Les cumuls de l’auto-entrepreneur.

Par Anissa Zaidi, Avocat.

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Explorer : # micro-entrepreneuriat # cumul d'activités # statut juridique # sécurité financière

Il est à supposer que le micro-entrepreneuriat a de beaux jours devant lui lorsque ce dernier est mis en lumière parallèlement à la tendance croissante des entreprises à l’externalisation. Ainsi, le besoin d’économies des uns pourrait faire le chiffre des affaires des autres.

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« Ah ! Micro-entrepreneur,
Toujours tu chériras tes heures,
Qui te permettent de t’enrichir,
Sans pour autant de ton emploi salarié te départir !
Mais il est d’autres cumuls qui te sont ouverts,
Ce statut n’ayant décidément pas fait les choses à l’envers ».

(Anissa Zaïdi !)

L’auto-entrepreneuriat, désormais dénommé micro-entrepreneuriat conformément au terme consacré par la loi Pinel, appartient à ces statuts dont le fonctionnement a tout pour plaire : autonomie, indépendance, charges limitées et simplicité d’usage avec notamment des coûts administratifs de déclaration d’activité minimisés.

En effet, pour bref rappel, le micro-entrepreneur est un entrepreneur individuel qui relève du régime fiscal de la micro-entreprise, ce qui lui permet notamment de régler ses charges sociales au fur et à mesure de ses rentrées de chiffre d’affaires, de payer l’impôt sur ses revenus en même temps que ses charges sociales par un système de versements libératoires.

Pour bénéficier du régime du micro-entrepreneur, le chiffre d’affaires annuel (pour une année commencée au 1er janvier) doit être au plus égal à :

82.200 euros pour :
- les activités de vente de marchandises, d’objets, de fournitures de denrées à emporter ou à consommer sur place,
- les prestations d’hébergement (hôtels, chambres d’hôtes, meublés de tourisme).

32.900 euros pour :
- les autres prestataires de services relevant des bénéfices industriels et commerciaux (BIC),
- les professionnels libéraux relevant des bénéfices non commerciaux (BNC).

Il est à supposer que le micro-entrepreneuriat a de beaux jours devant lui lorsque ce dernier est mis en lumière parallèlement à la tendance croissante des entreprises à l’externalisation. Ainsi, le besoin d’économies des uns pourrait faire le chiffre des affaires des autres.

Certains peuvent cependant être frileux au risque et hésitent à se lancer dans la grande aventure de l’entrepreneuriat par crainte de se retrouver dans une situation financière difficile.

Il est alors intéressant de connaître les possibilités de cumul autorisées par la loi qui permettent au micro-entrepreneur de s’installer tout en conservant une source de revenu moins aléatoire qu’une activité nouvellement créée.

Micro-entrepreneur et fonctionnaire

Même à temps plein, le fonctionnaire peut créer une activité complémentaire indépendante. Le cumul est possible mais sous réserve de respecter les conditions de cumul d’activités fixées par la loi :

  • Le fonctionnaire salarié à temps plein ou à temps partiel choisi :
    • Qui crée une activité complémentaire de création artisanale ou industrielle, de vente ou libérale : il convient dans ce cas que le fonctionnaire obtienne l’autorisation de sa hiérarchie. À l’heure actuelle, l’autorisation est valable deux ans et renouvelable une fois. À l’issue de ces trois ans d’exercice de l’activité, le fonctionnaire doit choisir entre l’activité qu’il a créée et son activité de fonctionnaire.
    • Qui crée une activité complémentaire dans les services suivants : expertise ou consultations, enseignements ou formations, menus travaux ménagers effectués chez des particuliers. Aucune limitation dans le temps n’est alors fixée, il convient simplement d’obtenir, ici encore, l’autorisation de la hiérarchie.
  • L’agent public à temps « incomplet » ou « non complet » : le temps partiel est ici imposé par l’administration. Les obligations du fonctionnaire se limitent alors à informer sa hiérarchie sur la nature de son activité complémentaire.

