[Tribune] La procédure "d'impeachment" de la Présidente sud-coréenne et ses conséquences. Par Vincent Ricouleau, Professeur de Droit.

[Tribune] La procédure "d’impeachment" de la Présidente sud-coréenne et ses conséquences.

Par Vincent Ricouleau, Professeur de Droit.

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Pour quelles raisons la présidente de la Corée du Sud, Madame Park Geun-hye, a-t-elle été destituée et placée en détention ? Que prévoit la constitution sud-coréenne ? Quelles sont les conséquences sur la politique inter-coréenne et en droit international ? Comment la Corée du Sud déstabilisée peut-elle faire face à la Corée du Nord nucléarisée qui vient une nouvelle fois de lancer un missile ? Comment contraindre la Corée du Nord à respecter les résolutions du conseil de sécurité de l’ONU ? La Corée du Sud est-elle davantage entre les mains de Donald Trump et de Xi Jinping qu’entre les mains de son (futur) président ?

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La sixième république de la Corée du Sud naît en 1988, suite à nombre de mouvements sociaux secouant tout le pays.

La loi de révision constitutionnelle a été adoptée par l’Assemblée nationale le 12 octobre 1987. Elle a été approuvée lors d’un référendum par 93 % des citoyens le 28 octobre 1987. Elle est entrée en vigueur le 25 février 1988 avec Roh Tae-woo, président de 1988 à 1993.

L’histoire politique sud-coréenne pour le moins tumultueuse, est ponctuée notamment par des coups d’Etat et des scandales judiciaires.

Le parcours de certains des onze présidents depuis 1948 est évocateur d’un pays qui a réussi son décollage économique mais qui cherche sa voie vers la démocratie.

Le président ne peut être poursuivi pour une infraction pénale au cours de son mandat sauf pour insurrection ou trahison nous dit l’article 84 de la constitution actuelle.

Rappelons le palmarès de certains présidents.

Chun Doo-hwan, président de 1980 à 1988, a été condamné à mort pour le massacre de Gwangju en mai 1980, puis condamné à 20 ans de prison et enfin, gracié par le président Kim Young-sam.

Roh Tae-woo, président de 1988 à 1993, a été condamné pour trahison, mutinerie et corruption à 22,5 ans de prison puis en appel à 17 ans pour finalement être gracié en décembre 1997 par le président Kim Young-sam.

Roh Moo-Hyun, président de 2003 à 2008, accusé de corruption et cible d’enquêtes judiciaires, s’est suicidé en se jetant d’une montagne.

C’est au tour de Madame Park Geun-hye de subir les foudres de la justice.

La suspension de la Présidente par l’Assemblée Nationale.

Le 9 décembre 2016, l’Assemblée nationale de la Corée du sud, la Gukhoe, parlement monocaméral composé de trois cent députés, vote la suspension pour corruption et atteinte aux intérêts de l’Etat, de la présidente Mme Park Geun-hye au pouvoir depuis le 25 février 2013, par 234 voix contre 56.

L’article 65 de la constitution.

L’Assemblée nationale a appliqué l’article 65 de la Constitution précisant que si le Président, le Premier ministre, les membres du gouvernement, les chefs des département ministériels, les juges de la Cour constitutionnelle, les membres de la Commission de contrôle des élections, les membres du Conseil d’audit et de contrôle, et les autres hauts fonctionnaires désignés par la loi ont violé la Constitution ou la loi dans l’exercice de leurs fonctions officielles, l’Assemblée nationale peut décider de les mettre en accusation [devant la Cour constitutionnelle].

Une motion de mise en accusation peut être proposée par un tiers au moins des députés. Elle est approuvée à la majorité de tous les membres de l’Assemblée nationale. Cependant, une motion de mise en accusation du Président doit être proposée par la majorité de tous les députés. Elle est approuvée à la majorité des deux tiers au moins de tous les membres de l’Assemblée nationale.

Toute personne contre qui une motion de mise en accusation a été votée est suspendue de l’exercice de ses fonctions jusqu’à ce qu’elle ait été jugée.

La décision de mise en accusation ne concerne que la révocation de la fonction publique. Cependant, elle ne dispense pas la personne révoquée de toute responsabilité civile ou pénale.

