Master ? Mastère ? Un établissement peut-il jouer sur les mots ?

Par Rémy Dandan, Avocat.

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L'usage du terme «master» en France est strictement réglementé par le Code de l’éducation. Seuls les établissements accrédités peuvent délivrer ce diplôme. Les «mastères» et «mastères spécialisés» ne sont pas des équivalents reconnus et peuvent induire les étudiants en erreur, entraînant des sanctions pour les établissements.
Description rédigée par l'IA du Village

La confusion nourrie par malice est l’arme de ceux qui redoutent la lumière de la vérité… Hélas, de plus en plus nombreux sont les établissements qui cherchent à faire croire qu’ils délivrent des diplômes académiques, parmi lesquels les « mastères », certainement pour convaincre et rassurer ceux qui ont été déçus par la sélection en première année de master.
Les « mastères » sont-ils des master ?

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Les règles encadrant l’usage du terme « master » en France.

En France, l’utilisation du terme « master » est strictement encadrée par le Code de l’éducation et confère un grade académique officiel de niveau Bac+5.

Selon l’article L731-14 du Code de l’éducation, seuls les établissements accrédités par l’État peuvent délivrer un diplôme avec cette appellation. Les établissements qui délivrent des titres portant le nom de master ou qui décernent des diplômes en référence au grade de master sans avoir été accrédité ou autorisé par l’Etat encourt une peine d’amende pouvant atteindre 30 000 euros.

En effet, cet article L731-14 du Code de l’éducation prévoit que :

« Les établissements d’enseignement supérieur privés ne peuvent en aucun cas prendre le titre d’universités. Les certificats d’études qu’on y juge à propos de décerner aux élèves ne peuvent porter les titres de baccalauréat, de licence ou de doctorat.
Le fait, pour le responsable d’un établissement de donner à celui-ci le titre d’université ou de faire décerner des certificats portant le titre de baccalauréat, de licence ou de doctorat, est puni de 30 000 euros d’amende.
Est puni de la même peine le responsable d’un établissement qui décerne des diplômes portant le nom de master, ou qui décerne des diplômes en référence au grade de master sans avoir été accrédité ou autorisé par l’Etat, dans l’un ou l’autre cas
 ».

Toutefois, plusieurs établissements privés, principalement des écoles de commerce et d’ingénieurs, proposent des formations appelées « mastère » ou « mastère spécialisé ». Ces formations sont souvent créées pour répondre à une demande de spécialisation professionnelle, mais elles ne confèrent pas de grade académique reconnu au même titre qu’un diplôme de master délivré par une université accréditée.

La jurisprudence encadrant l’usage abusif du terme « master ».

Le Conseil d’État a été saisi plusieurs fois pour clarifier les conditions d’usage des titres académiques, notamment en ce qui concerne les diplômes de niveau master. Par exemple, dans un arrêt de 2003 (CE, 11 juin 2003, n°246971), le Conseil d’État a validé l’usage du terme « master » en précisant que, malgré son origine anglaise, il est internationalement reconnu et harmonisé dans l’Union européenne. Cependant, cet usage reste strictement réservé aux diplômes conférant un grade reconnu.

Dans une autre décision (CE, 23 mars 2016, n°393574), le Conseil d’État a réitéré que l’usage du titre de « master » ou « mastère » doit se limiter aux établissements habilités et aux diplômes nationaux répondant aux critères fixés par le Code de l’éducation.

L’absence de reconnaissance académique officielle peut induire une confusion pour les étudiants et est donc passible de sanctions si elle est abusive.

Ainsi, le Conseil d’Etat a récemment confirmé que les étudiants de l’Institut Supérieur du Droit (ISD) ne devait pas se laisser convaincre que les « mastères » proposés permettaient d’acquérir le grade de Master et de passer l’examen d’accès au centre régional de formation professionnelle des avocats CRFPA (CE, 15 octobre 2024, requête n°489074). Pour ce faire, le Conseil d’Etat s’est fondé sur le faible nombre d’universitaires au sein du corps enseignant, sur l’absence d’informations fournies par l’établissement concernant l’insertion professionnelle de ses diplômés, et sur l’absence d’enregistrement de ses « diplômes » au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) qui atteste d’un niveau de qualification officiel.

