L’audience du procès Judiciaire et l’expert de justice.
Son fond et ses arborescences préalables.
Un procès Judiciaire c’est le recours institutionnel à une Autorité [1] pour mettre fin à un litige, pour sanctionner une infraction, pour réparer des dommages, pour faire œuvre de pédagogie Sociétale.
Loin de la pratique des hypothèses [2], notion renvoyant à l’imagination, l’instruction d’une affaire et son procès ne peuvent se fonder que sur des faits. Ces faits présentent parfois un caractère, scientifique, technique, technico-normatif, qui échappent à la maitrise nécessaire du Juge, des membres du Parquet, des Avocats, des justiciables. C’est en cela qu’il est fait recours à un technicien, pas toujours inscrit sur une liste Officielle de Cour d’Appel ou de la Cour de Cassation, pour apporter son éclairage.
Sans ouvrir une étude développée il est nécessaire de présenter ce qu’est l’Expertise de Justice et l’Expert de Justice pour aborder le fond de notre propos à savoir la place de l’Expert de Justice à l’audience du procès.
L’expertise de Justice :
Cette opération, dénommée « mesure d’instruction », ne peut porter que sur de la science ou de la technique et aucunement en Droit. Il convient toutefois de relativiser ce que l’Union des Compagnies d’Expert près la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence (C.E.C.A.A.P.) intitule dans un article « l’Expert de Justice est interdit de Droit ». En effet, l’Expert se doit de faire respecter le Droit, encadrant son œuvre, dont le principe du « contradictoire » contenant celui « d’égalité des armes [3] ». Il ne peut donc qu’en maîtriser l’application le concernant lui et son œuvre [4]. A cela, s’il ne doit pas porter d’appréciation d’ordre Juridique [5], l’Expert de Justice doit en maîtriser les principales règles pour ne pas se laisser involontairement influencer, manipuler, instrumentaliser et surtout pour faire respecter la réalisation de la mission lui étant confiée. De très nombreux exemples pourraient et mériteraient d’être observés, et débattus, pour en dégager des signaux faibles, voire en produire des suggestions d’application du principe d’amélioration continue. N’en déplaise à Madame la Défenseure des Droits, dans une réponse erronée, ayant été soumise sa signature, l’exploitation par l’Expert de Justice en incendie de la Règlementation de prévention contre ce danger n’est pas une immixtion dans le domaine du Droit.
L’Expertise de Justice n’impose pas d’être « prix Nobel » dans un domaine donné. Elle oblige à être compétent, rigoureux et surtout à respecter, en cette chronologie, le principe des Devoirs qui conduisent à bénéficier de Droits et non l’inverse. Cela ne découle pas d’une illumination de l’auteur mais d’un principe général à dégager de l’article cinq [6] du préambule de la Constitution du vingt-sept octobre mille neuf cent quarante-six.
En toute simplicité, accessible à tous, l’Expertise de Justice est donc une action où le technicien replace les Parties et les membres de l’Institution Justice, dans les conditions initiales de l’affaire à l’instar de ce qu’ils auraient pu l’instruire directement s’ils avaient détenu ses compétences.
Cette action exclut toute application des notions d’affirmation, d’ipsédixitisme ou de sophisme mais le seul recours à l’argumentation, contrôlable et vérifiable, référencée aux règles scientifiques, techniques et normatives techniques s’appliquant en les référençant audites règles de façon contrôlable et vérifiable, des faits. Il s’agit donc d’exprimer le certainement faux ou le probablement vrai, voire l’indéterminé, visant à retenir, ou non, ladite notion de fait aux éléments objectifs ou subjectifs présentés.
Bien que contenu dans les Codes de procédure, l’Expert de Justice n’émet pas d’avis, par définition subjectif et empruntant à sa considération personnelle avec sa culture, à ses croyances, à ses opinions. Il a pour seule mission de confronter les faits avec les règles susvisées et à en argumenter leur adéquation ou non adéquation ainsi que les conséquences en découlant.