Micro-entrepreneur et portage salarial

Dans le portage salarial, le professionnel a un statut de salarié. Juridiquement, ses clients traitent avec la société de portage. Le micro-entrepreneur, quant à lui, est un véritable entrepreneur individuel inscrit au RNE (Registre national des entreprises), totalement indépendant juridiquement et cotisant au régime social des non-salariés.
Rien n’empêche un micro-entrepreneur d’être également « porté » : il pourra ainsi accepter certaines missions dans le cadre du portage salarial sans remettre en cause les avantages du régime du micro-entrepreneur.

Micro-entrepreneur et salarié à temps plein

Ce cumul est également possible, à condition de ne pas concurrencer son employeur de façon déloyale et de respecter sa clause d’exclusivité au-delà de la période de tolérance admise par la loi (1 an), lorsqu’il en existe une dans son contrat de travail ou sa convention collective.
De plus, les salariés doivent obtenir l’accord de leur employeur s’ils souhaitent exercer la même activité auprès des clients de celui-ci.
Par ailleurs, l’activité du micro-entrepreneur doit s’effectuer en dehors de ses heures de travail salarié, mais en revanche, elle n’est pas conditionnée à une limite horaire, comme c’est le cas dans le cadre d’un contrat de travail.

Micro-entrepreneur et artiste-auteur

Ce cumul n’est pas possible pour l’exercice d’une activité d’artiste-auteur car dans ce cas de figure le travailleur est affilié au régime général de la Sécurité sociale via la Maison des Artistes ou l’Agessa.
En revanche, s’il crée une activité artisanale, commerciale ou libérale distincte, le travailleur pourra exercer cette seconde activité sous le régime du micro-entrepreneur.

Micro-entrepreneur et agriculteur

Une personne qui exerce une activité agricole à titre principal peut exercer une autre activité indépendante, de nature commerciale, artisanale ou libérale, et bénéficier du régime du micro-entrepreneur pour cette seconde activité si elle y est éligible.

Micro-entrepreneur et chômeur

Toute reprise d’activité, qu’elle soit salariée ou non, doit être signalée à Pôle emploi. Le micro-entrepreneur devra donc déclarer ses revenus d’activité en tant que tel, même si au départ ils sont minimes.
Cela ne signifie pas pour autant que l’Aide au Retour à l’Emploi dont bénéficiait jusqu’à alors le chômeur nouvellement micro-entrepreneur va lui être supprimé : simplement Pôle emploi ne versera pas l’ARE complète mais un complément de revenu en fonction du chiffre d’affaires déclaré.

Le calcul est ainsi le suivant :

  • Pôle emploi applique un abattement pour frais professionnels sur le chiffre d’affaires déclaré :
    • 71% d’abattement si l’activité exercée est une activité de vente,
    • 50% s’il s’agit de prestations de services relevant des bénéfices industriels et commerciaux,
    • 34% s’il s’agit d’une activité libérale (bénéfices non commerciaux).
  • Pôle emploi soustrait ensuite de l’ARE mensuelle habituellement versée 70% du revenu d’activité après avoir appliqué l’abattement cité.

Seuls les jours correspondants au complément issu de ce calcul seront débités du compteur de l’allocataire.
Ainsi, le cumul de l’ARE et l’activité de micro-entrepreneur durera jusqu’à ce le compte de l’allocataire soit vide en terme de jours d’indemnisation auxquels il a droit.

Il est donc à espérer que ces cumuls autorisés par la loi encourageront les derniers frileux qui attendent, indécis, sur la ligne de départ de l’auto-entrepreneuriat.
Il n’est en effet pas de meilleure assurance que celle que l’on se fabrique, la meilleure façon de prédire le futur étant encore de le créer.

