Les spécificités des procédures préventives et collectives applicables aux professions libérales.

Par Nicolas Milinkiewicz, Avocat.

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Explorer : # procédures collectives # professions libérales # difficultés financières # secret professionnel

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Les spécificités des procédures préventives et collectives applicables aux professions libérales sont présentées dans cet article. Les professionnels libéraux peuvent recourir à une procédure de conciliation ou à une procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire.
Description rédigée par l'IA du Village

Les professions libérales sont des activités exercées à titre habituel, de manière indépendante et sous leur responsabilité, par des personnes qui ont un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Elles regroupent des activités variées dans divers domaines, tel que celui de la santé (médecin, infirmier libéral, dentiste, kinésithérapeute, etc.), juridique (avocat, notaire, commissaire de justice, etc.) ou technique (expert-comptable, architecte, géomètre, etc.).

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Les professionnels libéraux peuvent rencontrer des difficultés financières qui les conduisent à solliciter l’ouverture d’une procédure préventive ou collective. Si les professionnels libéraux étaient exclus des procédures collectives jusqu’à la loi de sauvegarde n° 2005-845 du 26 juillet 2005, ils sont depuis soumis aux dispositions du livre VI du Code de commerce.

Toutefois, les procédures qui leur sont applicables présentent certaines particularités liées à la nature civile de l’activité libérale, imposant la compétence du tribunal judiciaire (sauf hypothèses particulières), et à l’existence d’un ordre professionnel ou d’une autorité compétente.

Tour d’horizon de ces spécificités.

La prévention des difficultés.

Le champ d’application du mandat ad hoc tel qu’issu de l’article L611-3 du Code de commerce vise largement la demande d’un « débiteur ». Ainsi un débiteur exerçant une activité indépendante, y compris une activité libérale réglementée ou une activité agricole, peut y avoir recours. Il n’y a pas ici de spécificité.

Quant à lui, l’article L611-5 du Code de commerce énonce que

« la procédure de conciliation est applicable, dans les mêmes conditions, aux personnes morales de droit privé et aux personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ».

Outre que le président du tribunal judiciaire a ici les mêmes pouvoirs que ceux attribués au président du tribunal de commerce, les règles applicables sont sensiblement les mêmes que celles applicables à une conciliation « classique », à l’exception de deux particularités.

L’ordre professionnel ou à l’autorité compétente est informé de l’ouverture d’une procédure de conciliation [1], et celui-ci ou celle-ci est entendu(e) ou appelé(e), en chambre du conseil, par le tribunal, avant l’homologation de l’accord de conciliation [2].

Les procédures de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire.

Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire, ou dont le titre est protégé, le législateur a pris le parti d’associer l’ordre professionnel ou l’autorité compétente lors de différentes étapes de la procédure sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire

Nous pouvons notamment citer l’intervention de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente dans les cas suivants :

  • Lors de l’ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire : le Code du commerce [3] précise que le tribunal statue après avoir entendu ou dûment appelé, l’ordre professionnel ou l’autorité compétente dont, le cas échéant, relève le professionnel qui a sollicité l’ouverture de la procédure. Des dispositions analogues s’appliquent en cas d’extension d’une procédure collective : si le débiteur soumis à la procédure initiale ou le débiteur visé par l’extension exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, le tribunal statue en chambre du conseil après avoir entendu ou dûment appelé l’ordre ou l’autorité [4].

En outre, dans le cadre de l’établissement de son bilan économique, social et environnemental, l’administrateur consulte ledit ordre professionnel ou ladite autorité compétente [5].

  • Désignation en qualité de contrôleur : l’ordre professionnel ou l’autorité compétente dont, le cas échéant, relève le débiteur est désigné « d’office » contrôleur [6]. Dans ce cas, le juge-commissaire ne peut désigner plus de quatre contrôleurs. La qualité de créancier n’est donc pas exigée pour ce contrôleur. Dans ce cas, l’ordre professionnel ou l’autorité compétente en question fait la déclaration au greffe du nom de la personne qu’il a désignée pour le représenter dans sa fonction de contrôleur. En l’absence de cette déclaration, son représentant légal exerce cette fonction.
  • En cas d’offres de reprise : à titre liminaire, il doit être précisé que l’offre de reprise des activités doit « comporter l’indication de la qualification professionnelle du cessionnaire ». Il est ici à noter qu’une ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008 a supprimé la limitation de l’offre de reprise sur les seuls éléments corporels du professionnel libéral soumis à un statut législatif ou réglementaire.

En outre, l’offre doit être notifiée à l’ordre professionnel ou à l’autorité compétente dont le débiteur relève.

  • Autres prérogatives : l’inventaire est dressé en présence d’un représentant de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente [7]. De même, l’ordre ou l’autorité peut saisir le ministère public pour qu’il soit procédé au remplacement de l’administrateur, de l’expert ou du mandataire judiciaire ou encore pour qu’il soit adjoint un ou plusieurs administrateurs ou mandataires judiciaires à ceux déjà nommés [8].

A côté de ces spécificités liées à la présence d’un ordre, d’autres particularités peuvent être citées. L’article L631-19-1 du Code de commerce prévoit que lorsque le redressement de l’entreprise le requiert, le tribunal, sur la demande du ministère public, peut subordonner l’adoption du plan au remplacement d’un ou plusieurs dirigeants de l’entreprise. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque le débiteur exerce une activité professionnelle libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire.

Enfin, l’interdiction de gérer ne peut pas être prononcée, par le tribunal, à l’encontre d’un entrepreneur exerçant une activité libérale réglementée.

La protection du secret professionnel.

Le secret professionnel est un principe fondamental applicable à bon nombre de professions libérales. Par exemple, l’article 2 du Règlement Intérieur National de la profession d’Avocat précise que

« le secret professionnel de l’avocat est d’ordre public. Il est général, absolu et illimité dans le temps ».

Le respect de ce principe cardinal a pu longtemps plaider pour que les professions libérales ne soient pas soumises aux procédures collectives du Livre VI. Toutefois, le législateur a pris la mesure du risque, en prévoyant certains garde-fous :

  • Le juge-commissaire ne pourra pas ordonner que le liquidateur ou l’administrateur, soit le destinataire du courrier adressé au débiteur. En effet, les dispositions de l’article L641-15 du Code de commerce ne sont pas applicables au débiteur qui exerce une activité pour laquelle il est soumis au secret professionnel.
  • Si l’inventaire est dressé en présence d’un représentant de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente, il ne peut en aucun cas porter atteinte au secret professionnel si le débiteur y est soumis.
  • Enfin, selon l’article L642-23 du même code, la destination des archives du débiteur soumis au secret professionnel est déterminée par le liquidateur en accord avec l’ordre professionnel ou l’autorité compétente dont il relève.

Nicolas Milinkiewicz
Avocat inscrit au Barreau de Montbéliard
https://www.milinkiewicz-avocat.fr/

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Notes de l'article:

[1Article L611-6 du Code de commerce.

[2Article L611-9 du Code de commerce.

[3Article L621-1 du Code de commerce.

[4Article L621-2 du Code de commerce.

[5Article L623-3 du Code de commerce.

[6Article L621-10 du Code de commerce.

[7Article L622-6 du Code de commerce.

[8Article L621-7 du Code de commerce.

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