Ladite loi, dite loi de modernisation de l’économie, avait deux objectifs : tout d’abord simplifier et améliorer les procédures de délivrance et d’enregistrement des titres de propriété industrielle, et par ailleurs mettre les textes français en conformité avec le traité d’harmonisation sur le droit des brevets (dit PLT), et le protocole additionnel aux conventions de Genève pour les marques.
En matière de brevets, les principales modifications apportées sont les suivantes :
• Selon le nouvel article L.612-2, les revendications ne seront plus exigées pour se voir attribuer une date de dépôt. Ceci constitue une nouveauté de taille, qui permet de déposer seulement une description, en fournissant ultérieurement les revendications. Cependant, sur le plan pratique, la rédaction des revendications, d’importance fondamentale, demande le plus grand soin et requiert des compétences particulières. En outre, les revendications déposées ultérieurement seront "limitées" ou restreintes à la description déjà déposée, sur laquelle elles doivent s’appuyer. Ainsi, hormis quelques cas (rarissimes) d’extrême urgence, on ne peut que déconseiller de faire usage de cette possibilité.
• En conséquence de cette modification, le décret n°1472 précise les modalités visant à compléter la demande après le dépôt (nouvel article R.612-9).
• En outre, le décret n°1471 énonce les conditions de limitation ou de renonciation prévues par ladite loi.
• Les articles R.624-1 à R.624-7 sont abrogés, dispensant ainsi les entreprises, organismes et personnes physiques domiciliées en France de déclarer à l’INPI les contrats de cession de droits de propriété industrielle passés avec des entités étrangères, et d’adresser à l’INPI les relevés annuels des montants y afférents.
• Les déposants de demandes de brevet français revendiquant la priorité d’un dépôt étranger, n’auront pas à fournir de "copie officielle" de la demande antérieure, selon le nouvel article L.612-7, mais devrons en "justifier l’existence".
• Désormais, les déposants ne pourront plus différer l’établissement du rapport de recherche jusqu’à dix-huit mois après le dépôt, selon le nouvel article L.612-15. Tout déposant devra donc acquitter la taxe de rapport de recherche dans le mois de dépôt.
• En matière de restauration des droits (restitutio in integrum), en cas de défaut d’observation d’un délai, deux changements majeurs :
Les deux procédures de restauration, initialement prévues pour respectivement les délais relatifs aux annuités, et certains autres délais, sont maintenant unifiées en une seule procédure de restauration.
De temps immémoriaux, le délai de priorité (pour procéder à des dépôts à l’étranger sur la base d’un dépôt d’origine) était exclu de la restauration des droits. Le nouvel article L.612-16-1 permet maintenant au déposant qui n’a pas respecté ce délai (de 12 mois), et s’il bénéficie d’une excuse légitime, de déposer une requête en restauration de ses droits, dans les deux mois de l’expiration dudit délai de priorité. Reste à espérer que l’INPI et les juridictions continuent à appliquer ce principe de la restauration de manière très restrictive et exigeante au regard des faits, faute de quoi la sanction de l’inobservation des délais serait vidée de sens, mettant ainsi en péril la sécurité juridique nécessaire à l’équilibre entre les droits respectifs des déposants et des tiers.
Concernant les marques, trois dispositions sont à retenir :
• Le texte vient trancher un débat né de la contradiction entre deux textes relatifs au relevé de déchéance en prévoyant qu’il n’est pas applicable au renouvellement mais aux seuls délais relatifs aux demandes de marques (article L.712-10).
• Les demandes de suspension de procédures d’opposition sont encadrées dans leurs modalités. Elles ne peuvent excéder six mois, comme c’était déjà le cas auparavant, mais les parties ne peuvent plus choisir la durée de suspension initiale et des prolongations suivantes. Cette durée est désormais de trois mois renouvelable une fois (article L.712-4 al 3 c).
• Le délai pour former opposition contre une marque internationale désignant la France a été raccourci mais son calcul simplifié puisqu’il court désormais à compter de la publication de la marque au bulletin international et non plus à partir du premier jour du mois suivant la réception du bulletin par l’INPI (article R.717-5).
Le rapport au Président la République accompagnant l’ordonnance rappelle l’importance de la propriété intellectuelle pour le développement de l’économie, au point d’en faire une des priorités de l’action gouvernementale.
On ne peut bien entendu que souscrire à ces déclarations, et espérer que les moyens envisagés à cette fin aillent au-delà de ceux exprimés dans la loi et son ordonnance d’application.
Aurélie LE BLAYE & Frédéric WAGRET
Cabinet WAGRET, Conseils en Propriété Industrielle
(*) Ces décrets portent application pour l’un de l’ordonnance nº2008-1301 du 11 décembre 2008, annoncée par l’article 134 de la loi nº2008-776 du 4 août 2008 (dite loi de modernisation de l’économie) et pour l’autre du VI de l’article 132 de cette même loi.