1. S’il fallait encore ajouter une pierre à l’édifice du principe de précaution, susceptible de convaincre les plus hostiles à l’application de ce dernier en droit privé , l’arrêt rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation le 9 juillet 2009 tomberait à point nommé. En effet, en condamnant pour la première fois un laboratoire pharmaceutique à indemniser une victime ayant développé une sclérose en plaques à la suite d’une vaccination contre l’hépatite B, sur le seul fondement de la « possibilité » d’un lien de causalité entre une telle vaccination et cette maladie, la Haute juridiction judiciaire reconnaît implicitement mais sûrement l’existence d’une responsabilité pour défaut de précaution .
2. En l’espèce, une jeune femme avait reçu, en juillet et en août 1997, deux injections du vaccin contre l’hépatite B Genhevac, commercialisé en 1989, par la société Pasteur Aventis MSD. En octobre 1997, soit deux mois après la dernière injection, elle avait commencé à subir des troubles neurologiques et en 2001 elle s’est alors révélée atteinte d’une sclérose en plaques. Par un arrêt infirmatif du 22 novembre 2007, la Cour d’appel de Lyon a déclaré la société Pasteur Aventis MSD responsable de l’apparition de la sclérose en plaques et l’a condamnée à réparer les préjudices subis par la victime.
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société Pasteur Aventis MSD. D’une part, elle a approuvé la cour d’appel d’avoir, en application de l’article 1386-4 du Code Civil, déduit le caractère défectueux du vaccin de l’absence d’information, dans la notice de présentation de ce dernier de ses effets secondaires indésirables possibles de poussée de sclérose en plaques. D’autre part, la Haute juridiction judiciaire a estimé que les juges du fond ont pu déduire l’existence d’un lien de causalité juridique entre la vaccination et le préjudice subi par la victime de présomptions graves, précises et concordantes, et ce, en dépit de l’absence de certitude scientifique entre la vaccination et la survenance de sclérose en plaques.
3. Avec cette décision, la première Chambre civile consacre implicitement l’existence d’une responsabilité civile pour défaut de précaution, d’une part, en se contentant de l’existence d’un simple lien de causalité possible entre le fait générateur (la vaccination) et le dommage (la maladie), là où la responsabilité civile exige traditionnellement que ce lien soit certain (I) et d’autre part, en élargissant le domaine de l’obligation d’information, en matière de médicament, au risque suspecté de dommage, lequel s’apparente, selon la Cour de cassation, à une défectuosité du vaccin (II).
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Par Maître Daphné TAPINOS
Docteur en droit
Avocate au Barreau de Paris
d.tapinos chez gmail.com