Lanceurs d’alerte : la procédure interne de recueil et de traitement des signalements.

Par Xavier Berjot, Avocat.

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Le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 relatif aux procédures de recueil et de traitement des signalements émis par les lanceurs d’alerte impose, aux entreprises de 50 salariés et plus, de mettre en place une procédure interne de recueil et de traitement des signalements.

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1. Entreprises concernées.

Le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 (ci-après « le Décret ») a été pris en application de la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 (ci-après « la Loi ») visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte (dite « loi Waserman »).

Celle-ci, applicable depuis le 1er septembre 2022, dispose que sont tenues d’établir une procédure interne de recueil et de traitement des signalements les personnes morales de droit privé et les entreprises exploitées en leur nom propre par une ou plusieurs personnes physiques, employant au moins 50 salariés.

Le Décret [1] précise que le seuil de 50 salariés s’apprécie à la clôture de deux exercices consécutifs et que l’effectif se calcule selon les modalités prévues à l’article L130-1 du Code de la sécurité sociale.

2. Support juridique de la procédure de signalement.

Il résulte de l’article 3 du Décret que les employeurs concernés peuvent librement choisir le support juridique d’établissement de leur procédure interne de recueil et de traitement des signalements.

Par exemple, une entreprise pourrait l’établir au sein d’une note de service ou d’un accord collectif conclu selon les modalités de droit commun.

Dans tous les cas, le comité social et économique doit être préalablement informé et consulté, l’article 3 de la Loi imposant la consultation « des instances de dialogue social ».

3. Contenu de la procédure de signalement.

3.1. Le canal de réception des alertes.

La procédure de signalement interne doit instaurer un canal de réception des alertes, celles-ci pouvant être écrites mais aussi orales [2].

Si la procédure prévoit la possibilité d’adresser un signalement par oral, elle précise que ce signalement peut s’effectuer par téléphone ou par tout autre système de messagerie vocale et, sur la demande de l’auteur du signalement et selon son choix, lors d’une visioconférence ou d’une rencontre physique organisée au plus tard 20 jours ouvrés après réception de la demande.

Le canal de réception permet de transmettre tout élément, quel que soit sa forme ou son support, de nature à étayer le signalement de faits relevant du domaine de l’alerte professionnelle qui se sont produits ou sont très susceptibles de se produire dans l’entreprise.

Le lanceur d’alerte doit être informé par écrit de la réception de son alerte dans un délai de 7 jours ouvrés à compter de cette réception.

Enfin, hormis le cas du signalement anonyme, l’employeur doit vérifier que les conditions de l’exercice du droit d’alerte sont réunies : qualité du lanceur d’alerte, objet de l’alerte, bonne foi de l’auteur du signalement, absence de contrepartie à l’alerte, etc.

3.2. Le traitement des alertes.

Lorsque les conditions de l’exercice du droit d’alerte sont remplies, l’employeur doit assurer le traitement du signalement.

Il peut solliciter tout complément d’information auprès de l’auteur du signalement, afin d’évaluer l’exactitude de ses allégations [3].

Lorsque les allégations lui paraissent avérées, l’employeur met en œuvre les moyens à sa disposition pour remédier à l’objet du signalement.

Si les allégations sont inexactes ou que le signalement est devenu sans objet, il procède alors à la clôture du signalement [4].

La procédure de traitement des alertes doit prévoir que :
- L’entreprise communique par écrit à l’auteur du signalement, dans un délai raisonnable n’excédant pas 3 mois à compter de l’accusé de réception du signalement, des informations sur les mesures envisagées ou prises pour évaluer l’exactitude des allégations et, le cas échéant, remédier à l’objet du signalement ainsi que sur les motifs de ces dernières ;
- L’auteur du signalement est informé par écrit de la clôture du dossier.

4. Garanties de la procédure de signalement.

La procédure de signalement interne doit indiquer la ou les personnes ou le ou les services chargés de recueillir et traiter les alertes [5].

Les personnes ou services désignés doivent disposer, par leur positionnement ou leur statut, de la compétence, de l’autorité et des moyens suffisants à l’exercice de leurs missions.

Par ailleurs, la procédure est censée prévoir les garanties permettant l’exercice impartial de ces missions (ex. interdiction de licenciement).

Enfin, la procédure doit garantir l’intégrité et la confidentialité des informations recueillies dans un signalement, notamment l’identité de l’auteur du signalement, des personnes visées par celui-ci et de tout tiers qui y est mentionné.

5. Diffusion de la procédure de signalement.

La procédure doit être diffusée par tout moyen assurant une publicité suffisante, notamment par voie de notification, affichage ou publication, le cas échéant sur le site internet de l’entreprise ou par voie électronique, dans des conditions permettant de la rendre accessible de manière permanente aux personnes concernées.

L’employeur doit également mettre à disposition des informations claires et facilement accessibles concernant les procédures de signalement externe ouvertes aux salariés [6].

En conclusion, précisons que le Décret prévoit la faculté, pour les entreprises de moins de 250 salariés, de mutualiser leur procédure de recueil et de traitement des signalements.

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

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Notes de l'article:

[1Art. 2, I.

[2Art. 4 du Décret.

[3Art. 4 III al. 1 et 2 du Décret.

[4Art. 4, III al. 3 et 5 du Décret.

[5Art. 5 du Décret.

[6Art. 8 du Décret.

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