Chronique de votre carrière (11) : L'analyse du DRH.

Chronique de votre carrière (11) : L’analyse du DRH.

Mireille Garolla
Associé gérant de Group3C
Executive coach spécialisée en transition professionnelle
Auteur de : Changer de Vie en milieu de Carrière chez Eyrolles

Interview d’Armand Ménnechet, DRH du Groupe BERRI, par Mireille Garolla. Je vous rappelle le nouveau focus de cette chronique : je fais appel à des professionnels reconnus dans leur secteur qui partagent avec nous leurs avis, leurs conseils et leurs truc et astuces afin de vous permettre de vivre votre transition professionnelle avec le maximum d’atouts dans votre jeu.

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Mon invité est Armand Mennechet DRH du groupe Berri. Armand Mennechet merci de vous prêter à cet exercice avec nous aujourd’hui. Je rencontre de plus en plus de salariés en perte de repère. Par rapport à cela, je vais vous demander de travailler à contre-emploi et de faire bénéficier de vos compétences aux salariés et aux particuliers en transition professionnelle. Vous êtes le DRH du groupe Berri. En plus de vos activités professionnelles, vous avez écrit plusieurs livres dont le dernier sorti en 2012, s’intitule « wanagement ou manager à contre-courant ».

Vous nous dites que les désirs collectifs de l’entreprise et les désirs personnels se combinent mal aujourd’hui. Dans ce monde, quel est le rôle du DRH ? Que peut-on attendre ou ne pas attendre le salarié de son DRH ?

Armand Mennechet : Le DRH doit avoir avant tout une neutralité d’appréciation. Ce n’est pas toujours facile puisqu’il dépend d’une direction et s’inscrit dans son schéma et qu’il est face à des salariés qui se trouvent dans des situations en difficulté. J’ai un rôle d’arbitrage quand la situation est tendue, quand il y a un besoin de recul et de froideur. J’essaye, dans ce cas, de réfléchir en fonction de l’intérêt ultime. Et, J’ai par ailleurs un rôle de conseil dans le recrutement ou dans le cas où il faut dire certaines mises en garde. La Liberté et la neutralité d’appréciation sont essentielles pour être un médiateur et un accélérateur de l’évolution.

MG : Le second thème est celui de la gestion de l’employabilité des collaborateurs. Votre analyse est qu’il s’agit d’un patrimoine fragile qui doit être mesuré, se consolider et s’enrichir. N’en est-il pas de même pour les salariés des entreprises ?

AM : Oui, c’est tout à fait transposable. Les compétences doivent se consolider. Il faut comparer son niveau par rapport à un standard. C’est un exercice important de faire une auto-évaluation de ses compétences en s’ouvrant à des pairs professionnels, à des contextes professionnels. Il est nécessaire de ne pas rester dans sa zone de confort. Affronter le miroir n’est pas facile mais permet d’accéder à une comparaison et une forme de vérité. Et, surtout il permet de ne pas rester dans une stagnation professionnelle. Les professionnels de l’évaluation et du conseil perçoivent très rapidement la stagnation. Il faut avoir le souci de l’actualité de ces compétences.

MG : Les gens disent que les formations ne servent à rien alors qu’ils en attendaient beaucoup. Comment les salariés et les employeurs peuvent apprendre à « danser ensemble » plutôt que de s’opposer ou d’attendre tout de l’autre ?

AM : Oui, il y a une tentation opportuniste pour le salarié quand il entreprend une formation pour son actualité ou pour changer de poste demain. Dans ce cas, l’entreprise peut être réticente à ouvrir la porte aux formations. Par ailleurs, l’entreprise est opportuniste aussi. Elle n’a pas intérêt à ce que ces compétences grandissent plus que son besoin, surtout si elle n’en bénéficie pas. Ce sont des jeux d’opportunisme. Pour les salariés, il faut se préparer, attendre la fenêtre d’ouverture et faire preuve de patience. Il s’agit de ne pas trop mettre d’émotions et de danser plutôt que se recroqueviller. La météo peut changer vite dans les organisations.

MG : Vous parlez des compétences dans votre livre. Et, j’aimerais transposer cela aux individus ? Quelle est votre définition des compétences individuelles et des compétences collectives ?

AM : Pour moi, les compétences individuelles se concrétisent dans le comportement, qui n’a jamais été aussi important, et dans l’apport métier. On a toujours des conseils ou des experts sur des problématiques techniques ou métier. En revanche, on ne peut pas emprunter à quelqu’un d’autre le comportement, l’habileté relationnelle, le savoir-être ou les compétences métiers.
La compétence collective consiste à travailler avec d’autres personnes, d’autres services, fonctions. Et comprendre les enjeux des fonctions des autres pour faire une bonne mayonnaise !
Les interactions entre les fonctions RH, finances et commerciale exigent un décloisonnement des choses. Il faut savoir combiner les compétences de tout le monde.