L’Expert de Justice produit un éclairage par un prisme, ou par des prismes, à emprunter communément avec l’ensemble des acteurs concernés. De même il n’a nullement à convaincre [7] mais à conduire ses auditeurs, ses lecteurs, à se forger leur propre opinion [8] à partir d’une pensée, d’une visualisation commune produite.
Malheureusement, méprisés institutionnellement par de nombreux de leurs Confrères des autres disciplines, l’exemple de la notion d’Expertise à retenir serait celui des Experts de Justice en Traduction-Interprétariat. Cependant ces derniers pose une définition qui puisse être mal appropriée de leur action en conférant la traduction à l’action de l’oral et l’interprétation à celle de l’écrit. Ces notions de traduction-interprétation, en leur caractère scientifique et technique, s’appliquent aux deux volets de l’expression de l’activité d’Expertise de Justice en Traduction-Interprétariat. Ainsi, en généralisant la méthodologie, le mode de raisonnement, l’Expert de Justice traduit le domaine lui étant soumis d’un langage initialement inaccessible en celui devenant accessible à tous. Il transcrit le « vocabulaire catégorique [9] » s’appliquant aux sciences, au sens qu’en produisait Aristote, en celui de la métaphore mathématique de « Plus Grand Commun Dénominateur [10] » (P.G.C.D.) permettant à chacun d’être à égalité des armes, au hauteur de même compréhension et d’expression d’une pensée à visualiser.
L’Expert de Justice :
Personne n’impose à quiconque de devenir Expert de Justice. Il s’agit d’un acte de volonté personnelle qui renvoie à la notion susvisée de « Devoirs induisant des Droits » et non l’inverse.
Une aparté à l’endroit du domaine de l’Expertise de Justice en incendie. Une grande majorité des techniciens de ce domaine ne détient aucune compétence dans les Règlementations de prévention contre les dangers d’incendie. Cela leur interdit de facto d’argumenter les développements de la combustion, de la propagation de l’incendie et de l’éventuelle aggravation des dommages. Face à certains techniciens de Parties, notoirement éprouvés en ce domaine, où se situe le respect d’égalité des armes qui s’impose à l’Expert de Justice envers les Justiciables ? Comment celui-ci pourra-t-il éventuellement s’opposer à des allégations fausse ou tout simplement produire un arbitrage voire confirmer la réalité des analyses ?
Quelle proportion de mesure d’instruction intègre ce volet de Règlementation pouvant conditionner et tout ou partie la causalité mais peut-être même l’origine ? Quel coût non identifié de tels manquements et in fine d’une telle incompétence ?
A cela il est également à faire connaitre que l’Expertise de Justice en incendie, soit la seule discipline Expertale où il n’y a pas d’enseignement professionnel préalable, ni d’exercice du métier d’incendie puisque celui-ci n’existe pas. La condition de Sapeur-Pompier, d’électricien, d’ingénieur sécurité, de chimiste, ou de toute autre qualification, n’est pas suffisante mais c’est un autre débat.
L’Expert de Justice a donc pour obligation, de nombreux auteurs tel le professeur Alexandre LACASSAGNE [11] au dix-neuvième siècle mais également Maître Henri LECLERC [12] lors de ses procès d’Assises, de décrire, tant factuellement que quantitativement et qualitativement, ce qu’il constate et analyse et ce de façon contrôlable et vérifiable [13].
Consécutivement il doit argumenter, de la même façon contrôlable et vérifiable, référencée aux règles scientifiques, techniques et normative-techniques s’appliquant, la cinétique des faits, leur origine et leur causalité la plus probable. Dans sa Jurisprudence la Cour de Cassation observe périodiquement l’indispensable nécessité du caractère qualitatif et quantitatif, du contenu du rapport Expertal le plus exhaustif possible et notamment dans les descriptions. Elle se prononce sur les obligations d’exhaustivité, de détails, de précisions et d’argumentation référencée. Ce contexte se trouve fréquemment, directement ou indirectement, rejeté par divers acteurs présents en ce qu’il soit mobilisateur de temps et donc inutile n’étant qu’une annexe technique n’emportant pas de notoriété Juridique et dont seule la conclusion suffirait.
