La fiche pratique devenue norme simplifiée
L’essor des relations commerciales à distance et des normes qualité au sein des entreprises ont rendu courant les traitements d’écoutes et enregistrements de conversations téléphoniques sur le lieu de travail. Que ce soit dans le cadre de l’amélioration d’un service client ou pour des besoins de formation, la majorité des entités disposant d’un point de contact téléphonique sont équipées de tels dispositifs d’enregistrement.
Depuis plusieurs années, la CNIL a pu identifier ce besoin et y consacrait jusqu’alors une fiche pratique destinée aux responsables de traitement. Cette dernière reprend de manière synthétique les grands principes de la loi de 78, à savoir dans le cas d’espèce les nécessités de proportionnalité du traitement, sa légitimité, l’information devant être procurée aux différentes personnes concernées (bien souvent les salariés et clients), les mesures de sécurité devant être garanties, etc.
A défaut de norme simplifiée concernant ces traitements, tout responsable de traitement souhaitant mettre en place un dispositif d’écoute et d’enregistrement des conversations sur le lieu de travail, devait réaliser une déclaration normale auprès de la Commission afin d’assurer la légalité de son traitement. Une exception était tout de même à relever, celle des entités ayant désigné un Correspondant Informatique et Libertés (CIL) et pour lesquelles une inscription au registre du CIL suffisait.
Suite à la publication de la NS57, fidèlement calquée sur la fiche pratique jusqu’alors publiée sur le site de la CNIL, les démarches administratives deviennent simplifiées pour les entités n’ayant pas désigné de CIL. Un traitement conforme aux dispositions de la norme simplifiée dispense ses entités de déclaration normale auprès de la CNIL. Jumelée avec la NS39 relative aux autocommutateurs téléphoniques, les entreprises disposent désormais d’un duo de normes simplifiées leur permettant de cadrer leurs traitements de DCP relatifs à la téléphonie tout en réduisant leurs démarches administratives.
Le régime de la norme simplifiée n°57
Champs d’application
Loin d’être innovante, la norme simplifiée n°57 se veut restrictive. Elle concerne tant les organismes publics que privés souhaitant mettre en place un système d’écoute et/ou d’enregistrement téléphonique sur leur lieu de travail.
Tous les dispositifs de ce type ne peuvent prétendre à bénéficier de la NS puisque la délibération exclut stricto sensu les enregistrements de collecte de données sensibles (origines raciales ou ethniques, opinions politiques, philosophiques, religieuses, appartenance syndicale, données de santé ou relatives à la vie sexuelle), les enregistrements permanents ou systématiques des appels, les écoutes et enregistrements faisant l’objet d’un couplage avec des données provenant d’une capture d’écran du poste informatique de l’employé ou encore les enregistrements audiovisuels.
La norme simplifiée n°57 reste donc cantonnée aux très traditionnels enregistrements téléphoniques non systématiques utilisés dans le cadre de la formation et/ou de l’évaluation des employés ou dans celui de l’amélioration de la qualité du service proposé par l’entreprise. Typiquement, cette norme peut concerner le traitement opéré par le SAV téléphonique d’une marque répondant aux appels de ses clients.
Les dispositifs plus modernes, à l’instar du service SAV fourni par la société "AutoLib" sur ses bornes installées en ville et permettant notamment des conversations audiovisuelles s’en trouvent donc exclus.
En ce qui concerne les notions de « permanent ou systématique », il est important de signaler qu’elles ne concernent que les enregistrements. Dans le cadre la norme simplifiée n°57, 100% des conversations pourront donc être écoutées. Egalement, un traitement recensant 90% des appels téléphoniques ne pourrait, à priori, être considéré comme étant permanent ou systématique et intègrerait ainsi le champ de cette NS.
Données collectées
A l’instar de cette norme, les données pouvant être collectées sont également restreintes. Peuvent ainsi faire l’objet d’un traitement les enregistrements sonores mais également des données d’analyse que sont les données d’identification de l’employé et de l’évaluateur (à défaut de précision, cela peut être le nom/prénom, un numéro RH interne ou tout autre moyen d’identification), la date, l’heure et la durée de l’appel ainsi que l’évaluation professionnelle du salarié.
Il est notable de constater l’absence des retranscriptions écrites des conversations orales qui sont dès lors exclues du champ de cette norme simplifiée. Une entreprise souhaitant tout de même collecter ces données devra donc réaliser une déclaration normale. Egalement, les numéros de téléphone ne peuvent figurer dans le traitement mis en œuvre sur le fondement de la NS57 ; ces derniers sont en effet régis par la NS47 constituant un traitement distinct aux finalités distinctes.
