peines [16].
Lorsqu’une ordonnance modifie les conditions de la libération conditionnelle, l’appel est porté devant le président de chambre de l’application des peines [17].
Dans l’hypothèse inverse, la libération est définitive et la peine est alors réputée terminée depuis le jour de la libération conditionnelle [18].