1) Éléments du contrat et conditions de travail
Un contrat de travail comprend deux types de clauses : les éléments du contrat et les conditions de travail. Les éléments du contrat sont :
la durée du travail ;
la rémunération ;
les fonctions du salarié ;
le lieu de travail : l’employeur peut imposer une modification du lieu de travail si le nouveau lieu se trouve dans le même secteur géographique (sauf en cas de clause de mobilité).
Si un employeur veut modifier un de ces quatre éléments, il doit obtenir l’accord du salarié. Il doit donc faire parvenir une proposition d’avenant au contrat de travail au salarié.
Par opposition, l’employeur peut imposer une modification des conditions de travail puisque ceci relève de son pouvoir de direction et d’instruction. Les horaires de travail sont par exemple des conditions de travail sauf si cette modification a un impact majeur sur la vie du salarié (travail de nuit, 3/8…).
Si le salarié s’oppose, l’employeur pourra sanctionner disciplinairement le salarié et le cas échéant le licencier pour faute grave.
2) Le retrait de responsabilité d’un salarié
Concernant les fonctions du salarié, l’employeur peut modifier la mission du salarié s’il lui confie des tâches relevant de sa qualification et qu’il ne modifie ni sa classification et ni sa rémunération.
Dans un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 6 avril 2011 (n° 09-66818) un salarié avait été embauché en qualité d’ingénieur par la société Ouest Coating. Cette dernière mécontente du travail et du comportement du salarié qui souhaitait se faire licencier, a décidé, de faire évoluer ses fonctions et ses attributions.
En l’espèce, les responsabilités techniques et financières du salarié ont été renforcées, sa rémunération est restée inchangée mais la planification des ressources humaines et matérielles, le suivi de la fabrication, la formation du personnel de production et la maintenance générale lui ont été retirées.
On peut penser que, sa rémunération et sa qualification ayant été maintenues, le salarié avait l’obligation d’accepter mais la Cour de cassation a considéré qu’une telle diminution des responsabilités et des prérogatives du salarié constituait une modification du contrat de travail du fait de la modification du niveau des responsabilités et ne pouvaient pas être imposée au salarié, sans son accord.
3) La réaction du salarié face à une telle situation
3.1) La résiliation judiciaire aux tords de l’employeur
Le salarié peut saisir le Conseil des Prud’hommes en demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail au tords de l’employeur.
Dans ce cas, le salarié, saisit la juridiction prud’homale pour obtenir la résiliation de son contrat de travail. Pendant la procédure, le contrat de travail du salarié reste en vigueur. Le salarié devra établir devant le juge les manquements graves de l’employeur qui justifient la rupture du contrat aux tords de l’employeur.
Soit le Conseil de Prud’hommes retient l’existence de manquements graves de l’employeur et le contrat est rompu, avec toutes les conséquences d’un licenciement abusif à la date du jugement rendu (indemnités compensatrices de préavis, indemnités compensatrices de congés sur préavis, indemnités de licenciement et dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail), soit le salarié est débouté et il doit alors rester dans l’entreprise puisque son contrat de travail n’est pas rompu.
3.2) La prise d’acte de rupture
La seconde possibilité est de prendre acte de la rupture du contrat de travail. C’est une création jurisprudentielle qui n’existe pas, à ce jour, dans le code du travail. Le salarié qui reproche des manquements graves à son employeur va rompre la relation de travail par un courrier qui reprendra les manquements invoqués par le salarié et qui lui permettra de saisir le Conseil des Prud’hommes aux fins de requalifier la prise d’acte en licenciement abusif. Le salarié, par ce courrier, sort des effectifs de l’entreprise. Si le salarié est débouté par le Conseil de Prud’hommes, il sera considéré comme démissionnaire et ne pourra pas bénéficier des allocations chômage. Dans ce cas, l’employeur pourra prétendre à une indemnité pour non-exécution du préavis par le salarié.
Il existe une proposition de loi n°3418 du 11 mai 2011 qui vise à inscrire la prise d’acte dans le code du travail. Elle codifie les conséquences de la requalification de la prise d’acte. En outre, cette proposition de loi présente une nouveauté majeure : l’employeur pourrait « prendre acte de la rupture du contrat de travail de l’un de ses salariés en cas de manquement aux obligations personnelles de ce dernier ». Il devrait, dans ce cas, mettre en place une procédure de licenciement pour motif personnel. (C.trav.,art.L.1232-1 et s.).
Aucune précision n’étant donnée à ce stade de texte sur la notion de manquement du salarié à ses « obligations personnelles », il reste à voir si cette pure création jurisprudentielle va être consacrée par le législateur.