Barème Macron : la Cour de cassation saisie pour avis sur sa conventionnalité au regard des traités internationaux.

Par Frédéric Chhum, Avocat et Julie Rougé-Guiomar, Juriste.

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Explorer : # barème macron # conventionnalité # indemnités de licenciement # droits des salariés

L’ordonnance Macron n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a mis en place un barème plafonnant les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse [1].

Le plafonnement des indemnités, appelé « barème Macron », a provoqué un débat juridique d’ampleur [2].

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Le 10 avril 2019, le Conseil de prud’hommes de Louviers (pdf joint) a sollicité l’avis de la Cour de cassation, qui a ainsi l’occasion de se prononcer plus tôt que prévu sur la conventionnalité du barème Macron.

1) De nombreuses remises en cause du « barème Macron ».

Le « barème Macron » a été fortement décrié.

En effet, des salariés ont soulevé l’inconventionnalité du barème avec des textes supranationaux (Convention n°158 de l’Organisation Internationale du Travail et Charte sociale européenne et Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme), en affirmant qu’il est contraire au principe d’une répartition adéquate ou appropriée.

Certains Conseils de prud’hommes ont écarté ces arguments et appliqué le barème prévu par l’article L1235-3 du Code du travail.

Au contraire, plusieurs autres Conseils de prud’hommes, ont écarté le barème Macron et ainsi alloué des indemnités supérieures aux montants plafonnés prévus par l’article L. 1235-3 du code du travail (sur ce point, voir nos articles : Barème Macron : le Conseil de prud’hommes de Bordeaux l’écarte à son tour.,
Trois conseils de prud’hommes prononcent l’annulation du barème des indemnités prud’homales !).

Les Cours d’appel, alors saisies de la question de la conventionnalité du barème Macron, ne rendront pas leurs arrêts avant l’été 2019.

En cas de pourvoi, la Cour de cassation se prononcera à son tour sur la conventionnalité du barème.

Cependant, la Cour de cassation pourrait rendre une décision plus tôt que prévu, car le Conseil de prud’hommes de Louviers l’a saisie pour avis.

2) La saisine pour avis de la Cour de cassation quant à la conventionnalité du « barème Macron ».

Le 10 avril 2019, le Conseil de prud’hommes de Louviers, en formation de départage, a sollicité l’avis de la Cour de cassation quant à la conventionnalité du « barème Macron » : « L’article L 1235-3 du code du travail, qui prévoit, en cas d’ancienneté du salarié licencié égale ou supérieure à une année complète et inférieure à deux années complètes, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse minimale d’un mois et une indemnité maximale de deux mois, est-il compatible avec les articles 24 de la Charte sociale européenne et 10 de la Convention n ° 158 de l’OIT, en ce qu’ils prévoient le droit pour le salarié licencié de percevoir une indemnité adéquate, ainsi qu’avec le droit au procès équitable protégé par la Convention Européenne des Droits de l’Homme ? ».

Pour certains, la Cour de cassation a désormais la possibilité de rendre un avis qui permettrait de mettre fin à un débat juridique passionné.

Pour d’autres, la Cour de cassation ne se prononcera pas.

3) La Cour de cassation pourrait refuser de se prononcer sur la conventionnalité d’une disposition à travers une procédure d’avis.

A cet égard, le 16 mai 2019, le Professeur Birk Baugard, affirmait sur son compte twitter : « la Cour de cassation, certes critiquée par la doctrine, estime manifestement que la procédure pour avis ne permet pas de se prononcer sur la « conventionnalité » d’une disposition ».

Ce dernier fait ici référence à l’avis du 12 juillet 2017 (n° 17011, demande n° Y 17-70.009 ) dans lequel la Cour de cassation a estimé que la question de la compatibilité de la mise à la retraite, hors l’accord du salarié, avec la convention n°158 de l’OIT « ne relève pas de la procédure d’avis […], l’office du juge du fond étant de statuer au préalable sur cette compatibilité ».

Il est vrai qu’en l’espèce, le schéma est similaire, il est probable que, sauf revirement de jurisprudence, la Cour de cassation considère que la saisine par le Conseil de Prud’hommes de Louvriers quant à la conventionnalité du barème Macron, ne relève pas de la procédure d’avis.

Ci-après la décision du Conseil de prud’hommes de Louviers :

Jugement du CPH de Louviers (10/04/2019)

« Cette décision a été reproduite, anonymisée, et diffusée sous l’entière responsabilité du cabinet d’avocats auteur de cet article. »

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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[1Article L.1235-3 du Code du travail.

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