La destitution par la Cour constitutionnelle.

La Cour constitutionnelle coréenne, régie par les articles 111 et suivants de la constitution, est composée de neuf juges.

Elle doit valider la suspension par l’Assemblée nationale de la présidente pour proclamer la destitution, prononçant ainsi l’impeachment.

La Cour constitutionnelle doit appliquer la jurisprudence Roh Mu-Hyun KCCR May 14 2004 : « a request of impeachment of a president is rejected unless the charges constitute grave violation of law ».

La présidente de la Cour constitutionnelle, Mme Lee-Jung-mi a annoncé le 10 mars 2017, en direct à la télévision, la validation de la destitution de la présidente à l’unanimité des juges.

Treize chefs d’accusation, dont celui de corruption, après audition de 25 témoins, trois audiences préliminaires, 17 audiences contradictoires, sont retenus.

Une grande partie du pays est sous le choc.

Un interim assuré par le Premier Ministre.

La présidente étant destituée, il faut organiser conformément à la constitution la vacance du pouvoir.

L’article 68 dit que le successeur du président sortant est élu de 70 à 40 jours avant la fin du mandat de celui-ci.

En cas de vacance du poste de président ou si le président élu décède ou s’il est invalidé par une décision judiciaire ou pour toute autre raison, un successeur est élu dans les 60 jours.

L’article 71 de la constitution précise que si la présidence est vacante ou le président est incapable d’exercer ses fonctions pour quelque raison, le Premier ministre ou les membres du gouvernement dans l’ordre de leur nomination assurent l’intérim.

Le Premier ministre Hwang Kyo-ahn assure par conséquent l’intérim jusqu’à la tenue d’une élection présidentielle, dans un délai de 60 jours.

Les futures élections présidentielles sont prévues le 9 mai 2017.

Si le Premier ministre décidait de démissionner, pour se présenter à l’élection présidentielle, son ministre des finances le remplacerait.

Le placement en détention de l’ex-Présidente.

Après de multiples auditions et une défense inadaptée consistant à nier les preuves, Mme Park Geun-hye est placée en détention par le juge Kang Bu-yeong à la prison de Uiwang, dans la province de Gyeonggi.

Une grande partie de la Corée du Sud se mobilise, réclamant justice et transparence, et approuve la mise en détention.

La mise en détention est motivée notamment par la préservation des preuves des charges pesant sur l’ex-présidente et son entourage.

Les procureurs possèdent de multiples preuves, notamment des agendas. Ils possèdent aussi des enregistrements téléphoniques. Certaines archives ont été saisies au palais présidentiel, qu’on appelle « la Maison Bleue ».

Le statut juridique des archives est contesté par la défense de Park Geun-hye. Ces archives ont été placées aux National Archives of Korea.

Les juges coréens se préparent à un procès très complexe au retentissement politique majeur tant en politique intérieure qu’en politique internationale avec une Corée du Nord nucléarisée, plus menaçante que jamais, exigeant une Corée du Sud unie et stable.

Un destin politique tragique.

Comment la onzième présidente mais aussi la première femme présidente de Corée du Sud, née le 2 février 1952, députée de 1998 à 2012, ancienne présidente du Grand Parti National, se retrouve dans une cellule de 6,56 m2, provoquant ainsi une crise politique exceptionnelle en Corée du sud et des élections présidentielles anticipées le 9 mai prochain ?

L’ex-présidente se retrouve isolée politiquement à part le soutien d’une vieille garde toujours fidèle. La formation politique da la présidente destituée était le Saenuri. Beaucoup de ses représentants la quittent pour rejoindre le Bareun.

Le destin de cette ex- présidente n’est pas tout à fait ordinaire.

La fille du dictateur Park Chung-hee.

L’ex-présidente Park Geun-hye est la fille du président dictateur, Park Chung-hee, arrivé au pouvoir après un coup d’Etat en 1961.

Park Chung-hee gouverne le pays jusqu’en 1979 avec des méthodes dictatoriales.

La mort tragique des parents de l’ex-Présidente.

