L’abandon de poste : une fausse bonne idée.

Dans le cadre de l’examen du projet de loi de réforme de l’assurance-chômage, les députés de l’Assemblée Nationale ont voté mercredi 5 octobre 2022, deux amendements visant à faire présumer démissionnaire le salarié en abandon de poste.

Actuellement, la situation juridique est différente.

En effet, le salarié souhaitant quitter son emploi et être indemnisé par le Pôle emploi, est tenté, aujourd’hui, en l’absence d’accord de son employeur sur une rupture conventionnelle, de se mettre en abandon de poste (c’est-à-dire être absent sans justifier de son absence).

Effectivement, et en l’état de la jurisprudence actuelle, le salarié en absence injustifiée s’attend et/ou espère alors être licencié par son employeur puisqu’en l’absence de lettre de démission, son employeur va préférer le licencier pour abandon de poste que de prendre le risque de ne rien faire.

En effet, la démission ne se présumant pas, l’employeur du salarié absent sans justificatif va craindre de ne pas procéder au licenciement pour faute grave (c’est-à-dire pour abandon de poste) de son salarié et qu’il lui soit par la suite reproché devant les tribunaux de ne pas avoir dans son dossier de lettre de démission en bonne et due forme ; ce qui permettrait à son salarié de plaider un licenciement verbal c’est à dire abusif et de solliciter des dommages et intérêts.

Le salarié ainsi licencié pour faute grave (suite à son abandon de poste) pourra alors prétendre aux allocations de l’assurance chômage, ce qui n’est pas le cas du salarié démissionnaire.

Néanmoins, ce mécanisme n’est plus sans risque.

Au vu de l’amendement qui vient d’être adopté et en attente de la loi qui risque d’être votée, tout peut laisser penser que les juridictions apprécieront d’un œil très critique le salarié en état d’abandon de poste que son employeur a considéré - même sans un acte clair et non équivoque, à savoir une lettre de démission - démissionnaire.

Dans un souci d’équité et pour éviter tout abus, la seule voie restant ouverte à un salarié voulant quitter son emploi (hors manquements de son employeur) reste de convaincre ce dernier de signer une rupture conventionnelle ou bien de démissionner.

Juliette Pappo, Avocat en droit social,
Barreau de Paris

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