Un contenu épuré…
Certes, la mise en demeure n’est pas un acte de procédure. Elle ne constitue qu’une "invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti" [1]. Il en résulte que ce document n’est soumis à aucun formalisme particulier. D’ailleurs, à l’origine l’article R244-1 de la Code de la sécurité sociale se contentait d’indiquer que l’envoi par l’organisme de recouvrement de la mise en demeure était « effectué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ». Toutefois, étant donné l’importance de ce document, le législateur est intervenu aux fins d’inscrire au sein de l’article L244-2 al 2 du Code de la sécurité sociale que le contenu de la mise en demeure devait « être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat » [2].
Désormais, le contenu de la mise en demeure peut ainsi être résumé :
▪ La mise en demeure doit inviter le cotisant à régulariser sa situation dans le mois [3]. A défaut de préciser ce délai, la mise en demeure est nulle [4].
▪ Elle doit préciser la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent [5].
▪ Elle doit mentionner au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d’observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l’agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d’observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l’agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l’article R243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée [6].
... que les URSSAF simplifient encore.
On insistera sur le fait que le contenu de ce document « doit être précis [c’est-à-dire exact] et motivé… » [7] et viser donc clairement la cause, la nature et le montant des sommes réclamées [8]. La nature de l’obligation renvoie à ses caractéristiques. Bien qu’aucune définition ne soit donnée de cette notion, on pourrait considérer qu’il s’agit de la « nature des dettes du cotisant » [9].
Or, dans le but de se simplifier l’existence, les URSSAF ont pris l’habitude d’indiquer dans le cartouche correspondant de la mise en demeure des mentions des mentions vagues telles : « Régime Général », avec parfois présence d’un astérisque « Incluses contribution d’assurance chômage, cotisations AGS »... Que valent de telles mise en demeure ?
La méfiance est ici permise !
En effet, le régime général est défini à l’article L200-1 du Code de la sécurité sociale et couvre un certain nombre de risques : maladie, vieillesse, prestations familiales, protection universelle maladie, autonomie… ce qui n’est pas le cas de certaines sommes certes redressées et recouvrées par les URSSAF mais qui ne sauraient relever du Régime Général.
Ainsi en serait-il :
- De l’ancienne contribution FNAL (actuellement versement mobilité), recouvrée par les URSSAF, mais qui constitue un impôt [10] ;
- De la CSG crée par la loi de finances n° 90-1168 du 29 décembre 1990 qui est considérée par le Conseil constitutionnel comme un impôt [11] ;
- De la contribution d’assurance chômage recouvrée par les URSSAF depuis le 1er janvier 2011 (V. loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009) mais qui ne saurait être classée parmi les cotisations du Régime Général ;
- Du versement transport qui constitue un impôt entrant dans la catégorie des impositions de toutes natures [12].
Autant de contributions qui n’ont rien à voir avec le « Régime général ».
Or, les redressements URSSAF comportent dans l’immense majorité des hypothèses une ou plusieurs de ces contributions.
Il est intéressant de constater que tout un pan de la jurisprudence commence à censurer les mises en demeure aux contenus insuffisants ou inexacts, mentionnant « Régime général » alors qu’elles comportent des sommes n’ayant rien à voir avec le « Régime général » [13].
Et l’argumentation est logique. Certes, on peut admettre l’opinion de S.Choppin Haudry de Janvry suivant laquelle la jurisprudence doit éviter de tomber dans l’excès du « formalisme exacerbé » [14]. Toutefois, cette souplesse ne doit pas aller jusqu’à accepter des mises en demeure imprécises, incomplète, voire fausses où le cotisant est dans l’incapacité de comprendre le contenu du document…
D’aucuns soutiendront que peu importe cette mention inexacte puisque les mises en demeure font référence à la précédente lettre d’observations (obligation édictée par l’article R 244-1 alinéa 2 du CSS). On peut toutefois douter de la valeur de cette démonstration… En effet, le fait que le cartouche inexact de la mise en demeure « Nature des cotisations : régime général » renvoie à la lettre d’observations, ne peut ici être d’aucune aide pour rattraper ces insuffisances puisque c’est la mention même de la nature des sommes réclamées qui est inexacte.
Le raisonnement visant à invalider la mise en demeure pour insuffisance de contenu est donc sérieux et ce, quel que soit la résistance de certaines juridictions.
Disons le même clairement, cette nouvelle orientation de la jurisprudence est profitable non seulement pour les URSSAF qui se doivent de pratiquer la transparence que pour les cotisants qui sont en droit de comprendre précisément ce qui leur est réclamé.
Reste à savoir à quel moment il convient d’invoquer la nullité de cette mise en demeure. Mais ceci est un autre sujet.
Discussions en cours :
Ne donnez pas de faux espoirs. Cette argumentation sera retoquée systématiquement en Cassation, même si localement un juge manifeste parfois des velléités d’indépendance. L’URSSAF est un État dans l’État.
Bonjour, jai pu lire qu’en vertu du droit européen, un independant liberal non réglementé pouvait se desafillier de l urssaf et recourrir a des assurances privées d un autre etat membre. Est ce possible ? Merci.
En France, il y a aussi “Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom” : l’URSSAF ; jamais un média ne prononcera son nom , car sinon tout le système imploserait .
Or , qu’est-ce que l’URSSAF ? Tout d’abord, lisez ce livre : https://www.larevueparlementaire.fr/articles-revue-parlementaire/3705-francois-taquet-l-urssaf-un-cancer-francais
– une société-mère, l’ACOSS (ordonnance n° 67-706 du 21 août 1967, art. 48) et 22 filiales de droit privé, ayant la nature juridique de sociétés en participation, faute de statuts (en clair, des ectoplasmes juridiques, dépourvus de toute personnalité morale) ;
– une mise en concurrence avec tous leurs homologues de l’Union Européenne, depuis 2003 ;
– 705 milliards d’€ de cotisations annuelles ;
– 3,5 milliards d’€ de pénalités annuelles, grâce à la déclaration sociale nominative (DSN), télétransmise mensuellement & moulinée par des algorithmes ;
– 90 % des entreprises débusquées par ces algorithmes, donc contrôlées et redressées ; en clair, 90 % de fraudeurs ;
– depuis 1945, la Cour des comptes, après avoir tenté de contrôler la comptabilité des URSSAF, rend un constat de carence, eu égard à son opacité ;
– la moitié des liquidations judiciaires sont provoquées par l’URSSAF ou son homologue agricole, la MSA ;
– 95,35 % des entreprises françaises ont moins de 10 salariés, elles « passent en dessous des radars » et supportent 62,2 % de charges :
[ https://www.juritravail.com/Actualite/qu-est-ce-que-le-rsi-deux-catastrophes-trois-problemes-une-solution/Id/286404 %5D
[ https://www.juritravail.com/Actualite/coulez-le-bismarck/Id/163551 %5D