Retour de congé maternité : la période de protection reportée par les congés payés.

Par Jennifer Shettle, Juriste.

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Explorer : # protection juridique # congé maternité # licenciement # congés payés

La période de protection contre le licenciement de quatre semaines suivant le congé de maternité est suspendue par la prise des congés payés. Son point de départ est alors reporté à la date de reprise du travail par la salariée. Telle est la décision rendue pour la première fois par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 30 avril 2014. Une décision importante au regard de la fréquence de cette situation.

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La salariée enceinte bénéficie d’une double protection juridique lui permettant de ne pas se faire licencier : d’une part, pendant sa grossesse et les périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, et d’autre part, pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes [1]. Cette seconde période de quatre semaines, dite « de protection » est toutefois soumise à une exception en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse [2].

Ainsi, dans l’hypothèse où la salariée fait suivre son congé maternité de ses congés payés, à partir de quand commence à courir ce fameux délai de protection de 4 semaines ? Commence-t-il à la date d’expiration du congé maternité (soit au premier jour des congés payés) ou bien à la date d’expiration des congés payés, c’est à dire à la reprise effective du travail ?

La Chambre sociale de la Cour de cassation, dans son arrêt du 30 avril 2014, estime pour la première fois que la deuxième option doit prévaloir. Pour la Cour, « la période de protection de 4 semaines suivant le congé de maternité étant suspendue par la prise des congés payés, son point de départ [est] reporté à la date de la reprise du travail par la salariée ».

En l’espèce, à la suite de son congé maternité qui s’est achevé le 7 septembre 2004, une salariée a pris ses congés payés du 8 septembre au 20 octobre 2004. De retour à son poste le 21 octobre 2004, elle est convoquée par une lettre remise en main propre à un entretien préalable de licenciement. Celui-ci lui est alors officiellement notifié le 16 novembre 2004 pour motif personnel.
Estimant avoir été licenciée pendant la phase de protection relative de 4 semaines instaurée par l’article L. 1225-4 du code du travail, la salariée saisit alors le conseil des prudhommes.

L’employeur pour sa part, fait valoir que ladite période de protection de quatre semaines court à compter de l’expiration des périodes de suspension du contrat de travail au titre du congé maternité, et non à compter de la reprise effective du travail par la salariée. La prise de congés payés accolée au congé maternité n’a donc pas pour effet de suspendre, ni de reporter le point de départ du cycle de quatre semaines. En notifiant le licenciement le 16 novembre 2004, soit plus 4 semaines après l’expiration du congé de maternité, la salariée n’était donc plus protégée.

Pour la Chambre sociale, au contraire, la période de protection de quatre semaines suivant le congé maternité est bien suspendue par la prise des congés payés. Ainsi, en l’espèce, le délai de 4 semaines qui devait normalement commencer le 8 septembre 2004 (son congé maternité prenant fin le 7 septembre 2004) a été suspendu pendant la prise des congés payés et son point de départ a été reporté à la date de la reprise du travail par la salariée, soit le 21 octobre 2004.

Le licenciement notifié le 16 novembre 2004 est donc nul dès lors qu’il a eu lieu pendant la période de protection qui s’achevait le 17 novembre 2004.

Au regard de cette décision, il est alors légitime de se demander si cette solution ne pourrait pas s’appliquer aux suspensions de contrats intervenant après les congés maternité tel que le congé parental. En effet, contrairement aux salariés en congé maternité ou d’adoption, les salariés en congé parental d’éducation ne bénéficient pas d’une protection contre le licenciement. Solution qui peut alors paraitre juridiquement hypocrite. Or, dans cette affaire, la Cour s’est strictement prononcée sur la suspension du délai de protection en cas de prise de congés payés. Il aurait fallu des termes plus généraux pour que la solution puisse s’appliquer à toute période de suspension du contrat de travail et notamment au congé parental.

Ce sera peut-être la prochaine étape, affaire à suivre…

Source : Cass. soc., 30 avr. 2014, n° 13-12.321

Jennifer Shettle ; Juriste en droit des affaires et de l’environnement

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Notes de l'article:

[1C. travail, art. L. 1225-4, al. 1.

[2C. travail, art. L. 1225-4, al. 2.

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Discussion en cours :

  • par sam , Le 5 décembre 2016 à 12:13

    Bonjour,

    La salariée est arrêtée en maladie puis en conges payes, tout cela après son conge maternité sans interrurption

    Qu en est il la protection est décalée ou non ?

    merci d’avance

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