La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, dite "loi Badinter", avait pour objectif de permettre une indemnisation facilitée des victimes d’accidents de la circulation en simplifiant leurs recours en réparation.
Ainsi, était considéré comme impliqué tout véhicule terrestre à moteur, en mouvement ou à l’arrêt, qui est intervenu dans l’accident de circulation à quelque titre que ce soit dans sa réalisation, à l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies propres. (Civ. 2ème, 16 mars 1994, Bull. Civ., II, n°90)
L’implication du véhicule dans l’accident pouvait être établie sans qu’il y ait eu un contact direct avec la victime ou que celui-ci soit à l’origine de la réalisation de l’évènement imprévisible et involontaire.
Il n’était donc pas nécessaire qu’un choc entre l’automobile et la victime se soit produit.
Néanmoins, le demandeur à l’indemnisation devait rapporter la preuve que le véhicule à jouer un rôle dans cet accident de la circulation et dans la réalisation de son dommage. (Civ. 2ème, 19 février 1992, Bull. Civ., II, n°25)
Les juridictions ont admis de façon assez large cette notion d’implication du véhicule dans l’accident. Ainsi, la simple projection de gravillon sur un trottoir par un véhicule avait permis de considérer que l’automobile été impliquée dans le dommage d’un piéton chutant ultérieurement au sol. (Civ. 2ème, 10 mai 1991, Bull. Civ., II, n°135)
En cas d’accident complexe, tel plusieurs véhicules qui se percutent les uns à la suite des autres, la jurisprudence, jusqu’à alors, considérait que l’ensemble des intervenants au sein de l’évènement imprévisible et involontaire devaient être considérés comme des automoteurs nécessairement impliqués dans l’accident.
La conséquence de cette présomption d’implication des automobiles dans le cas d’accidents en chaîne était que la victime bénéficiait d’un présumé responsable de son dommage.
Dès lors, le conducteur de l’automoteur, ou son assurance, qui souhaitait s’exonérer de sa responsabilité supportait la charge de la preuve de la non-imputabilité du dommage à son véhicule.
Il lui appartenait de verser aux débats des éléments permettant d’établir que les blessures subies par la victime n’étaient pas dues à la présence de son véhicule sur les lieux de l’accident de circulation.
Il convient de noter que les causes d’exonération de responsabilité possibles divergent selon que le dommage est causé à des biens ou affecte physiquement de la personne victime.
Ainsi, le conducteur automobile avait peu de chance d’échapper à une condamnation.
C’est pourquoi, l’arrêt du 13 décembre 2012 rendu par la deuxième chambre de la Cour de Cassation est intéressant.
Dans cette décision un véhicule conduit par Monsieur X., non assuré, a au cours d’une manœuvre de dépassement, percuté successivement une motocyclette et deux autres automobiles qui circulaient dans la file en sens inverse.
Le choc entre les véhicules a projeté du liquide corrosif sur le capot et la calandre de la voiture de Monsieur H.
Cette projection de fluides n’a cependant occasionné aucun dommage supplémentaire, la voiture conduite par Monsieur H. n’ayant comme « torts » que de se trouver en file indienne des autres automobiles que Monsieur X. souhaitait dépassées.
Cependant, Monsieur H. a été condamné en appel, comme en première instance. La Cour tenant pour acquise son implication dans l’accident mortel pour deux victimes et pour les autres blessés.
La Cour de Cassation par son arrêt sanctionne par une cassation partielle l’analyse des juridictions inférieures et précise la position jurisprudentielle à adopter.
Elle rejette la mise en œuvre de la responsabilité de Monsieur H. dans cet accident de la circulation. La simple présence de l’automobile sur les lieux de l’accident, imprévisible et involontaire, qui n’a entrainé aucun dommage à autrui, n’est pas suffisante pour engager sa responsabilité.
La notion d’implication dans l’accident d’un véhicule se trouve donc limitée dans son champ d’application. En l’absence de contact avec la victime et de contribution de l’automoteur à l’accident, aucune responsabilité ne peut être retenue contre un automobiliste présent sur les lieux.
Voilà de quoi rassurer les conducteurs.