MG : Vous dites, en somme, pour suivre les évolutions, les individus doivent se transformer en micro-entreprises et être en adaptation permanente. Et surtout, ils doivent décloisonner leur référentiel.

AM : Oui, il est important de décloisonner ; de fonctionner en circuit plus court plus efficace ; de faire confiance à ses interlocuteurs ; de se mettre en hyper-écoute des changements internes et externes. Cela peut être au niveau de l’environnement, sur un plan financier ou règlementaire. Et je rajouterai qu’il est fondamentale de marquer un vrai intérêt pour l’entreprise. Les salariés qui ne développent pas l’intérêt de l’organisation se pénalisent pendant les entretiens. Il faut un intérêt authentique pour l’organisation. La sentir et la comprendre est essentiel pour bien y vivre.

MG : Dans votre dernier livre, vous expliquez que le point commun entre les individus qui réussissent et les entreprises performantes est qu’ils ne font pas comme les autres et ne suivent pas les tendances. Vous écrivez «  L’avenir appartient aux rêveurs et aux iconoclastes ». J’adore cette phrase ! Comment cela s’applique t’il aux personnes en recherche de nouveaux horizons ?

AM : Les choses sont trop labellisées et segmentées. Je défends des organisations indépendamment des fonctions que les personnes occupent. Il faut s’intéresser à tout et ne pas se limiter à la définition de fonction ou de poste qui est, de fait, rapidement obsolète. C’est déroutant d’entendre « ce n’est pas dans ma fiche de fonction ». Cela peut sembler vrai de prime abord. Mais, La fiche de fonction est un élément de repère. Il faut sortir de cela si vous voulez enrichir votre poste. Il faut passer de la fiche de fonction à la proposition de fonction. Les fiches de fonction ne sont pas à jeter. Mais, Il faut de la flexibilité dans les entreprises, car nos systèmes se bureaucratisent. Et si on n’utilise pas les compétences de manière optimale, cela peut être désespérant pour les salariés et les entreprises.

MG : En tant que DRH, vous êtes ouverts à une proposition de fonction ou une proposition d’emploi ?

AM : Oui, si quelqu’un vient me voir avec une proposition d’emploi et que le contexte s’y prête, je lui dirai on y va ! Si ce n’est pas le contexte, Je lui dirai de garder son idée et son envie. Et, quand le contexte sera là, ce sera le moment d’agir.

MG : Très joli message d’espoir. Pour cette dernière partie de l’interview, j’ai une question que se posent souvent les personnes en milieu de carrière. Quand fait-on appel à un cabinet de chasse ou quand faites-vous la recherche vous-même ?

AM : On fait appel à un cabinet dans une situation quand on recherche des compétences particulières. Les cabinets de recrutement ont aussi la capacité de sentir les évolutions de demain.
Pour les personnes en transition professionnelle, la recherche d’emploi est difficile aujourd’hui. Il faut s’appuyer sur les conseils en recrutement. Ne pas faire preuve d’un excès en assurance et en sous-assurance. Tout parcours professionnel est intéressant quand il est le fruit d’un développement personnel et professionnel.

MG : A propos de « se vendre pour réussir sa carrière », titre d’un de vos ouvrages. Quel serait votre meilleur conseil ?

AM : Bien se connaitre. Bien connaitre ses caractéristiques professionnelles principales au-delà des fonctions occupées. Et puis comprendre là ou se portent 2-3 actions sur lesquelles se porte votre valeur maximale. Un dernier conseil serait de ne pas oublier qu’on est bon là où l’on a du plaisir.

MG : Je vous pose maintenant une question que posent souvent les personnes en transition professionnelle. Quel est le rôle du DRH dans le processus de recrutement ? Est-il une force de proposition ou représente-t-il le pouvoir de dire non ?

AM : Dans ma pratique, Je peux dire non à une candidature ou pousser une candidature. Et, en réalité, c’est surtout en fonction des signaux que je perçois. Mes signaux peuvent annoncer des résultats probants et prolifiques demain ou annoncer des orages à venir. J’ai dans ce cas un rôle de signalement. J’ajouterai aussi que j’ai la responsabilité de demander aussi si c’est le bon moment pour la personne de rentrer chez nous.

MG : Armand Mennechet, je vous remercie. Bonne analyse et à bientôt !

Mireille Garolla
Associé gérant de Group3C
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Auteur de : Changer de Vie en milieu de Carrière chez Eyrolles

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