Condamnations pénales de sociétés commerciales : il y a des limites ! Par Joseph Bighinatti, Avocat.

Condamnations pénales de sociétés commerciales : il y a des limites !

Par Joseph Bighinatti, Avocat.

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Explorer : # responsabilité pénale des entreprises # délégation de pouvoirs # infractions pénales

Les Sociétés Commerciales peuvent être condamnées, comme des individus, à des sanctions pénales lorsqu’elles commettent des infractions, par exemple en matière de législation du travail, et ceci indépendamment des dirigeants de la personne morale en cause. Mais la jurisprudence récente y met des limites.

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Les sociétés commerciales sont, aujourd’hui, responsables des infractions pénales commises, pour leur compte ou en leur nom, par leurs organes sociaux ou leurs représentants.

Elles peuvent ainsi être condamnées comme des personnes physiques à des peines privatives de liberté, comme à des interdictions de poursuivre tout ou partie de leurs activités professionnelles et économiques, ou encore à des amendes dont le montant peut s’avérer extrêmement lourd, en tous cas beaucoup plus élevé que celui applicable aux individus.

Ces dispositions résultent notamment de l’article 121-2 du Code Pénal.

La jurisprudence n’exigeait pas jusqu’à présent, pour que la condamnation pénale d’une entreprise soit prononcée, que soit précisée l’identité de la personne physique ayant concrètement commis les faits répréhensibles lorsque seul un organe social ou un représentant de la société concernée avait pu, en réalité, commettre l’infraction.

Ceci a été le cas, par exemple, dans certaines affaires judiciaires en matière d’homicide involontaire résultant d’un manquement aux règles d’hygiène et de sécurité, manquement que seul un organe social ou un représentant de la société aurait pu commettre.

Les tribunaux pouvaient alors, pour condamner une société, se contenter de relever qu’il y avait eu une infraction pénale et que, par sa nature, cette infraction ne pouvait avoir été commise que par un organe social ou par un représentant de la Société en cause.

Dorénavant, la jurisprudence récente de la Cour de Cassation exige des conditions plus précises.

En effet, pour que la société puisse être condamnée, l’identité de la personne physique ayant commis les faits répréhensibles doit être établie avec certitude pour s’assurer que cette personne est bien un "représentant" de la société ayant le pouvoir d’agir au nom ou pour le compte de cette dernière.

Cette exigence s’applique désormais aux infractions pénales de toute nature, qu’elles soient volontaires ou involontaires, ce qui implique qu’une Société ne peut en aucun cas être condamnée pénalement si la personne ayant commis les faits reprochés n’a pas, réellement, le pouvoir juridique d’agir au nom ou pour le compte de la société poursuivie.

La conséquence de cette nouvelle, et très stricte, position prise par la chambre criminelle de la Cour de cassation suppose lorsque ces faits ont été commis, par exemple, par un salarié de la société, que cette dernière ne puisse être condamnée que si l’existence d’une délégation de pouvoirs préalable, consentie au profit de ce salarié par un organe social ou un représentant de cette Société, est établie.

A défaut d’établir l’identité précise de la personne physique ayant commis les faits et à défaut de constater que cette personne a agi, même s’agissant d’un salarié, dans le cadre de pouvoirs précis lui permettant d’engager la Société, les tribunaux ne peuvent plus condamner la société elle-même, mais seulement la personne physique à l’origine de l’infraction constatée.

La nouvelle position prise par la cour de cassation en la matière est de nature à inciter encore davantage les sociétés commerciales à veiller, entre autres, avec un soin tout particulier au contenu des délégations de pouvoirs consenties à tel ou tel salarié ainsi qu’aux conditions dans lesquelles elles sont mises en place.

N’hésitez pas à évoquer ce délicat sujet avec votre avocat avant d’établir ou de faire établir des délégations de pouvoirs pour tel ou tel salarié, ayant ou non par ailleurs le statut cadre, il ne s’agit ni d’actes simples, ni de documents anodins si on veut leur donner un efficacité juridique réelle.

Joseph BIGHINATTI
AVOCAT
Ancien Bâtonnier
CABINET "ACTION-CONSEILS"

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