Construire dans une commune sans Plan Local d’Urbanisme.

Par Raphaël Balloul, Avocat.

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Explorer : # urbanisme # construction # réglementation

Le Code de l’urbanisme prévoit que dans les communes dépourvues de PLU, de document d’urbanisme pouvant en tenir lieu, ou dont le plan d’occupation des sols (POS) est devenu caduque en l’absence de procédure en cours visant à son élaboration, seul le règlement national d’urbanisme (RNU) trouve vocation à s’appliquer lorsque l’autorité administrative en charge de la délivrance des autorisations d’occupation des sols est saisie de l’analyse d’un projet, qu’il s’agisse d’un permis de construire, d’une déclaration préalable, ou d’un certificat d’urbanisme.

-

Le RNU, codifié aux articles L.111-1 et suivants, prévoit notamment, en application de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme que :
« En l’absence de plan local d’urbanisme, de tout document d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. »

Il résulte de ce texte que les constructions nouvelles ne sont possibles que dans les parties dites « actuellement urbanisées » du territoire de la commune, aucune précision n’étant toutefois apportée sur la manière dont il convient d’apprécier cette notion.

Cette tâche est donc naturellement revenue au juge administratif, au fil des contentieux successifs relatifs aux autorisations d’urbanisme.

A cet égard, on peut déduire de la jurisprudence rendue en la matière que l’analyse dépend d’un faisceau d’indices, parmi lesquels on retrouve, de manière non exhaustive :

  • équipements de la zone en terme de voiries et assainissements, étant précisé qu’il ne s’agit que d’un indice, insuffisant à lui seul pour déterminer le caractère urbanisée d’une parcelle (v. CAA Marseille, 27/11/2003, Cne de Seint-Jeannet, n°00MA02443),
  • proximité d’autres constructions et densité de l’urbanisation (v. CAA Lyon, 29/04/2003, Préfet de la Haute-Savoie, n°98LY02181),
  • caractère naturel de la zone,
  • la proximité d’espaces boisés, etc.

L’autorité compétente doit ainsi tenir compte de ces éléments d’appréciation, en vue de déterminer si le projet se trouve, ou non, en partie actuellement urbanisée de la Commune.

En cas de réponse positive, il convient encore de vérifier que le projet respecte les autres dispositions du règlement national d’urbanisme.

Dans l’hypothèse contraire, le projet peut éventuellement bénéficier des dérogations prévues par l’article L.111-4 du Code de l’urbanisme, qui rend possible, en dehors des parties actuellement urbanisées, les travaux suivants :

  • l’adaptation, extension, la réhabilitation ou changement de destination d’une construction existante,
  • les constructions nécessaires à l’exploitation agricole, sous certaines conditions,
  • les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées,
  • enfin, les constructions présentant un intérêt communal.

Dernière précision, ces règles n’ont pas vocation à s’appliquer aux communes soumises à la loi Montagne, pour lesquelles la loi impose que l’urbanisation soit réalisée en continuité de l’existant (voir en ce sens l’arrêt du Conseil d’État, 16/04/2012, ministre de l’Écologie, de l’Environnement et du Territoire, n°323555), sauf en ce qui concerne les exceptions prévues par l’article L.111-4.

L’appréciation de cette notion correspond, dans les faits, plus ou moins à celle de « partie actuellement urbanisée », se distinguant néanmoins par la nécessité de caractériser un bourg, hameau ou village, ainsi que par une appréciation d’autant plus rigoureuse que les zones de montagne bénéficient d’une protection plus importante.

Toute décision d’octroi ou de refus de permis de construire ou de déclaration préalable, voire de certificat d’urbanisme, fondée sur le motif de localisation en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune du projet est bien évidemment susceptible d’un recours contentieux devant le tribunal administratif, ou d’un recours gracieux devant l’autorité compétente, dans un délai de deux mois à compter de sa notification, ou pour les tiers, des mesures de publicité exigées par le Code de l’urbanisme.

Raphaël Balloul
Avocat au Barreau de Rennes

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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 11 décembre 2017 à 16:43
    par Ppasecrases , Le 8 décembre 2017 à 08:03

    Bonjour,
    Je désire déposer un permis de construire sans passer par ma mairie ( qui me refuse mon Certificat Urbanisme Opérationnel ) où puis-je déposer mon dossier ? je cherche un organisme hiérarchiquement supérieur à la mairie capable de traiter ma demande.
    Merci d’avance de votre aide.

    • par Raphaël BALLOUL , Le 11 décembre 2017 à 16:43

      Bonjour,

      Il n’est pas possible de "contourner" la Commune pour l’instruction d’un permis dès lors qu’elle dispose de la compétence urbanisme (le préfet peut être compétent par exception, mais uniquement dans certains cas particuliers, par exemple en cas d’absence de plan local d’urbanisme).

      Le maire est en effet l’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’occupation des sols.

      Vous pouvez par contre contester l’éventuel décision de refus de permis de construire (ou de CU) dans un délai de deux mois devant le tribunal administratif.

      Bien cordialement,

  • par PETRON Pascal , Le 15 septembre 2016 à 14:11

    D’accord sur l’essentiel mais n’oublions pas l’article R 111-14 qui dispose qu’un "projet" doit être refusé s’il est de nature à favoriser une urbanisation dispersée. Un changement de destination d’agricole en habitation en fait partie par exemple. La Cour d’appel l’a confirmé le 23 mai 2003 dans l’affaire SCI Outreleau/ Xavier A.

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