1- L’usage en France et au niveau communautaire
Les marques françaises et communautaires ne peuvent être déchues d’office pour inexploitation à l’expiration d’un délai de cinq ans.
En revanche, tout tiers intéressé peut obtenir en justice cette déchéance à la condition de prouver que pendant un délai de cinq ans, la marque n’a pas été exploitée ou alors insuffisamment.
Selon les dispositions de l’article L. 714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans (…) ».
L’article 15 du Règlement sur la Marque Communautaire dispose quant à lui que « Si dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque communautaire n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque communautaire est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage (…) ».
Des preuves d’usage peuvent également être demandées dans le cadre d’une :
action judiciaire en contrefaçon ;
opposition devant l’INPI ou l’OHMI.
A noter toutefois que l’INPI n’apprécie pas le « caractère sérieux » d’un usage ; seuls les tribunaux (et l’OHMI) étant habilités à juger ce point. Ainsi, en cas d’opposition devant l’INPI, il suffit de fournir un document pertinent et daté prouvant l’usage de la marque pour au moins un produit ou service désigné par celle-ci.
Il est donc important de veiller à ce que tous les signes d’une entreprise déposés en tant que marques soient bien utilisés à titre de marques, c’est-à-dire comme indication de l’origine commerciale de l’ensemble des produits et services de son libellé, à tout le moins pour les produits et services qui correspondent au cœur de métier de l’entreprise.
La charge de la preuve de l’usage incombe au titulaire de la marque (ou à un tiers autorisé tel qu’un licencié). Cette preuve peut se faire par tout moyen.
A titre d’exemples, les documents destinés à prouver l’usage sérieux d’une marque française ou communautaire, peuvent être notamment constitués de :
• brochures, catalogues, prospectus et tout document commercial ou
publicitaire ;
• impressions de pages du site Internet ;
• étiquettes, barèmes de prix ;
• bons de commande ou devis ;
• factures ;
• attestations de client indiquant que les services facturés ont été reçus ;
• sondages, provenant de préférence d’instituts indépendants.
Ces documents doivent faire apparaître clairement la marque, être datés et doivent prouver la continuité de l’usage de la marque pour tous les produits et services concernés.
Il ne doit pas s’agir d’un usage épisodique de la marque ayant uniquement pour but d’éviter la déchéance des droits de marque.
Les documents doivent être des documents destinés au public. La jurisprudence exige en effet que le titulaire de la marque puisse démontrer qu’il existe un contact effectif entre le produit ou le service portant la marque et la clientèle.
Il est également important que, sur les documents, la marque soit reproduite sous la forme telle que déposée. Toutefois, si la marque est exploitée de manière légèrement modifiée, il faut alors que son caractère distinctif ne soit pas altéré afin d’éviter la déchéance.
La jurisprudence française et communautaire précise que le caractère sérieux de l’usage de la marque doit être apprécié de manière « globale », en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce.
Cette appréciation implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous la marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement.
Enfin, l’exploitation sérieuse doit être prouvée sur chacun des territoires pour lesquels une protection à titre de marque a été revendiquée.
S’agissant d’une marque communautaire, cette exploitation doit concerner une partie substantielle du territoire de la Communauté Européenne, bien que certaines décisions accueillent la démonstration d’un usage de la marque communautaire dans un seul pays pour éviter la déchéance.
2- L’usage aux Etats-Unis
Aux Etats-Unis, les preuves d’usage sont nécessaires non seulement en cas de demande de tiers (par exemple dans une procédure d’opposition, comme pour les marques françaises et communautaires) mais également pour obtenir l’enregistrement et/ou le maintien en vigueur de la marque.
En effet, le titulaire d’une marque américaine doit, pour conserver ses droits, fournir à l’Office américain des marques (U.S.P.T.O.) d’une part une déclaration d’usage l’année du cinquième anniversaire de l’enregistrement de sa marque, et d’autre part des preuves d’usage de sa marque. A défaut, elle sera déchue d’office.
De plus, il est fortement recommandé d’utiliser la marque telle que déposée et enregistrée pour tous les produits ou services, au risque de voir sa marque annulée en tout ou partie.
Il est par conséquent important, lors du dépôt, de viser précisément les produits et services pour lesquels la marque sera effectivement exploitée.
L’office américain examine de façon très stricte les preuves fournies et opère une distinction entre les marques de produits et les marques de services.
Pour les marques de produits, l’office requiert des documents montrant la marque telle que déposée, apposée sur les produits eux-mêmes. Les preuves suivantes sont généralement acceptées :
• photos du produit sur lequel la marque est apposée ;
• étiquettes, emballages du produit revêtant la marque ;
• catalogues faisant clairement ressortir la marque sur les produits rattachés à cette marque.
Il est à noter que les factures (preuves admises en France) sont refusées aux Etats-Unis.
De même, l’office américain ne tient pas compte des documents qui visent uniquement à décrire le produit.
Pour les marques de services, les preuves devront faire apparaître la marque telle que déposée (même orthographe, etc.) ainsi qu’une description des services.
Quelques exemples de preuves admises :
• campagnes de publicité ;
• brochures publicitaires, matériel publicitaire ;
• extraits de sites Internet.
Des publicités sans rapport avec les services visés par la marque seront rejetées par l’office.