L’histoire : Madame X avait été hospitalisée, le 30 mai 2008, alors qu’elle présentait une pneumopathie abcédée lobaire inférieure droite, et est décédée le 7 juillet 2008. Après avoir sollicité en référé des mesures d’expertise, sa famille a avancé l’existence d’une perte de chance de survie et de guérison de Mme X, consécutive à sa prise en charge avant son hospitalisation. Notamment, la famille a assigné en responsabilité et indemnisation le laboratoire d’analyses de biologie médicale en raison d’une transmission tardive des résultats d’un examen biologique, réalisé le 27 mai 2008.
La question : La notion de perte de chance permet-elle de bénéficier d’une réparation même s’il n’existe qu’une très faible probabilité pour que la personne ait pu bénéficier d’un traitement efficace si le laboratoire avait été diligent ?
Le raisonnement de la cour de la cour d’appel :
La cour d’appel, après avoir relevé que le laboratoire avait manqué à son obligation de diligence dans la transmission des résultats de l’examen biologique mettant en évidence un syndrome inflammatoire important et présentant un caractère alarmant, énonce que l’expert a relevé que le retard dans la prise de connaissance des résultats avait été péjoratif pour la patiente et ne permettait pas d’écarter l’hypothèse d’une perte de chance dans l’évolution fatale de sa maladie.
Cependant, elle note que l’expert ne donne pas d’élément permettant de quantifier la perte de chance de guérison induite par le retard, alors même qu’il retient :
d’une part, que l’anomalie biologique constituée par le taux anormalement élevé de protéine C réactive n’est pas spécifique,
d’autre part, que le début de la pneumopathie est difficile à préciser, et que, même si le laboratoire avait immédiatement transmis les résultats, le 27 mai 2008, ceux-ci ne permettaient pas d’identifier le germe à l’origine de l’infection et nécessitaient de procéder à de plus amples investigations.
Le juge d’appel en déduit qu’il n’existe aucune certitude, ou du moins qu’une très faible probabilité, en l’état de la fulgurance de l’histoire pulmonaire relevée par l’expert liée à la nature du germe mis en évidence, que si les investigations avaient été menées, à compter du 27 mai 2008, elles auraient permis d’identifier le germe dans un délai suffisamment court pour la mise en place d’un traitement efficace, et qu’en conséquence, la perte de chance de guérison en lien avec le retard de transmission des résultats n’est pas caractérisée.
Le raisonnement de la Cour de cassation :
La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel en énonçant que « la perte de chance présente un caractère direct et certain chaque fois qu’est constatée la disparition d’une éventualité favorable, de sorte que sa réparation ne peut être écartée que s’il peut être tenu pour certain que la faute n’a pas eu de conséquence sur l’état de santé du patient ».
La solution : La notion de perte de chance est largement entendue et doit donner lieu à réparation chaque fois qu’il y a disparition d’une éventualité favorable. Une réparation ne peut, a contrario, être refusée que s’il est absolument certain que la faute n’a pas eu de conséquence sur l’état de santé du patient.
Discussion en cours :
Bonjour,
En énonçant que « la perte de chance présente un caractère direct et certain chaque fois qu’est constatée la disparition d’une éventualité favorable, de sorte que sa réparation ne peut être écartée que s’il peut être tenu pour certain que la faute n’a pas eu de conséquence sur l’état de santé du patient »., la Cour fonde son raisonnement sur le seul caractère certain de la perte de chance.
En revanche, il est curieux qu’elle ne traite pas du caractère sérieux de ladite perte de chance qui au dire des conclusions de l’expert ne semblait pas être démontré.
En effet, la perte directe et certaine d’une chance non sérieuse c’est-à-dire qui, en l’absence de fait dommageable, aurait eu trés peu de probabilité de se produire n’était selon la haute Cour pas indemnisable.
Bien cordialement
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