Sources :
- https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F23961
- https://www.afecreation.fr/pid199/questions-frequentes.html?idfaq=5409-5447#detailfaq
- https://www.afecreation.fr/pid10623/changer-de-regime.html&pagination=1

Anissa ZAIDI
Avocat à la Cour et fondatrice du cabinet A/Z Avocats

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Discussions en cours :

  • par Myriam , Le 20 février 2017 à 16:17

    Bonjour

    Je suis militaire et je suis également, depuis peu, un auteur auto-édité. Je vends mes livres (papier et numérique) sur internet, uniquement via Amazon, et quelques livres papier dans des librairies...
    Je souhaiterai donc créer une auto-entreprise en m’appuyant sur cet article
    « La production des œuvres de l’esprit au sens des articles L. 112-1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle s’exerce librement, dans le respect des dispositions relatives au droit d’auteur des agents publics et sous réserve des dispositions de l’article 26 de la présente loi. » (Article 26, par lequel vous êtes tenu au respect du secret professionnel).

    Ai-je le droit et pendant combien de temps ?
    Je dois dire que je suis complètement perdue...

    Merci beaucoup

  • par Jérôme Contournier , Le 27 décembre 2016 à 14:44

    Bonjour,

    Je suis Informaticien Fonctionnaire ITRF (dans l’Education Supérieure, fonction publique d’Etat) et une école privée me propose de donner des cours en informatique ponctuellement. Je dois pour cela faire des factures de prestation, et par conséquent créer un statut de micro-entrepreneur.
    En ai-je le droit ? Est ce que je risque des sanctions pour le cumul d’activité même si c’est pour quelques dizaines d’heures annuelles ?

    Merci beaucoup pour votre intérêt et votre réponse
    Jérôme

  • Merci pour l’article : Je voudrais vous faire partager mon vécu en la matière en tant que micro entrepreneur et vous apporter quelques précisions à votre excellent article sur le cumul statut de micro entrepreneur et chômeur et aborder le cas de la personne salariée qui était micro-entrepreneur avant d’être au chômage. Dans ce cas là, elle aura le droit à la totalité de ses jours d’indemnisation ( 730 jours) et cumulera ses indemnités chômage avec ses revenus issus de son activité de micro entrepreneur. Pôle emploi considére qu’elle est au chômage avec une "activité conservée". Elle devra simplement fournir à pôle emploi une copie de sa déclaration au CFE et chaque mois ou trimestre sa déclaration faite au RSI (déclaration de son CA). Cependant, cela se complique un peu avec l’obligation qui a été faite au auto entrepreneur de s’immatriculer au RCS. En effet, prenons mon cas pour bien comprendre : auto-entrepreneur en décembre 2013, chômeur en juillet 2015 et transformation de mon auto entreprise en micro entreprise au cours du mois d’octobre 2015. Résultat : Il faudra apporter la preuve de la création de votre activité en fournissant une copie de la fiche INSEE (certificat d’inscription au répertoire des entreprises et des établissements). Le CCI ne reconnait les micro entreprises qu’à la date où elles ont obtenu leur numéro de SIREN. Dans mon cas, impossible donc d’avoir une déclaration au CFE antérieure à 2015.
    Or, cette fiche INSEE pose un problème d’interprétation : il y a deux informations qui peuvent être mal interprétées. Dans la fiche INSEE dans la rubrique "description de la personne", il y a une date de prise d’activité. Date de prise d’activité que l’on retrouve dans une autre rubrique intitulée "description de l’établissement concerné". Or, ce n’est pas la même date : la première correspond à la création de l’auto entreprise et la seconde correspond à l’enregistrement au RCS de l’auto entreprise qui la transforme en micro entreprise. Pôle emploi semble prévilégier la date de prise d’activité de l’établissement. Ce qui fait que je ne suis plus considéré comme chômeur avec une "activité consevée". Par conséquent, je me retrouve dans l’hypothèse où le pôle emploi recalcule mes droits par rapport à ce que je déclare auprès du RSI. Attention les droits qui ne sont pas perdus mais simplement repoussés. Dans mon cas, je viens de réussir à repousser dejà 4 mois mes droits pour la première année d’indemnisation. Mes droits devaient se terminer en décembre 2017. Ils sont repousés fin avril 2018. Véritable confort pour des personnes comme moi qui ont un projet d’entreprise nécessitant du temps. La question que je me pose c’est que dans ce système, on peut rester pendant plusieurs années chômeurs ? A bientôt.

  • Bonsoir,

    Merci pour votre article intéressant.