Le 15 août 1974, au théâtre national de Séoul, un homme tente d’assassiner le président dictateur en plein discours, tirant plusieurs balles avec une arme de poing, avant d’être arrêté.

La Commission Réconciliation et Liberté n’a pas réuni officiellement les preuves de l’implication de la Corée du Nord mais les suspicions sont très grandes.

Le dictateur sort indemne de l’attentat.

Mais son épouse, Yuk Yeong-su, (la mère de la présidente destituée et incarcérée), assise en retrait à quelques mètres de la tribune, meurt d’une balle en pleine tête.

La vidéo de l’attentat nous montre une scène irréaliste. Le président dictateur, poursuit son discours, après s’être caché derrière son pupitre pour échapper aux balles. Il est impassible devant l’évacuation de son épouse que les neuro-chirurgiens tenteront de sauver en vain.

La présidente destituée, alors étudiante à Grenoble, arrive à Séoul en catastrophe.

Elle jouera tant bien que mal le rôle de première dame.

La Corée du Sud, miracle économique avec ses chaebols, est alors minée par des luttes de pouvoir, de clans, par la corruption, le népotisme, le favoritisme, les ingérences et les déstabilisations de la Corée du Nord.

Le président dictateur est assassiné à son tour le 26 octobre 1979 par le chef des services secrets sud-coréens, la Korean Central Intelligence Agency, (KCIA).

L’ex-présidente Park Geun-hye perd ainsi tragiquement sa mère en 1974 et son père en 1979, disparitions dont elle ne se remettra jamais.

Sa carrière politique se construit pourtant progressivement jusqu’à son élection au sommet de l’Etat.

Probablement aurait-elle pu éviter le pire sans la rencontre d’une femme coréenne, Choi Soon-sil.

L’influence de Choi Soon-sil.

Choi Soon-sil, née en 1946, est la fille d’un chaman, Choi Tae-min, chef de l’église de la vie éternelle.

Choi Soon-sil aurait hérité de certains dons de son père, capable selon lui, de communiquer avec les esprits des morts. Elle prétend parler avec Yuk Young-soo, la propre mère défunte de l’ex- présidente destituée.

En réalité, Choi Soon-sil se sert de ses prétendus dons pour pénétrer les arcanes du pouvoir.

Elle devient une sorte de « Raspoutine », conseillère occulte, sans poste officiel dans l’organigramme de l’Etat sud-coréen, omniprésente, toute puissante dans le processus décisionnel de l’ex-présidente coréenne.

Elle succombe rapidement aux tentations du pouvoir, dont celles de s’enrichir aux dépens des chaebols en vendant son influence politique.

Selon les juges, elle aurait soutiré aux chaebols coréens les plus puissants, dont Samsung, Hyunday, LG, Daewo, plus de 60 millions d’euros. 52 groupes industriels auraient versé des sommes en échange d’appuis politiques. Les enquêtes en cours réservent probablement encore beaucoup de surprises.

La nature de l’argent donné par des chaebols à deux « Shady Foundations », Mir et K-Sports, de Choi Soon-sil n’a pas été juridiquement qualifiée par la Cour constitutionnelle.

Le parquet devra démontrer un accord entre les protagonistes.

Mais nul ne doute que les versements des chaebols permettaient des appuis politiques facilitant investissements, fusions, restructurations, contrats…

Qu’en est-il de la corruption des chaebols en rappelant que le vice-chairman de Samsung Electronics, Lee Jae-yong, fils du président Lee Kun-hee, est aussi incarcéré ? Les enquêtes se poursuivent. Les auditions et les mises en examen se multiplient. La gangrène de la corruption touche la Corée mais aussi toute l’Asie tout en épargnant relativement Singapour.

Choi Soon-sil est arrêtée le 30 octobre 2016 à Séoul et placée en détention. Sa fille est arrêtée au Danemark en janvier 2017. Leurs avoirs sont saisis.

La justice sud-coréenne démontre jusqu’à présent sa détermination.

Les atteintes à la liberté d’expression et à la vie d’artistes.

La corruption, le favoritisme et l’atteinte aux intérêts de l’Etat ne sont pas les seuls chefs d’accusation dont répond l’ex-présidente.