Le « mastère spécialisé » : un label sans équivalence académique officielle.

Les formations « mastère spécialisé » sont en principe créées par des établissements membres de la Conférence des Grandes Écoles (CGE) pour répondre à des besoins spécifiques du marché du travail. Toutefois, il est essentiel de noter qu’un « mastère spécialisé » ne confère pas de grade académique et ne bénéficie pas de la reconnaissance d’un diplôme de master. La jurisprudence soutient cette distinction, rappelant que ces titres ne doivent pas être présentés comme des équivalents des diplômes universitaires reconnus par l’État.

Conclusion : les précautions à prendre pour choisir une formation intitulée « mastère ».

Pour les étudiants, il est crucial de vérifier si le diplôme proposé est bien un « master » reconnu par l’État ou un « mastère » non accrédité. Le recours à la jurisprudence démontre que les tribunaux sont attentifs aux pratiques pouvant induire les étudiants en erreur et à la protection des titres académiques en France. Les établissements qui utilisent abusivement le terme « master » risquent des sanctions légales. Toute personne ayant des doutes sur la validité d’un diplôme ou les pratiques d’un établissement peut également consulter un avocat spécialisé en droit de l’éducation pour obtenir des conseils et protéger ses intérêts académiques et professionnels.

Rémy Dandan
Avocat au Barreau de Lyon
Enseignant en droit de l’urbanisme
Enseignant en protection des libertés et des droits fondamentaux
https://www.rdavocats.com/

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Discussion en cours :

  • par Benoit , Le 18 novembre 2024 à 16:39

    Attention à la confusion entre Mastère Spécialisé et « mastère ».

    Le Mastère Spécialisé (MS), proposé principalement par des grandes écoles de commerce ou d’ingénieurs, s’adresse généralement à des étudiants déjà diplômés d’un master (Bac+5). Ces programmes sont, dans la majorité des cas, reconnus par le Ministère du Travail comme des titres RNCP (Répertoire National des Certifications Professionnelles) au sens des articles L6113-5 et suivants du Code du travail. Par ailleurs, il s’agit d’un label délivré par la Conférence des Grandes Écoles : seules les grandes écoles membres de la CGE peuvent proposer un MS.

    À noter que ces établissements proposent à la fois des diplômes conférant le grade de master et des MS. La distinction réside principalement dans le profil des étudiants : les formations de type master s’adressent généralement à ceux qui n’ont pas encore obtenu de master, tandis que les MS ciblent des candidats déjà titulaires d’un master, cherchant à se spécialiser davantage.

    Pour les meilleurs MS, notamment ceux en droit et management de l’ESSEC et d’HEC pour ne citer qu’eux, la sélection est extrêmement rigoureuse. Les candidats doivent présenter un dossier académique solide, accompagné d’une expérience professionnelle significative et de lettres de recommandation, et démontrer un potentiel avancé dans leur domaine. Par conséquent, les MS ne sont en aucun cas destinés à remplacer un diplôme de master, mais constituent un complément destiné aux meilleurs profils.

    En revanche, les « mastères » proposés par certains établissements privés, notamment les écoles privées de droit ou autres écoles privées, visent un public totalement différent. Ces formations s’adressent principalement à des étudiants n’ayant pas pu intégrer un master universitaire. Ces mastères servent à combler un parcours interrompu et à fournir une formation complémentaire en vue d’acquérir des compétences ou une certification, mais ne confèrent ni un diplôme reconnu par l’État ni un grade académique officiel.

    Il est donc crucial de faire la distinction entre les MS, proposés par des grandes écoles de renommée nationale et internationale (HEC, ESSEC, Mines Paris, CentraleSupélec, etc.), et les "mastères" des écoles privées de droit. Ces derniers s’adressent principalement à des étudiants n’ayant pas intégré un master universitaire et visent à répondre à leur besoin de formation, mais ils ne bénéficient ni de la reconnaissance académique ni de la même crédibilité professionnelle.

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