I. Faits et procédure.
Un salarié, engagé en qualité de représentant, a été licencié pour faute grave, par lettre du 7 février 2019 reçue ultérieurement à un appel de son employeur le même jour, qui l’a informé de ce même licenciement.
C’est pourquoi, le salarié saisit la juridiction prud’homale afin de faire juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, ayant été licencié verbalement le 7 février 2019.
Par un arrêt du 23 novembre 2022, la cour d’appel de Reims fait droit à la demande du salarié au motif que l’appel de l’employeur équivaut à licencier un salarié sans énoncer de motifs, et qu’il ne saurait suppléer la lettre de licenciement adressée ultérieurement, même si elle est adressée le même jour, sous la signature de l’auteur de l’appel téléphonique.
En conséquence, l’employeur se pourvoit en cassation sur le fondement de l’article L1232-6 du Code du travail, selon lequel, « lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception ».
II. Moyens.
En effet, l’employeur demandeur au pourvoi devant la Cour de cassation, fait grief à l’arrêt de la cour d’appel d’avoir dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Ainsi, l’employeur rappelle le principe selon lequel, la rupture du contrat de travail, se situe à la date à laquelle l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin, c’est-à-dire au jour de l’envoi de la lettre recommandée, avec demande d’avis de réception notifiant la rupture.
Dès lors, si un salarié prétend avoir fait l’objet d’un licenciement verbal le jour de l’envoi de la lettre de rupture, il lui incombe, de rapporter la preuve qu’il est intervenu avant l’expédition de cette lettre manifestant la volonté irrévocable de l’employeur de mettre fin au contrat de travail.
Or, l’employeur souligne que non seulement la cour d’appel n’a pas distingué entre l’expédition et la réception de la lettre de licenciement, mais plus encore, n’a pas caractérisé qu’au cours de la journée du 7 février, son appel téléphonique avait précédé l’expédition de la lettre de licenciement.
De plus, outre l’absence de preuve quant à l’heure de l’expédition de la lettre de licenciement et quant à l’appel téléphonique en cause, l’employeur reproche à la cour d’appel de n’avoir à aucun moment, précisé sur quelle pièce elle se fondait pour retenir une telle chronologie, alors même que le salarié, sur qui pesait la charge de la preuve ne versait aux débats, aucun élément afin d’établir celle-ci.
III. Solution.
L’employeur peut-il informer verbalement le salarié de son licenciement par appel téléphonique, le jour même de l’envoi de la lettre de licenciement ?
Les chambres civiles et sociales de la Cour de cassation répondent par la négative sur le fondement de l’article L1232-6 énoncé ci-dessus.
Non seulement la preuve retenue par la cour d’appel n’est pas discutée par la Cour de cassation, mais, il est également constaté que l’appel téléphonique ne peut suppléer la lettre de licenciement adressée ultérieurement, même si elle a été adressée le même jour.
Par conséquent, quand bien même l’employeur jugeait convenable pour la société de prévenir le salarié de son licenciement par téléphone le jour même de l’envoi de la lettre de licenciement, cet appel équivaut à un licenciement verbal dénué de motifs, et donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Cet arrêt, protecteur des salariés, confirme le strict formalisme qui encadre la procédure de licenciement, au-deçà de toute convenance.
Source :