Plusieurs milliers de musiciens, d’acteurs, de réalisateurs, de danseurs, d’écrivains, dont Han Kang, qui a reçu en 2016 le Man Booker Price, ont été victimes de violations de leur vie privée, notamment d’écoutes téléphoniques et d’atteintes à la liberté d’expression.

Beaucoup ont été écartés de manifestations culturelles ou interdits de subventions pour des raisons politiques. La ministre de la culture Cho Yoon-sun a été incarcérée, provoquant un scandale de plus.

L’ex-présidente préservait ainsi son pouvoir en favorisant les partisans de sa politique. Elle sera aussi jugée sur ces faits, multipliant les risques d’une lourde condamnation.

Mais une chose est certaine, l’opinion publique sud-coréenne est lasse de tant d’atteintes à la démocratie. Elle aspire à une démocratie pleine et entière.

Les futures élections présidentielles.

Le président sud-coréen est élu au suffrage universel pour cinq ans (article 67). Il n’est pas rééligible (article 70).

L’ancien secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a renoncé à se présenter aux élections présidentielles du 9 mai 2017, préférant un poste de professeur à Harvard.

Par contre, l’ex-avocat des droits de l’Homme, le gagnant des quatre primaires de son parti, le Démocratic Party of Korea, Moon Jae-in, se présente aux élections avec de grandes chances de succès.

Moon Jae-in s’était incliné en 2012 devant Park Geun-hye.

Il émet des hypothèses en matière de stratégie qui pourraient inquiéter les alliés de la Corée du Sud, à commencer par les Américains, disposant d’environ 28 000 hommes sur le territoire coréen et garant de la sécurité du pays.

En pleine campagne présidentielle, Moon Jae-in n’hésite pas à se recueillir sur les tombes de Roh Moo-hyun et de Syngman Rhee, appelant ainsi l’électorat plus que conservateur à voter pour lui.

Quelle politique Moon Jae-in adoptera-t-il s’il est élu, vis-à-vis de la Corée du Nord ?

Une normalisation via un traité de paix ? Une coexistence pacifique renforcée ? Fera-t-il une visite officielle ? Prendra-t-il des sanctions ? Sera-t-il l’homme des Américains et d’une nouvelle course aux armements ? Quelle marge de manœuvre aura-t-il ? L’incertitude règne car la menace nord-coréenne appelle un Etat sud-coréen stable politiquement.

Le déploiement des THAAD source de grande tensions avec la Chine.

Les Américains ont déployé sur le territoire sud-coréen des missiles THAAD (Terminal High Altitude Area Defense).

Ces missiles ont pour fonction d’intercepter tout type de missile balistique, incluant les armes de destruction massive.

Quelques précisions sont nécessaires pour bien comprendre l’impact de cette décision tant en politique intérieure qu’en droit international.

Les THAAD sont interopérables avec les autres systèmes de défense contre les missiles balistiques, les Patriot, les Pac-3 et les AEGIS.

Les THAAD ne sont pas des nouvelles armes. Ils sont déjà déployés à Guam depuis avril 2013.

Les THAAD sont au nombre de 72 par batterie, permettant ainsi de répondre à une attaque massive nord-coréenne.

Rappelons que la Corée du Nord a lancé un nouveau missile balistique de moyenne portée de type KN-15 le 4 avril 2017.

Lockeed Martin, le constructeur des THAAD, publie sur son site des vidéos sur les lanceurs. On voit parfaitement leur puissance et leur mobilité.

Les drones Grey Eagle capables d’emporter 4 Hellfire (missiles air-sol) sont aussi déployés en Corée du Sud.

1.500 soldats sont formés à l’utilisation des THAAD sur la base militaire de Fort Bliss, au Texas, voisine de White Sands Missile Range.

Fort Bliss est emblématique. A Fort Bliss s’est déroulée une grande partie de l’histoire des missiles américains. En 1946, de nombreux savants nazis, exfiltrés d’Allemagne, sont chargés de travailler sur les projets militaires américains dans le cadre de l’opération Paperclip.

A Fort Bliss, sont aussi formés actuellement les officiers de la German Air Force Air Defense.

