Sur la possibilité de changer d’employeur à tout moment.
Dans son ancienne version, l’article R5221-3 du Code du travail dispose
« L’autorisation de travail peut être constituée par l’un des documents suivants :
1° La carte de résident, délivrée en application de l’article L314-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Elle permet l’exercice de toute activité professionnelle salariée ;
2° La carte de séjour pluriannuelle portant la mention "passeport talent" délivrée en application des 1°, 2°, 3°, 4°, 9° et 10° de l’article L313-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ou le visa de long séjour valant titre de séjour mentionné au 9° de l’article R311-3 du même code.
Elle permet l’exercice de l’activité professionnelle salariée ayant justifié la délivrance du titre de séjour.
Lorsqu’elle est délivrée en application du 1° et du 2° de l’article L313-20, elle autorise à exercer toute activité salariée à l’issue de sa deuxième année de validité sous réserve du respect de ses conditions de délivrance (…) ».
Dans sa nouvelle version, l’article R5221-3 du Code du travail dispose :
« I. L’étranger qui bénéficie de l’autorisation de travail prévue par l’article R5221-1 peut, dans le respect des termes de celle-ci, exercer une activité professionnelle salariée en France lorsqu’il est titulaire de l’un des documents et titres de séjour suivants :
1° La carte de séjour temporaire portant la mention "travailleur temporaire", délivrée en application de l’article L421-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ou le visa de long séjour valant titre de séjour portant la même mention, mentionné au 8° de l’article R431-16 du même code ;
2° La carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention "salarié", délivrée en application de l’article L421-1 ou de l’article L313-17 du même code ou le visa de long séjour valant titre de séjour portant la même mention, mentionné au 7° de l’article R431-16 du même code ;
3° La carte de séjour temporaire "salarié" ou "travailleur temporaire" délivrée en application du 1° de l’article L426-11 du même code ;
4° Le récépissé de renouvellement de titre de séjour portant la mention "autorise son titulaire à travailler" ;
5° La carte de séjour pluriannuelle portant la mention "travailleur saisonnier", délivrée en application de l’article L421-34 du même code.
II. L’étranger titulaire de l’un des documents de séjour suivants doit obtenir une autorisation de travail pour exercer une activité professionnelle salariée en France dans le respect des termes l’autorisation de travail accordée :
1° La carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention "étudiant" ou "étudiant-programme de mobilité", délivrée en application des articles L422-1, L422-2, L422-5, L422-6 et L433-4 du même code ainsi que le visa de long séjour valant titre de séjour portant la mention "étudiant" ou "étudiant-programme de mobilité" mentionné au 13° de l’article R431-16 du même code, pour une activité salariée d’une durée supérieure à 60% de la durée annuelle de travail (964 heures) en lien avec son cursus ;
2° L’attestation délivrée au demandeur d’asile, lorsque les conditions d’accès au marché du travail prévues par les articles L554-1 à L554-4 du même code sont remplies ».
Il résulte des dispositions susmentionnées que le titulaire d’une carte de séjour portant la mention « Passeport talent - Carte bleue européenne » ne pouvait juridiquement envisager de changer d’employeur qu’à l’issue d’une période minimale de 2 ans d’exercice suivant l’obtention de la carte.
Une exception à cette règle était prévue tout de même : c’est l’hypothèse d’une perte involontaire de l’emploi (licenciement par exemple).
Désormais, dès lors que dans le cadre de l’emploi visé les conditions de délivrance de la carte bleue européenne sont également remplies, il est envisageable de changer d’employeur à tout moment pendant la durée de validité de la carte de séjour.
Notons qu’il est possible par ailleurs d’exercer dans un autre domaine au titre du nouvel emploi, sous réserve que les conditions requise pour la délivrance de la carte bleue européenne soient toujours remplies.
Ainsi, il est possible par exemple que le titulaire de la carte bleue européenne soit, dans le cadre de son nouvel emploi, moins bien rémunéré, à condition toutefois que le salaire ne soit pas inférieur au salaire requis pour la délivrance de la carte bleue européenne.
Par ailleurs, force est de constater qu’on en est pas encore à une application harmonisée en la matière. En d’autres termes, si certaines préfectures acceptent désormais le principe du changement d’employeur à tout moment, ce n’est encore pas le cas pour d’autres.
Dans ces conditions, il serait utile, avant d’envisager tout changement d’employeur, de se rapprocher des professionnels pour conseils, afin de prévenir toutes difficultés de procédure administrative.
