Il était question de deux salariés qui ont été licenciés pour avoir, entre autres motifs, manqué de loyauté en délivrant une attestation de moralité en faveur d’un mineur, ayant relevé appel d’une condamnation pour des faits de violence commis sur un de leurs collègues, et ce quelques jours avant l’audience d’appel.
Les salariés ont été déboutés en appel de leurs demandes tendant à l’annulation de leur licenciement, et de celles en résultant, au motif que les attestations de moralité produites dans le cadre du procès pénal ont été établies environ 3 semaines après la notification d’une mise en garde qui leur avait été adressée à chacun et que la rédaction de l’attestation est manifestement le résultat d’une initiative conjointe et concertée des deux salariés.
Plus encore, la juridiction d’appel a considéré que les témoignages ne pouvaient avoir aucun intérêt pour la manifestation de la vérité et énonce que l’ensemble de ces circonstances démontrent que loin de vouloir apporter de bonne foi leur concours à la justice, les salariés avaient seulement cherché, en témoignant, à déstabiliser, sans aucun fondement, d’une part la défense de leur collègue auxquels ils étaient hostiles et, d’autre part, la défense de leur employeur qui venait de les mettre en garde dans des termes évocateurs d’une rupture de confiance.
La particularité des faits de l’espèce n’entrave pas la clarté de la question de droit soulevée par cet arrêt qui est celle de la licéité du licenciement prononcé contre un salarié ayant produit une attestation en justice dans un sens défavorable à l’employeur.
La solution retenue par la Cour de cassation est bien connue depuis un certain nombre d’années :
« En raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté fondamentale de témoigner, garantie d’une bonne justice, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié dans le cadre d’une instance judiciaire, est atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur ».
Rendu au visa de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, consacré au droit à un procès équitable, cet attendu de principe avait effectivement été rendu dans des termes quasi-similaires dans un arrêt du 29 octobre 2013 (Cass. Soc., n° 12-22.447) :
« en raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté fondamentale de témoigner, garantie d’une bonne justice, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié au bénéfice d’un autre est atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur ».
Si la liberté fondamentale du salarié de témoigner en justice en faveur d’un autre salarié est pleinement consacrée par la Cour de cassation, il n’en demeure pas moins qu’elle reste conditionnée à l’exception de mauvaise foi.
En effet, si le salarié avait connaissance, lorsqu’il témoigne, de la fausseté des faits dénoncés, qui revêtent donc un caractère mensonger, alors la liberté fondamentale du salarié peut être écartée par la faculté pour l’employeur d’utiliser son droit disciplinaire.