La Corée du Sud est si dépendante des Etats-Unis pour sa défense que le futur président sud-coréen aura du mal à prôner une quelconque indépendance militaire.

Le résultat est que la crise éclate avec la Chine.

Les représailles de la Chine.

Pour bien saisir l’opposition des Chinois à l’installation des THAAD, il faut préciser que les radars américains (les X-Band Radar - Radars en bande) utilisés pour détecter les missiles ennemis couvrent une partie du territoire chinois.

Le déploiement des THAAD et des radars remettent donc en question l’efficacité d’une offensive potentielle chinoise.

En représailles au déploiement des THAAD, la Chine a interdit les tours opérators en Corée du Sud. Elle a ordonné de multiples contrôles fiscaux des entreprises coréennes installées en Chine.

Les représailles concernent tout particulièrement le groupe Lotte ayant mis à la disposition de l’armée américaine des terrains pour les lanceurs. Le président du groupe Lotte, Shin Dong-bin est interrogé aussi par la justice sud-coréenne pour des faits de corruption et de trafics d’influence.

Une résolution parlementaire contre la Chine.

La Corée du Sud fait toutefois front contre la Chine, ce qui n’est pas si fréquent.

Les leaders des cinq principaux partis, the Democratic Party of Korea, the Liberty Korea Party (LKP), the People ‘s party, the Bareun Party et the Justice Party ont en effet voté une résolution parlementaire afin de résister aux mesures de rétorsion chinoise.

L’objectif est d’échapper au chantage économique chinois en facilitant le tourisme en Corée des ressortissants des autres pays de l’ASEAN.

Mais n’oublions pas que la constitution nord-coréenne prévoit que la Corée du Nord est un « Etat nucléaire », ce qui complique la situation.

La Constitution de la Corée du Nord.

A plusieurs reprises, la Corée du Nord a violé le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) entré en vigueur le 5 mars 1970. Elle a signé le TNP en 1985 mais l’a quitté le 10 janvier 2003. La Corée du Nord a réalisé cinq tests nucléaires dont un en janvier 2016 et un en septembre 2016. Une des questions est de savoir si la Corée du Nord possède la bombe nucléaire à hydrogène. Les experts du "38 North" estiment le risque d’un sixième essai important.

La dénucléarisation de la Corée du Nord, prioritaire et urgente, s’avère vraiment d’une grande complexité.

La constitution nord-coréenne, révisée lors de la session parlementaire du 13 avril 2012, précise en effet que « le président du comité de la défense nationale, Kim Jong-il, a fait de notre pays un Etat invincible en termes d’idéologie politique, un Etat doté de l’arme nucléaire et une présence militaire indomptable, ouvrant ainsi la voie à la constitution d’une nation forte et prospère ».

Les prérogatives du président du Comité de la défense nationale, le président de la Corée du Nord, sont prévues aux articles 100 à 111 de la constitution nord-coréenne.

La précédente version de la constitution, révisée le 9 avril 2010, ne comportait pas les termes « Etat doté de l’arme nucléaire ».

Les armes nucléaires nord-coréennes apparaissent ainsi comme des armes offensives et de dissuasion mais aussi comme des armes « identitaires » participant au culte de la personnalité du dirigeant, à l’idéologie étatique et à sa survie politique.

Quel que soit le nouveau président sud-coréen, la constitution nord-coréenne est un obstacle à toute négociation sur la dénucléarisation. Comment en effet modifier la constitution nord-coréenne ?

Il est intéressant pour comprendre le contexte coréen actuel de rappeler quelques éléments sur certaines origines du problème nucléaire.

Les racines de la nucléarisation de la péninsule coréenne.

La guerre de Corée (1950-1953) a causé trois millions de morts dont beaucoup de civils.

The korean Armistice Agreement est signé le 27 juillet 1953 à Panmunjom, par le général américain William Harrison JR, représentant la coalition de l’ONU et par le général Nam II, représentant non seulement la Corée du Nord mais aussi les « volontaires » chinois.

La Chine n’était pas officiellement en guerre mais a envoyé des centaines de milliers de « volontaires » combattre les Américains.

Aucun véritable traité de paix n’a pu être signé depuis 1953, malgré nombre de commissions et de négociations.