    "Micro-entrepreneur et salarié à temps plein
    Ce cumul est également possible, à condition de ne pas concurrencer son employeur de façon déloyale et de respecter sa clause d’exclusivité au-delà de la période de tolérance admise par la loi (1 an), lorsqu’il en existe une dans son contrat de travail ou sa convention collective", cela veut-il dire que pendant un ana on ne peut pas être micro-entrepreneur ou si on l’est, l’employeur doit l’accepter pendant un an (à condition qu’on ne soit pas concurrent bien sûr).

    Merci de votre réponse

    Laurence

    • par Me Anissa ZAIDI , Le 8 septembre 2016 à 18:08

      Bonjour Laurence,
      La concurrence déloyale consisterait, pour le salarié, à exercer, dans le cadre de son activité de micro-entrepreneur la même activité que celle effectuée pour son employeur et pour les clients de ce dernier.
      Le salarié qui souhaiterait donc devenir également micro-entrepreneur ne doit pas exercer la même activité que celle pour laquelle il est embauché ni auprès des clients de son employeur.
      La clause d’exclusivité, quant à elle, ne doit pas être confondue avec l’obligation de non concurrence déloyale puisqu’il s’agit de deux volets distincts.
      Tous les contrats de travail ne contiennent pas nécessairement de clause d’exclusivité mais dans le cas où il en existe une, l’employeur réclame alors au salarié qu’il lui réserve la totalité de sa disponibilité professionnelle et de ses compétences sans pouvoir travailler ailleurs.
      Cependant, dans ce cas de figure (existence d’une clause d’exclusivité), un "sursis" d’une durée d’un an bénéficie alors au salarié qui souhaite créer une entreprise : la clause d’exclusivité ne lui est pas opposable durant cette période. Donc, cela signifie au contraire que durant un an, il est possible d’être micro-entrepreneur.
      Il convient alors d’obtenir l’accord de l’employeur uniquement si le salarié souhaite, dans sa micro-entreprise, exercer la même activité auprès des clients de son employeur.
      Dans tous les cas, il convient de garder en mémoire que le salarié reste tenu pendant l’exécution de son contrat de travail, à l’obligation générale de loyauté vis-à-vis de son employeur.
      Il doit donc s’abstenir de :
      démarcher les clients de son employeur,
      réaliser des tâches liées à son auto-entreprise durant ses heures de travail,
      évitez les conflits d’intérêts.
      En espérant vous avoir apporté l’éclairage souhaité.

  • Dernière réponse : 5 septembre 2016 à 17:05
    par John , Le 2 septembre 2016 à 23:38

    Qd est il des Gerants de societe morale qui veulent travailler en auto ???!
    merci

    • par Maître Anissa ZAIDI , Le 5 septembre 2016 à 11:33

      Bonjour John,

      C’est en effet un cas particulier que celui du gérant de société.

      C’est alors le critère de l’affiliation au RSI qui est déterminant : tout dépend donc du statut du gérant au sein de la société.

      - Les gérants TNS, étant nécessairement inscrits au RSI, sont de fait exclus du régime du micro-entrepreneuriat.
      - Les gérants assimilés salariés, en revanche, voient ce régime leur être ouvert et peuvent donc cumuler les deux statuts.

    • par David , Le 5 septembre 2016 à 17:05

      Bonjour
      je suis à la recherche d’une réponse claire à ma recherche mais les avis divergent.
      je suis policier en horaire de nuit et je souhaite intégrer un reseau de mandataire immobilier sous le statut d’auto entrepreneur ou micro entrepreneur.
      Je suis en temps complet au sein de l´administration. Ce cumul d’activité serait excercé sur mes congés et repos..Il semble que la modification de loi d’avril 2016 initiée par Maryse Lebranchu m’interdise cette création d’entreprise et de cumul d’activité. Pouvez me confirmer cet état de fait pour m’éviter des démarches inutiles au niveau de ma chère administration. Auriez vous une solution légale qui me permette d’accéder au cumul d’emploi fonctionnaire temps complet et de mandataire,négociateur, chasseur immobilier ou autre quel que soit le statut. Je vous adresse mes sincères remerciements.

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