En matière de durée de conservation, la position de la CNIL n’a pas évolué depuis la parution de sa fiche pratique puisque les enregistrements sonores peuvent être conservés au maximum 6 mois tandis que les documents d’analyse peuvent eux être conservés au maximum 1 an.
Information et consultation des IRP
En vertu de l’article L.2323-32 du Code du travail, la mise en place d’un traitement contrôlant l’activité d’un salarié, comme le prévoit la norme simplifiée n°57, suppose une information préalable des Instances Représentatives du Personnel (IRP).
Les employés doivent également être informés des habituelles informations exigées par la mise en place d’un traitement de données à caractère personnel. Cette information est essentielle puisqu’à défaut, les enregistrements ne peuvent être opposables au salarié par son employeur dans le cadre d’une procédure disciplinaire.
Enfin, les interlocuteurs des salariés doivent être informés des habituelles informations exigées par la mise en place d’un traitement de données à caractère personnel. La norme simplifiée précise par ailleurs par renvoi que ces personnes doivent spécifiquement être informées de leur droit d’opposition avant la fin de la collecte des données les concernant.
Discussions en cours :
Bonjour .
Pourriez vous préciser les éléments qui permettent de distinguer les écoutes des enregistrements
dans la norme 57. Pourquoi aurait on le droit d’écouter une personne 100% de son temps alors qu’on aurait pas le droit de l’enregistrer ?
D’avance merci pour vos précisions.
Cordialement,
Bonjour Monsieur,
Afin qu’il n’y ai aucune ambiguïté, il n’est pas ici question de "droit" de faire ou de ne pas faire, mais bien de conformité à une norme simplifiée CNIL. Les actions exclues du périmètre de la NS57 ne s’en trouvent pas pour autant interdites. Les traitements sortant du périmètre de cette norme devront faire l’objet de formalités préalables distinctes.
Aparté réalisée, la NS57 dispose très clairement en son article premier, et comme indiqué dans le corps de ma publication, que sont exclus du champ de cette norme "l’enregistrement permanent ou systématique des appels sur le lieu de travail, y compris à des fins probatoires."
Il est donc exclu qu’un traitement mettant en œuvre ce type d’enregistrement permanent ou systématique puisse intégrer le champ de la NS57.
En revanche, à défaut d’exclusion des dispositifs d’écoutes permanents ou systématiques, ces derniers peuvent parfaitement intégrer la NS57.
En espérant avoir répondu à vos interrogations.
Pour info , sur le site de la CNIL en présentation de la norme 57
Enfin, les auditions menées auprès des principaux opérateurs ont également permis à la CNIL de réaffirmer sa doctrine selon laquelle l’écoute et l’enregistrement des conversations téléphoniques de manière permanente ou systématique ne se justifie pas}, y compris à des fins à de constitution de preuve (à l’exception des cas où un texte légal l’impose).
Bien sur , j’ai compris que seul la délibération au journal officiel sur la norme 57 compte et confirme vos explications ( La CNIL est ambiguë sur le sujet ! )
Bonjour,
Dans le cadre d’une écoute de la part d’un manager sur mon discours commercial auprès de mes clients, dois-je informer ceux-ci qu’ils sont écoutés et non enregistrés ?
Merci pour votre réponse.
Cordialement,
Bonjour,
Compte-tenu de l’ambiguïté suscitée réalisée par la CNIL entre "enregistrement" et "écoute" (et ce malgré une NS 57 ne traitant pas sur un pied d’égalité ces deux traitements), je ne peux que vous recommander d’être prudent et d’informer vos interlocuteurs en cas d’écoute.
Vous trouvez ci-joint les recommandations de la CNIL en la matière :
En espérant vous avoir aidé :)
Bonjour,
Mon employeur a-t-il le droit d’écouter les conversations téléphoniques de ses employés sans système d’enregistrement, dans le cadre d’une simple écoute ? Il s’agit de conversations strictement professionnelles qui ne menacent en rien la sécurité de l’entreprise. Mon employeur peut-il ensuite retranscrire ce qu’il a entendu, même si cette retranscription est inexacte ou déformée, et utiliser cette retranscription erronée dans le cadre d’une sanction disciplinaire, sans en avoir informé les employés au préalable ? À aucun moment, nous n’avons été informés que nos conversations pouvaient être écoutées et nos propos collectés par ce biais.
Cordialement