La frontière entre les deux Corées fait 239 kilomètres de long et quatre mètres de large. La zone démilitarisée correspond par conséquent à la ligne de cessez-le-feu fixée le 27 juillet 1953.

L’article 13 (d) du Korean Armistice Agreement.

L’article 13 (d) du Korean Armistice Agreement, (armistice de Panmunjeom) rappelait un principe fondamental : "Neither side introduce new weapons into Korea, other than piece-for-piece replacement of equipment”.

En septembre 1956, the US Chairman of the Joint Chiefs of Staff, l’Amiral Radford, annonce pourtant l’introduction d’armes nucléaires en Corée du Sud, décision validée par Dwight Eisenhower et le Conseil national de sécurité.

L’article 13 (d) est abrogé pour des raisons politiques et militaires, ouvrant la voie à la nucléarisation de la péninsule, dans un contexte de guerre froide.

Les missiles MGR-1 John Honest et MGR-1 Matador, parmi d’autres armes, arrivent en Corée du Sud en janvier 1958.

La course aux armements nucléaires dans la péninsule coréenne ne cessera pas pour aboutir à la situation extrême actuelle, quasi inextricable.

Le nouveau président sud-coréen pourrait tenter de relancer le projet de signer un accord de paix avec la Corée du Sud.

L’échec des résolutions de l’ONU.

Le nouveau président sud-coréen devra faire face à l’inefficacité du droit international.

Le secrétaire d’Etat américain, Rex Tillerson ex-PDG de Exxon Mobil, lors de sa récente visite en Asie, a clairement dénoncé l’échec politique de « la patience stratégique » de Barack Obama.

Mais que propose Donald Trump sinon une mise en garde à la Corée du Nord ? Son entretien avec le président Xi Jinping aux Etats-Unis à Mar-a-Lago le 5 avril 2017 signifie-t-il une collaboration entre Américains et Chinois pour empêcher la Corée du Nord de commettre l’irréparable et éviter une réplique coréenne, américaine ou japonaise ?

Comment le futur président sud-coréen peut-il peser dans ces négociations informelles ?

Le Conseil de sécurité de l’ONU a émis six séries de sanctions internationales depuis dix ans à l’encontre de la Corée du Nord. Les pourparlers à 6 (Corée du Nord, Corée du Sud, Etats-Unis, Chine, Japon, Russie) ayant existé de 2003 à 2009 ont tous échoué.

Les résolutions 2270 et 2321 du Conseil de sécurité.

Le Conseil de sécurité a voté les résolutions 2270 du 24 mars 2016 et 2321 du 30 novembre 2016.

Les restrictions frappant la Corée du Nord concernent l’exportation de charbon, de cuivre, de nickel, d’argent et de zinc.

La résolution 2321 interdit aussi l’entrée sur le territoire nord-coréen de matières illicites, en empêchant désormais Pyongyang de « masquer les pavillons de ses vaisseaux en hissant celui d’autres pays. »

Le rapport du comité de suivi des sanctions de l’ONU.

Mais le rapport du Comité de suivi des sanctions de l’ONU du 5 mars 2017 montre que la Corée du Nord vend notamment des armes à l’Erythrée, au Congo, à l’Angola, à l’Ouganda, au Mozambique, à l’Egypte.

La Corée du Nord utilise des intermédiaires et des pavillons de complaisance pour continuer à exporter et à importer. Beaucoup d’intermédiaires sont chinois, connus des services secrets de tous les pays concernés.

The House Foreign Affairs Committee, présidé par le républicain, Ed Royce, a annoncé fin mars un renforcement des sanctions économiques et financières.

Toutefois, les spécialistes sont pessimistes, suspectant la Chine de continuer à appuyer Pyongyang, malgré des déclarations apaisantes.

Conclusion.

L’ex-présidente Park Geun-hye restera-t-elle incarcérée jusqu’à son procès ? Ou sera-t-elle assignée à résidence ?

Quand aura lieu son procès ?

Qu’en ressortira-t-il ?

Elle risque plusieurs dizaines d’années de prison. En cas de condamnation, sera-t-elle graciée par son successeur comme les autres présidents ? Ou sera-t-elle la première présidente à exécuter sa peine ?