Le plus inquiétant, pour le justiciable, est la position du rapport de la commission de réflexion sur l’Expertise [14] de mars deux mil onze. Celui-ci à nouveau n’a comme argument que la notion de coût. Quelle portée donner à cette préconisation de réduction d’amplitude des rapports qui, indirectement, porte atteinte à l’indépendance de l’Expert de Justice. En quoi le Juge, même de Cassation, incompétent dans la science du technicien désigné, peut-il appréhender ce qui est nécessaire du superflu dans la rédaction d’un rapport Expertal ? L’expérience montre que, tant durant une mesure d’instruction qu’à l’audience d’un procès, dans les intérêts Légaux de la défense de son client, au regard de l’Expertise de Justice, mais également dans les procédures d’enquête, ce qui mobilise le plus, et légitimement, l’Avocat ce n’est pas tant ce qui est écrit que ce qui ne l’est pas. Sans verser dans des abus pathologiques les absences de transcription et de précision sont autant d’opportunités, notamment dans un sens positif, dans une défense pour tenter de déstabiliser une accusation mais surtout pour éviter l’aboutissement à une erreur de Justice [15]. Si l’on se réfère à la citation attribuée à Frédéric NIETZSCHE « le diable se cache dans les détail » il est à constater qu’elle soit de très forte présence en de nombreuses procédures Judiciaires, de façon plus « spectaculaire » dans les affaires pénales mais également très présentes dans celles civiles et dont les incidences sont de nature à ne pas être que minimes.
Ce rédactionnel ne peut donc être produit que par l’Expert de Justice lui-même et non, comme trop souvent, par délégation à un secrétariat y compris à partir de notes ou d’enregistrements.
La rédaction d’un rapport constitue la phase d’analyse et de confrontation des faits, avec recul et refus d’acceptation de la séduction du premier choix [16], où il doit être satisfait à l’obligation de réfutation possible [17], conférant le caractère de scientificité aux travaux produits et imposant de devoir penser contre son cerveau [18].
L’expérience Expertale permet d’écrire que de nombreuses missions n’ont trouvé la construction de leur conclusion que dans les dernières pages, voire lignes de rédactionnel issues des réflexions produites telles que susvisées. Il fut même quelques circonstances où ladite conclusion fut inversée, imposant une nouvelle réunion contradictoire, en toute fin de rédactionnel. Cela se manifeste plus particulièrement lors d’instrumentalisation des faits dans un but de fraude.
Ce mode opératoire impose de la rigueur, de la concentration et in fine beaucoup de temps notamment pour ledit rédactionnel. Les formulations qu’un rapport d’Expertise de Justice doive être succinct, synthétique et complet, exhaustif, détaillé et référencé sont antinomiques et ce caractère ne peut être recevable sauf à rompre le caractère de procès équitable.
La lecture d’un rapport d’Expertise, considéré secondaire dans une procédure, impose du temps voire même des observations et de la réflexion. En matière civile le procès, dont l’Expertise de Justice est constitutive, est la chose des Parties. Il appartient donc à celles-ci, en relation avec leur Avocat voire leur technicien, de produire une lecture exhaustive et attentive. Le Juge n’intervient que comme « arbitre » pour constater la régularité de la procédure et des prétentions. Ce rapport, lui est-il indispensable de le lire en intégralité ? L’est-il [19] ? Ne doit-il pas se consacrer, sous réserve d’observations des Parties, qu’à la conclusion générale voire aux résumés des paragraphes si l’architecture du document en comporte à chacun d’eux ? En matière pénale la question n’est pas de nature à se poser mais l’ampleur du document peut éventuellement indisposer voire n’être parcouru que de façon surfacique. Le Magistrat, ou le Juge, a obligation [20] de lire toute pièce versée au dossier tout comme l’Avocat mais également l’Expert de Justice au regard de toutes les pièces lui étant communiquées [21].
Mais ! Mais ce temps coute cher, trop cher, et fait obstacle, notamment en matière pénale, à l’acceptation de devis de la part de certains Parquets mais surtout de la part d’enquêteurs se substituant aux Magistrats pour refuser de leur adresser les devis s’ils dépassent un montant qu’ils considèrent recevable [22]. Procès équitable avez-vous dit ?
