Le Conseil constitutionnel remet un peu de liberté publique dans le débat sur la fiscalité. Par Gregory Groleas, Directeur Fiscal.

Le Conseil constitutionnel remet un peu de liberté publique dans le débat sur la fiscalité.

Par Gregory Groleas, Directeur Fiscal.

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Explorer : # fiscalité # libertés publiques # fraude fiscale # garde à vue

Le Conseil constitutionnel a invalidé plusieurs dispositions de la loi adoptée le 5 novembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière.
Nous reprendrons ici deux des dispositions censurées.

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1. Utilisation de renseignements d’origines illicites

Sous l’effet des cas HSBC, UBS et des différents lanceurs d’alerte, il avait été prévu un dispositif visant à couvrir l’origine illicite de renseignements exploités par l’administration fiscale.
Cependant le Conseil a précisé que ces articles ne sauraient « permettre aux services fiscaux et douaniers de se prévaloir de pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions ultérieurement déclarées illégales par le juge ». De plus, concernant les perquisitions, le volet est censuré car contraire au principe de l’inviolabilité du domicile.
Le Conseil a donc fortement encadré et restreint cette nouvelle arme des administrations fiscales et douanières afin de remettre un peu d’équité avec le contribuable. On pouvait anticiper cette décision, dans la mesure où, dans tous les cas, il y a avait de forts risques que la Cour européenne des droits de l’homme ; si elle avait été saisie, applique l’article 6 de la CEDH.

2. Remise en cause de la garde à vue de 96 heures pour les crimes et délits fiscaux et douaniers

Le Conseil a invalidé l’extension, appliquée aux délits de fraude fiscale et douanière aggravés ainsi qu’aux délits de corruption et de trafic d’influence, de garde à vue réservé aux crimes et délits les plus graves prévus à l’article 706-88 du Code de procédure pénal. Cet article dispose que le délai de garde à vue peut être étendu à 96 heures avec un report de l’intervention de l’avocat jusqu’à la 48ème heure.

Les délits de fraude fiscale et douanière aggravés allaient donc cohabiter, sur le plan de la procédure pénale, avec les meurtres commis en bande organisée, crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée ; ou autres crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus.

Le Conseil considère que « les infractions énumérées par l’article 706-1-1, de corruption et de trafic d’influence ainsi que de fraude fiscale et douanière constituent des délits qui ne sont pas susceptibles de porter atteinte en eux-mêmes à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes ; qu’en permettant de recourir à la garde à vue selon les modalités fixées par l’article 706-88 du Code de procédure pénale au cours des enquêtes ou des instructions portant sur ces délits, le législateur a permis qu’il soit porté à la liberté individuelle et aux droits de la défense une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi ».
Le Conseil remet un peu de sérénité sur les débats concernant la fraude fiscale qui a été au cœur de l’actualité de cette année 2013.

Une ouverture pour les autres crimes et délits prévus à l’article 706-88 du Code de procédure pénale.

Si l’on reprend la lecture de l’article 706-88 du CPP, on retrouve certains crimes et délits comme le crime de vol commis en bande organisée, délit d’escroquerie en bande organisée ou également délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis en bande organisée et bien évidemment les, très sévèrement punis, crimes en matière de fausse monnaie.
Ces crimes et délits pourraient, à priori, ne pas être susceptibles de porter atteinte en eux-mêmes à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes.
Doit-on donc prendre le considérant du Conseil, comme étant la ligne directrice à suivre en matière d’extension de garde à vue, ce qui ouvrirait la voie à des QPC pour certains crimes et délits.

Gregory Groleas, Directeur Fiscal

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