Thalès condamnée à payer, à un salarié, une provision sur indemnité de non-concurrence.

Par Frédéric Chhum, Avocat

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Explorer : # clause de non-concurrence # indemnité # démission # conseil de prud'hommes

Dans une ordonnance du 4 mars 2011, le Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt fait droit à la demande du salarié en estimant que la rémunération de la clause de non-concurrence lui était due.

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1) Suite à sa démission, le salarié demande le paiement de l’indemnité de non- concurrence

Monsieur X a été engagé par THALES Services (ci-après « THALES ») sous contrat à durée indéterminée, à compter du 27 août 2007, en qualité d’Ingénieur.

Il a notifié sa démission à la société le 23 août 2010 et son contrat de travail a expiré le 23 novembre 2010, à l’issue d’un préavis de trois mois.

Aux termes de son contrat, le salarié était tenu par une clause de non-concurrence qui lui interdisait de :

-  collaborer pour des clients au profit desquels il avait travaillé au cours des douze derniers mois ;

-  débaucher le personnel THALES ainsi que les salariés des clients de THALES.

En contrepartie de cette non-concurrence, Monsieur X percevait une indemnité mensuelle correspondant à 50% de sa rémunération, soit 1.471,30 euros bruts, pendant 12 mois.

THALES pouvait dédire le salarié de son obligation de non-concurrence, dans un délai de 8 jours, à compter de la notification de la rupture de son contrat.

Monsieur X ayant démissionné le 23 août 2010, THALES pouvait le dédire de l’obligation de non-concurrence au plus tard le 31 août 2010. Pourtant, elle n’en a rien fait.

Se rendant compte qu’elle avait laissé passer le délai, THALES a tenté de rattraper son erreur : le 27 septembre 2010, elle a remis au salarié une lettre en main propre, dans laquelle elle affirmait qu’elle lui avait adressé un courrier, le 27 août 2010, le déliant de la non-concurrence.

Pour sa part, Monsieur X considérait que la rémunération de la clause de non-concurrence lui était due puisqu’il n’a jamais reçu de lettre le déliant de la clause dans le délai de dédit de 8 jours.

Le salarié a saisi le Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, en référé, le 22 novembre 2010, en paiement de l’indemnité de non-concurrence.

2) L’ordonnance du Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 4 mars 2011

a) La compétence des référés

Aux termes des articles R. 1455-5, 1455-6 et 1455-7 du code du travail :

« Dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

La formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire. ».

L’indemnité de non-concurrence ayant la nature de salaire, la formation de référé du Conseil de prud’hommes était compétente (Cass.soc. 10/10/2007, 05-45.657).

En l’espèce, la formation de référé du Conseil de prud’hommes a considéré qu’elle était compétente, aux motifs, d’une part, « qu’il y a toujours urgence à faire cesser un manquement à des obligations contractuelles », et d’autre part, que «  le litige porte bien sur l’application d’un article du contrat de travail ».

b) Les référés ordonnent le paiement d’une provision sur l’indemnité de non-concurrence

Dans une ordonnance du 4 mars 2011 (RG : 10/00399), le Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt fait droit à la demande du salarié dans une ordonnance très motivée.

En effet, le Conseil de prud’hommes constate que :

« Monsieur X a signifié à THALES par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2010 sa démission.

THALES dit avoir délié Monsieur X de la clause de non-concurrence par un courrier en date du 27 août 2010.

THALES produit une copie de ce courrier qu’elle aurait remis de nouveau en main propre à Monsieur X le 27 septembre 2010.

Si THALES conteste la demande de Monsieur X, il lui appartenait d’apporter la preuve que Monsieur X avait effectivement été destinataire dudit courrier dans le délai maximum de huit jours prévu au contrat de travail pour le délier de la clause de non- concurrence.

THALES fait observer que Monsieur X lui a remis lors de l’audience de référé une copie du contrat de travail qu’il a conclu avec la société Y à compter du 13 décembre 2010 et que de ce fait, elle n’est pas dans la possibilité de dire si cette société était cliente de THALES.

Pour autant, elle ne dit pas en avoir eu la connaissance auparavant et qu’elle aurait eu un doute sur le lien qui aurait pu lier ces deux sociétés.

De plus, la clause de non-concurrence limite l’interdiction à l’égard de Monsieur X aux seuls clients avec lesquels ce dernier aurait travaillé au cours des 12 derniers mois.

THALES ne soulève aucunement ce moyen.

Le sérieux de cette contestation n’est absolument pas démontré par la société.

Le montant de l’indemnité de non-concurrence que Monsieur X aurait dû percevoir mensuellement, au regard de la rémunération déclarée, est de 1.471,30 euros.

Il a fait une demande à hauteur de 1.488 euros par mois. ».

Cette ordonnance doit être approuvée.

Au final, le Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a ordonné à THALES de payer au salarié :

-  une provision sur indemnité de non-concurrence de 4.464 euros, soit trois mensualités d’un montant de 1.488 euros ;

-  446,40 euros à titre de congés payés afférents ;

-  900 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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