Non, il ne faut pas plaindre l’Expert de Justice et en faire une victime qu’il n’est pas. Il ne s’agit pas de faire grief à telle ou telle personne mais au système qui permet ces situations. L’Avocat commis d’office, ou soumis à l’aide Juridictionnelle totale, emporte le même contexte. Il ne faut pas accepter le dossier, dans cette situation, si l’affaire emporte vingt Tomes et comporte six mille côtes. Procès équitable avez-vous dit ?
Observons également, ce qui a été décrié lors du procès d’Outreau, notoirement exploité de façon complotiste et d’intérêt d’opportunité. L’Expert de Justice psychologue, ou l’Expert de Justice en psychiatrie, est libre de son nombre d’entretiens, du temps passé avec la personne à examiner et du choix des outils d’investigation. Par contre ses honoraires sont tarifés. En sortie de Cour d’Assise un Confrère expliquait qu’il considérait devoir se déplacer sur le territoire de la personne à examiner, sauf pour un prévenu incarcéré, et de respecter le temps nécessaire à une complétude d’échanges et d’analyses mais également de rédactionnel d’un rapport compréhensible.
Son rapport ne pouvait se satisfaire, comme il le constate fréquemment, entre deux à quatre pages mobilisant également une durée non négligeable pour être exhaustif, quantitatif et qualitatif mais surtout à être compréhensif pour tous. En ce domaine, si spécifique, une Juridiction, et notamment une Cour d’Assises avec des Jurés, ne peut se satisfaire d’un diagnostic technico-médical et récapitulatif.
Le propos de l’Expert de Justice doit permettre de contribuer au « deuil » à pratiquer pour les victimes et à la compréhension des griefs portés au prévenu dans le cadre de l’acceptation de ses actes, en vue de les reconnaitre, s’ils sont fondés, et de contribuer également à sa réinsertion. Une fois insérée dans la procédure l’Expertise de Justice reste prégnante même si cela ne se manifeste pas de façon « visuelle ». Doit-il être exprimé qu’elle exerce un caractère subliminale ? Elle est diluée dans le dossier, y est totalement, intimement, intégrée comme un catalyseur favorisant la réaction Juridictionnelle sans en modifier les constituants.
Le débat de la charge économique de l’Expertise de Justice n’est pas là, en notre réflexion, mais il sera inévitablement à ouvrir et à régler pour éviter une nouvelle fois de devoir réagir sous le coup de l’émotion, de la pression médiatique et de la rue, voire de celle politicienne et non Politique. Dans ce contexte rénové peut être que la Justice, Institution, bénéficiera d’un « matériau » plus approprié, plus propre au sens d’une filtration des éléments polluants, épuré des scories perturbatrices, de parasites interférant, plus efficace à exploiter pour réaliser son œuvre. Combien de procédures ne supporteraient elles plus de manquements, d’ipsédixitisme, de sophisme, d’opportunité d’une première perception recevable mais erronée ?
Ce coût, tabou d’opportunité pour exclure les manquements, involontaires mais également parfois volontaires [23] , est une ineptie de fond. Cela est possiblement et théoriquement « recevable » lorsque l’on produit une considération simplement budgétaire [24] mais fondamentalement erronée si l’on raisonne économiquement [25] . Quel coût de l’accroissement du temps de procédure, de mobilisation des Magistrats, des Avocats, des procédures d’appel, des pourvois en Cassation et d’éventuels renvois avant peut-être un nouveau pourvoi ? Oui ces procédures sont Légales et de Droit, pour chaque Partie, mais il est certains temps où les motivations [26] de Jugement seraient de nature à pouvoir être dissuasives et ainsi amoindrir la lourdeur de la charge [27] de l’Institution Justice. Il ne semble pas y avoir de difficultés économiques dans les affaires politico-économiques ou impliquant des personnalités de haut rang ayant les moyens financiers appropriés et surtout bénéficiant d’un relationnel pouvant induire des incidences notamment si elles sont produites de façon plus ou moins occultes.
L’audience de Justice et la place de l’Expert de Justice.
