Jusqu’à la loi du 21 décembre 2006, ce recours s’exerçait sur la totalité des postes de préjudice soumis à recours (IPP, ITT…) et aucune priorité sur l’indemnisation n’était reconnue à la victime.
Depuis cette loi, modifiant l’article 31 de la loi Badinter, celui-ci prévoit que les recours des tiers payeurs s’exercent :
Poste par poste,
Uniquement sur les indemnités qui réparent les préjudices qu’ils ont pris en charge,
A l’exclusion des préjudices à caractère personnel (sauf à prouver qu’une indemnisation a effectivement et préalablement été versée à la victime au titre d’un préjudice personnel).
L’article 31 précise également que la subrogation ne peut nuire à la victime.
Ainsi, cette loi du 21 décembre 2006, en ce qu’elle a modifié la loi Badinter, a amélioré la situation des victimes à l’égard de la pratique consistant à déduire en priorité la créance des tiers payeurs pour n’allouer à la victime que le reliquat des dommages intérêts.
Bien que ce principe soit clair, la Cour de Cassation a dû, une fois encore, rappeler ce qu’il impliquait (Civ. 2ème, 3 mars 2011, pourvoi n°10-30175) :
« dans le cas d’une limitation du droit à indemnisation de la victime, le droit de préférence de celle-ci sur la dette du tiers responsable a pour conséquence que son préjudice corporel, évalué poste par poste, doit être intégralement réparé pour chacun de ces postes dans la mesure de l’indemnité laissée à la charge du tiers responsable, et que le tiers payeur ne peut exercer son recours, le cas échéant, que sur le reliquat ».
Dans le cas d’espèce, Mme X a été victime d’un accident de la circulation et a vu son droit à indemnisation limité à 1/3, sa propre faute étant également considérée comme en partie à l’origine de l’accident. Le préjudice subi au titre de l’assistance par une tierce personne a été évalué à 333 060 €. Mme X a perçu de la CPAM, à ce titre, une indemnisation à hauteur de 118 577,69 €.
Le droit à indemnisation de Mme X étant limité à 1/3, l’indemnisation susceptible d’être mise à la charge du responsable au titre de l’assistance par une tierce personne sera limitée à :
333 060 / 3 = 111 020 €
La Cour d’Appel de Lyon a considéré que, compte tenu des prestations servies par la CPAM, il ne revenait aucun solde indemnitaire à Mme X.
Or, compte tenu des règles applicables depuis la loi du 21 décembre 2006, cette analyse était erronée.
En effet, dans la mesure où le droit à indemnisation du tiers payeur ne peut nuire à la victime, il convient de déterminer le préjudice effectif de la victime.
Pour Mme X ce préjudice est, compte tenu des prestations servies par la CPAM de :
333 060 – 118 577,69 = 214 482,31 €.
Le droit à indemnisation de Mme X est donc de : 214 482,31 / 3 = 71 494,10 €.
Compte tenu du principe selon lequel la subrogation ne peut nuire à la victime, Mme X aurait dû se voir allouer une somme de 71 494,10 € et la CPAM la différence entre le montant total susceptible d’être mis à la charge du responsable (111 020 €) et ce qui revient à la victime (71 494,10 €), soit 39 525,90 €.
Si la loi du 21 décembre 2006 a manifestement pour effet d’améliorer l’indemnisation des victimes en leur donnant un droit préférentiel sur l’indemnisation, la Cour de Cassation a encore dû effectuer une piqûre de rappel pour lutter contre la pratique de l’attribution préférentielle des indemnités à la CPAM, notamment en cas de partage de responsabilité.
Soyons donc vigilants aux décisions rendues par certaines juridictions du fond qui n’hésitent pas à aller à l’encontre des termes même de la loi !