La carte bleue européenne et l’entreprenariat.
A l’instar d’une activité salariée, l’exercice par un étranger d’une activité non salariée requiert un titre de séjour qui lui donne autorisation à exercer.
La carte bleue européenne délivrée pour l’exercice d’une activité salariée n’est pas de nature à autoriser son titulaire à exercer une activité entrepreneuriale en qualité d’associé gérant ou cogérant par exemple.
En revanche, pour l’exercice en tant qu’entrepreneur, l’étranger peut prétendre au bénéfice d’une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « passeport talent » s’il justifie d’une certaine durée d’expériences professionnelles et/ou de diplômes cohérents avec sa fonction à venir :
« L’étranger ayant obtenu un diplôme équivalent au grade de master ou pouvant attester d’une expérience professionnelle d’au moins cinq ans d’un niveau comparable et qui, justifiant d’un projet économique réel et sérieux, crée une entreprise en France, se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « passeport talent » d’une durée maximale de quatre ans.
Cette carte permet l’exercice d’une activité commerciale en lien avec la création de l’entreprise ayant justifié sa délivrance » [1].
Ainsi, cette carte de séjour ne lui permet d’exercer que l’activité commerciale, artisanale ou industrielle en lien avec la création d’entreprise ayant justifié sa délivrance.
A contrario, cette de séjour ne l’autorise pas à exercice une activité salariée notamment.
Cette carte de séjour, permet-elle d’avoir un double statut de salarié et actionnaire dans la même entreprise ?
Lorsque le titulaire d’une carte bleue européenne qui permet l’exercice d’une activité salariée détient des parts dans une entreprise pour laquelle il travaille, son activité semble probablement relever non pas d’un contrat de gérance mais d’un contrat de travail.
Sur le cumul d’activités.
Le titulaire d’une carte bleue européenne peut en principe cumuler plusieurs emplois dans les conditions de droit commun définies.
En effet, le titulaire de ladite carte est soumis au respect des durées légales maximales de travail prévues : ne pas travailler plus de dix heures par jour et quarante-huit heures par semaine (ou quarante-quatre heures par semaine calculées sur une période de douze semaines consécutives), sous peine de sanctions [2].
Sur le renouvellement de la carte bleue européenne.
La carte bleue européenne est une carte pluriannuelle dont la durée de validité maximale est de 4 ans. La durée de validité de la carte est en principe identique à celle du contrat de travail pour l’exercice duquel elle est délivrée. Il est possible ainsi que la durée de validité de la carte soit inférieure à 4 ans :
« La carte de séjour pluriannuelle portant la mention "passeport talent" prévue aux articles L421-9, L421-10 ou L421-13, la carte de séjour pluriannuelle portant la mention "passeport talent-carte bleue européenne" prévue à l’article L421-11 et la carte de séjour pluriannuelle portant la mention" passeport talent-chercheur" ou "passeport talent-chercheur-programme de mobilité" prévue à l’article L421-14 ont une durée de validité identique à celle du contrat de travail ou de la convention d’accueil présentés à l’appui de la demande de titre de séjour, dans la limite d’une durée de quatre ans » [3].
A l’expiration de la durée de validité de la carte bleue européenne, 3 cas de figure peuvent se présenter :
1er cas : le titulaire de la carte bleue européenne remplit lors de sa demande de renouvellement les critères de délivrance : il a droit au renouvellement de sa carte dans les mêmes conditions.
2ème cas : le titulaire de la carte bleue européenne ne remplit pas les conditions de délivrance :
- A défaut de remplir les conditions de délivrance de la carte bleue européenne, le titulaire remplit toutefois les conditions de délivrance de la carte de séjour portant la mention « salarié » (par exemple, une situation de changement d’emploi avec un nouveau salaire inférieur à salaire requis pour l’obtention de la carte bleue européenne). La carte de séjour portant la mention « salariée » peut lui être ainsi délivrée.
- Le titulaire de la carte de la carte bleue européenne se retrouve involontairement privé d’emploi à l’expiration ou pas de son séjour (licenciement, contrat non renouvelé par exemple) : il a droit au renouvellement de sa carte pour une durée équivalente à la durée d’allocation de ses droits au chômage acquis.
Discussion en cours :
Bonjour,
J’ai beaucoup aimé votre article, un détenteur d’une passport talent portant la mention "Carte bleue européenne" peut-il être associé d’une SARL tout en exerçant son activité de salarié ?
Merci pour votre réponse