D’emblée il est à regretter, là encore pour des motivations fallacieuses de charge de l’Institution Justice et des délais raisonnables à satisfaire, que les audiences de Jugement en matière Civile ont, par principe, été supprimées [28] sauf opposition d’une Partie dont les Conseils oublient fréquemment de leur faire connaître [29] ce contexte qui n’est pas d’ordre public.
Par définition l’audience publique, sauf huis clos légalement opposable, est de production orale et, selon la volonté des Parties, en présentiel. Ce caractère de présentiel devrait être l’objet d’une étude approfondie pour appréhender ses effets potentiels qu’ils soient bénéfiques, négatifs voire sans conséquence.
Cela n’est pas sans incidence sur les notions de « deuil » et de « compréhension » susvisées mais également sur le caractère pédagogique pour les auditeurs présents, s’il y en a, voire par les comptes rendus souvent qualitatifs, notamment en matière pénale, des journalistes locaux. Il peut être regretté que l’action positive des établissements scolaires, à faire suivre des audiences par des élèves, ne soit pas plus coordonnée pour qu’ils puissent percevoir autre chose que le tout début d’une procédure [30] sans présenter un minimum de signification pratique et concrète.
Là encore non par provocation mais par constatations d’intérêt général, il serait particulièrement positif que des Élus, des Autorités, Préfets, Maires, des agents publics [31], de direction ou d’encadrement, aient pour obligation de formation professionnelle de suivre, « périodiquement », des sessions correctionnelles et d’assises. Il est probable que des résorptions de difficultés puissent en découler aisément et conséquemment. De façon fallacieuse, uniquement pour abaisser artificiellement la charge des Juridictions, l’on évoque la notion de Justice prédictive qui ne vise pas à produire une amélioration qualitative. De principe cela ne doit pas être rejeté mais l’exploitation en l’état des mentalités, y compris institutionnelles, laisse à craindre de potentielles dérives dont rien ne garantit qu’elle n’ait pas d’effet catastrophique même s’il n’y en avait qu’un.
Pourquoi ne pas produire, en ce contexte, une étude prédictive des gains de « productivité », au sens noble de l’expression, d’efficacité et inévitablement de coût à intégrer la notion d’impact pédagogique Sociétal qui pourrait réduire, dans le temps, qui n’est pas celui médiatique et politique, ou plus justement politicien, le nombre d’affaires aboutissant dans une Juridiction ?
Il est manifeste que ces acteurs publics percevraient que de nombreuses affaires, portées devant l’Institution Justice, n’y ont pas leur place mais qu’elles relèveraient de la compétence globale de leur administration si la vie Sociétale Institutionnelle ne se limitait pas à couper des rubans tricolores, à paraître populaire en vue des prochaines échéances, à se positionner en vue de possibles promotions.
Ainsi l’Expert de Justice n’a pas à venir reproduire l’ensemble de son travail dans le prétoire d’une Juridiction. Son rôle est de répondre aux éventuelles questions à retenir par la Présidence de ladite Juridiction et surtout à rendre commun et accessible à tous l’éclairage qu’il a produit par son rédactionnel [32].
Cette présence c’est à minima la formalisation du prisme, ou des prismes, utilisés pour produire l’éclairage [33], sans ombre, sans caractère possiblement diaphane et où chacun sera de nature à visualiser la « même chose », la même « pensée », pour en traiter et se forger sa propre opinion. Plus particulièrement, en matière de psychologie et de psychiatrie, cette présence apparaît comme fondamentale et impérative tant pour les victimes que pour les prévenus. Une simple qualification [34], mal perçue [35] alors que notre langue emprunte, plus que toute autre, à la polysémie [36], à la rêverie poétique, elle peut revêtir des conséquences dramatiques que, même le plus performant des Avocats, ne pourra rattraper.
Aujourd’hui, même si le caractère qualitatif du réel présentiel n’est pas satisfait, la visio-conférence permet de résorber une part des contraintes matérielles et surtout d’éviter la seule lecture, par la Présidence de Juridiction, d’un rapport dont le mode opératoire est, in fine, attentatoire à l’égalité des armes qui s’impose également à l’Expert de Justice.
