L’obligation d’accessibilité des sites web publics
L’accessibilité du web consiste à permettre « l’accès à tout type d’information sous forme numérique quels que soient le moyen d’accès, les contenus et le mode de consultation. »
Cette accessibilité est une obligation pour les institutions publiques (État, Collectivités Territoriales, Établissements publics) au titre de l’article 47 de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
En 2009, les règles d’accessibilité des sites web publics ont été définies dans le cadre d’un décret n° 2009-546 du 14 mai et d’un arrêté du 29 octobre qui ont mis en place le Référentiel Général d’Accessibilité dans les Administrations (RGAA). Ce référentiel décrit des règles et techniques pour rendre tous les sites web publics accessibles aux handicapés autour de quatre principes :
la perceptibilité (police, braille, mise en page simplifiée...),
l’utilisation (accessibilité par le clavier, élément d’orientation pour la navigation...),
la compréhension (texte lisible et compréhensible)
et la robustesse (compatibilité avec les agents actuels et futurs).
Par exemple, pour un profil d’acheteur, c’est-à-dire la plate-forme d’une administration dédiée à la dématérialisation des marchés publics, l’accessibilité consistera notamment à le rendre intuitif, simple, avec un contenu en XHTML et une structure proposant des solutions alternatives aux contenus vidéo et image.
L’échec de l’accessibilité des sites web publics
Les textes ont imposé une date limite de conformité : le 16 mai 2011 pour les services de l’État et les établissements publics qui en dépendent, et le 16 mai 2012 pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics.
A l’évidence, l’objectif voulu était d’accélérer l’accessibilité des sites web existant qui demeure une opération complexe et coûteuse pour les administrations. Cependant, le délai imposé était trop ambitieux si l’on se réfère au rapport de l’observatoire ministériel de l’accessibilité et de la conception universelle publié en octobre 2012 qui précise que « la démarche de mise en conformité avec le RGAA a été jusqu’à présent peu engagée » (p. 106).
Dans la pratique, on peut facilement observer que peu de sites institutionnels proposent une accessibilité à travers un lien « accessibilité ». Il y a bien quelques bons élèves (sites web du premier ministre, du ministère du développement durable, de l’économie et des finances, du conseil général de Picardie, du Nord Pas de Calais, la ville d’Issy Les Moulineaux...), mais la majorité des sites institutionnels, et plus particulièrement des communes, ne propose pas d’onglet « accessibilité » sur leur site. On peut citer à titre incident, le site web de la ville de Paris ou celui du ministère des affaires sociales et de la santé, proposant, par ailleurs, des fiches sur le droit des handicapés...
Et ce ne sont pas les sanctions prévues par le décret qui vont inciter les administrations à se conformer à ce référentiel. En effet, en cas de non-conformité avérée, l’administration est mise en demeure pendant six mois puis, le cas échéant, se voit inscrite sur une liste de non-conformité établie par le ministre chargé des personnes handicapées qui, pour l’instant, n’existe pas et dont les conséquences semblent peu, voire pas, contraignantes...
La recommandation du ministère de l’Economie et des Finances
Consciente des difficultés techniques qu’engendre la mise en œuvre de l’accessibilité numérique, la Direction des Affaires Juridiques (DAJ) du ministère de l’économie et des finances a fait œuvre utile en publiant cet été une recommandation sur l’accessibilité des sites web publics aux personnes atteintes d’un handicap. Ce document non réglementaire a vocation à demeurer un véritable guide pour tout acheteur public de services de communication électronique souhaitant rédiger un cahier des charges conforme au RGAA.
La recommandation insiste sur plusieurs points.
Tout d’abord, la DAJ déplore le nombre de cahiers des clauses techniques particulières (CCTP) restant trop généraliste sur le point de l’accessibilité, généralité ne permettant pas d’encadrer cette obligation, que les prestataires ne maîtrisent pas forcement ou ne connaissent tout simplement pas.
Ainsi, la DAJ préconise fortement de demander aux prestataires leur méthodologie pour intégrer et garantir l’accessibilité dans les choix techniques et les différentes étapes de la conception du site.
Elle conseille en outre de demander des précisions sur les paramètres d’accessibilité pour les livrables du site internet et leurs traitements (navigation, html...).
Pour s’assurer de la prise en charge de l’accessibilité tout au long du projet de conception du site web, la DAJ invite l’acheteur public à mettre en œuvre des tests sur l’accessibilité. La grille de tests proposée par une annexe du RGAA semble pouvoir être utilisée dans ce cas.
L’équipe en charge du développement du site web devra avoir des connaissances en accessibilité et le prestataire devra prévoir des formations de l’acheteur public quant à la prise en main du site, et ainsi faire perdurer l’accessibilité dans le temps une fois la prestation terminée.
La DAJ rappelle, en effet, que l’accessibilité ne concerne pas seulement le prestataire, mais aussi les contenus publiés par l’équipe en charge de la publication (texte, vidéo...) sur le site internet dans l’administration.
La recommandation de la DAJ aura probablement un effet incitatif non négligeable sur les acheteurs publics. Mais on ne peut s’empêcher de s’interroger sur la portée réelle de cette mesure quand on sait que le décret de 2009 a déjà échoué et que 9,6 millions de personnes sont concernées en France ! (nombre de personnes atteintes d’un handicap en France, source : INSEE, enquête complémentaire à l’enquête emploi, 2007)
Notes :