S’engagera-t-elle dans un marathon judiciaire, multipliant les exceptions de procédure, les appels et les recours de toute sorte ?

L’appareil d’Etat est-il corrompu à d’autres niveaux ?

Le pouvoir judiciaire sud-coréen semble déterminé à lutter contre la corruption. Sera-t-il en mesure d’aller jusqu’au bout ? En a-t-il les moyens ? Raison d’Etat et raison économique sont-elles les mêmes ?

Reste à faire les réformes tant attendues pour stopper la collusion entre la politique et l’immense pouvoir financier des chaebols, tant en Corée du Sud que dans toute l’Asie.

La Corée du Nord semble imprévisible ou trop prévisible, faisant fi du droit international. En février 2017, le demi-frère du leader nord-coréen, Kim Jong nam était assassiné au neurotoxique VX à l’aéroport de Kuala-Lumpur. Les services secrets nord-coréens sont suspectés.

Comment le futur président sud-coréen arrivera-t-il à gérer autant de défis majeurs et résistera-t-il à la pression nord-coréenne mais aussi au réarmement du Japon, modifiant les rapports de force dans la région ?

La Corée du Sud affaiblie saura-t-elle tirer les leçons de tous les scandales qui la secouent ?

La société civile coréenne, très mobilisée, pourrait bien une fois de plus imposer des réformes par la rue.

L’heure est en tout cas une nouvelle fois aux démonstrations de force militaire dans la péninsule coréenne avec les manœuvres militaires entre Coréens, Japonais et Américains dans le cadre du plan Foal Eagle et l’arrivée prochaine du porte-avions Carl Vinson. Mais pour le moment avec une ex-présidente sud-coréenne en prison dans une Corée du Sud qui s’interroge sur l’avenir.

A suivre.

Bibliographie indicative :

Website en anglais de la Cour constitutionnelle coréenne

Website de Locked Martin (vidéos THAAD)

Report of the panel of experts established pursuant to resolution 1874 (2009) S/2017/150 – March 5 – 2017

The Korean Armistice Agreement du 27 juillet 1953

Article 13 (d) Cease the introduction into Korea of reinforcing combat aircraft, armored vehicles, weapons, and ammunition ; provided however, that combat aircraft, armored vehicles, weapons, and ammunition which are destroyed, damaged, worn out, or used up during the period of the armistice may be replaced on the basis piece-for-piece of the same effectiveness and the same type. Such combat aircraft, armored vehicles, weapons, and ammunition shall be introduced into Korea only through the ports of entry enumerated in paragraph 43 hereof. In order to justify the requirements for combat aircraft, armored vehicles, weapons, and ammunition to be introduced into Korea for replacement purposes, reports concerning every incoming shipment of these items shall be made to the MAC and the NNSC ; such reports shall include statements regarding the disposition of the items being replaced. Items to be replace which are removed from Korea shall be removed only through the ports of entry enumerated in paragraph 43 hereof. The NNSC, through its Neutral Nations Inspection Teams, shall conduct supervision and inspection of the replacement of combat aircraft, armored vehicles, weapons, and ammunition authorized above, at the ports of entry enumerated in paragraph 43 hereof.

Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires entré en vigueur le 5 mars 1970

Résolution 2270 du 24 mars 2016 du Conseil de sécurité de l’ONU

Résolution 2321 du 30 novembre 2016 du Conseil de sécurité de l’ONU

Résolution L.41 de octobre 2016 visant à "faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire"

Convention sur l’interdiction de la mise au point de la fabrication du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction du 13 janvier 1993

Philippe Pons : "Corée du Nord, un Etat guérilla en mutation", collection La suite des temps, Gallimard (avril 2016)

Website "38 North"

Vincent Ricouleau
Professeur de droit -Vietnam -
Titulaire du CAPA - Expert en formation pour Avocats Sans Frontières -
Titulaire du DU de Psychiatrie (Paris 5), du DU de Traumatismes Crâniens des enfants et des adolescents (Paris 6), du DU d\\’évaluation des traumatisés crâniens, (Versailles) et du DU de prise en charge des urgences médico-chirurgicales (Paris 5)

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