Un témoin qui est entendu, après citation, peut être contraint par la force publique s’il ne satisfait pas à sa convocation. Les citations et significations s’appliquant aux témoins sont des formalités prévues par le Code Pénal. Elles s’appliquent également à l’Expert de Justice mais au seul titre de la pratique. A cela le serment prêté n’est pas le même mais il ne s’agit pas là d’une différence notoire mais plutôt fonctionnelle.
Sauf cas de force majeure pourquoi les dispositions coercitives [37] applicables au témoin, qui lui n’est pas engagé volontairement dans la procédure, ne pourraient-elles être applicables à l’Expert de Justice ? Le propos sera vite décrié comme non-Confraternel. Mais NON, il n’a pas à être considéré de la sorte, il est de responsabilité et d’éthique à observer au regard d’une démarche volontaire qui, pour supporter des Droits, impose préalablement de satisfaire à des Devoirs. L’Expert de Justice ne s’est pas engagé à l’endroit de ses Confrères, et d’une popularité ou notoriété qu’il pourrait en dégager, mais au seul profit des Justiciables et de l’Institution Justice. Personne n’oblige l’Expert de Justice à exercer cette Fonction. C’est une question de respect, d’éthique [38], envers l’Institution mais surtout envers les Justiciables.
Pour autant il faut également que la Société, mais surtout l’administration de la Justice, voire celle de Bercy, reconnaissent les Experts de Justice et les respectent. Il en est de même à l’endroit des Avocats dans les contextes de commission d’office ou d’aide Juridictionnelle totale.
Comme pour tout domaine d’activité, en Justice, il convient de « Penser global pour Agir local [39] » voire même « et inversement ».
La peur de ne plus avoir d’Expert de Justice à disposition, à l’instar de ce qui se produit en psychologie et en psychiatrie [40], n’est pas justifiable mais en l’état recevable et compréhensible. C’est un leurre, du sophisme, de l’instrumentalisation [41] par ceux qui y ont intérêt, alors même qu’il s’agit d’un contexte où la résolution des difficultés est réalisable mais qui impose un fort courage « politique » voire pouvant supporter un caractère de relative impopularité.
L’institution Justice est-elle en soumission aux Experts, sous leur emprise ? La question est posée, se pose et mérite un réel débat transparent, public et sans entre-soi. Revenir, voire même simplement venir, à une normalité, à un équilibre, symbole partiel de la représentation de la Justice, conduira inévitablement à des départs d’Experts de Justice mais probablement aussi à l’arrivée de nombreux autres voire même plus que ceux se désengageant. Et puis il ne faut pas généraliser ce constat négatif, celui de trains qui arrivent en retard, non qualitativement quantifié. Pour autant il faut mettre ces exemples en exergue parce que, s’il faut reconnaître ceux qui arrivent à l’heure, c’est avant tout par les retardataires que l’on identifiera les faits perturbateurs, négatifs, les signaux faibles annonciateurs de dysfonctionnements, et qu’il sera ainsi possible de s’engager dans un réel processus d’amélioration continue.
Alors OUI, au nom du procès équitable et de l’égalité des armes, il est indispensable que l’Expert de Justice soit présent à l’audience, qu’elle soit pénale ou civile, si possible en présentiel, voire par visio-conférence, pour redonner ce que les Pénalistes dénomment comme de « l’humanité » dans le procès y compris dans les affaires les plus sordides, les plus abjectes.
L’Expert de Justice n’est pas un intrus, un corps étranger, encore moins un collaborateur [42], même occasionnel de l’institution Justice. Il est peut-être de tout premier ordre à lui trouver et conférer une véritable identité et définition de celle-ci.
Auteur de :
- « L’incendie de Notre Dame de Paris - Le chemin de la compréhension des faits ou l’œuvre de Sainte Omerta » Edition du Lys Bleu
- Incendies de conduits de cheminée - Devoirs et Droits
- La protection juridique du préventionniste : protection disciplinaire, civile et pénale Éditions du Papyrus.
Contributeur de :
- Ouvrage collectif de : « Recherche des Causes d’incendie Pratiques et Analyses » Éditions du papyrus intégration de la communication lors du Colloque international et du mémoire de Master II.