Salariés, cadres : quelles indemnités pourrez-vous obtenir aux prud’hommes en cas de licenciement sans cause après le barème « Macron » ?

Par Frédéric Chhum, Avocat.

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Explorer : # indemnités de licenciement # barème macron # licenciement sans cause # prud'hommes

C’est une révolution pour les salariés et les entreprises.

Le 18 juin 2015, l’Assemblée Nationale a adopté le projet de loi Macron qui institue un barème des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (article 87 D du projet de loi qui modifie l’article L. 1235-3 et s du Code du travail).

-

L’article 87 D du projet de loi (reproduit intégralement ci-dessous) modifie les articles historiques L. 1235-3 et L. 1235-5 du Code du travail, qui réglementaient les indemnités de licenciement sans cause des salariés depuis 1973.

Ce projet de loi va être présenté au Sénat à compter du 29 juin 2015. L’adoption définitive pourrait intervenir avant le 14 juillet 2015.
Le Conseil constitutionnel censurera-t-il cet article 87D du projet de loi ?

En tout état de cause, ce barème « Macron » ne sera applicable que pour les instances prud’homales introduites après la publication de la loi « Macron ». Ce barème ne sera donc pas applicable pour les instances en cours devant le Conseil de prud’hommes, la Cour d’appel ou la Cour de cassation.

1) Le barème « Macron » synthétisé (article L. 1235-3, 2ème alinéa nouveau).

Le barème « Macron » des indemnités pour licenciement sans cause est le suivant (exprimé en mois de salaire) :

Ancienneté moins de 2 ans :
Moins de 20 salariés : maximum 3 mois ;
Entre 20 et 299 salariés : maximum 4 mois ;
À partir de 300 salariés : Maximum 4 mois.

De 2 ans à moins de 10 ans  :
Moins de 20 salariés : Minimum 2 mois ; maximum 6 mois ;
Entre 20 et 299 salariés : Minimum 4 mois ; maximum 10 mois ;
À partir de 300 salariés : Minimum 6 mois ; maximum 12 mois.

10 ans et plus
Moins de 20 salariés : Minimum 2 mois ; maximum 12 mois ;
Entre 20 et 299 salariés : Minimum 4 mois ; maximum 20 mois ;
À partir de 300 salariés : Minimum 6 mois ; maximum 27 mois.

Le barème « Macron » prévoit, à ce stade, des indemnités pour licenciement sans cause revues à la baisse et plafonnées (article 87 D du projet de loi Macron).

En effet, ce barème (dans sa fourchette minimaliste) limite de manière importante les indemnités pour licenciement sans cause pour les salariés qui ont plus de 2 ans d’ancienneté.

Actuellement, l’article L. 1235-3 dispose qu’un salarié qui possède plus de 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de 10 salariés, doit percevoir une indemnité pour licenciement sans cause d’au moins 6 mois de salaires.

Or, le barème « Macron » actuel prévoit, par exemple, que pour les salariés de plus de 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de 20 salariés (et non plus de 10 salariés comme actuellement), le minimum octroyé au salarié en cas de licenciement sans cause serait de 4 mois et non de 6 mois actuellement, soit une diminution de 33% du montant, ce qui est considérable.

Ce barème « Macron » s’appliquerait en cas de résiliation judiciaire ou de prise d’acte de rupture de contrat de travail si elle est reconnue par un juge aux torts exclusifs de l’employeur.

2) Possibilité pour le juge de fixer un montant supérieur au barème dans certains cas.

Le juge peut fixer une indemnité d’un montant supérieur en cas de faute de l’employeur d’une particulière gravité, caractérisée par :

-  des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4 ;
-  un licenciement discriminatoire dans les conditions prévues à l’article L. 1134-4 ou consécutif à une action en justice en matière d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans les conditions mentionnées à l’article L. 1144-3 ou en matière de corruption dans les conditions prévues à l’article L. 1161-1 ;
-  la violation de l’exercice du droit de grève dans les conditions mentionnées à l’article L. 2511-1 ou de l’exercice d’un mandat par un salarié protégé dans les conditions mentionnées à l’article L. 2422-1 ;
-  la violation de la protection dont bénéficient certains salariés dans les conditions mentionnées aux articles L. 1225-71, L. 1226-13 et L. 1226-15 ou
-  l’atteinte à une liberté fondamentale (Art. L. 1235-3-2. Nouveau).

3) Le système actuel (avant la loi Macron) applicable depuis 1973.

Ancienneté moins de 2 ans :
entreprise de moins de 11 salariés : en fonction du préjudice subi L.1235-5 du Code de travail,
entreprise avec au moins 11 salariés : en fonction du préjudice subi L.1235-5 du Code de travail.

Ancienneté de plus de 2 ans :
entreprise de moins de 11 salariés : au moins 6 mois de salaire L.1235-5 du Code de travail ;
entreprise avec au moins 11 salariés : au moins 6 mois de salaire L.1235-3 du Code de travail.

4) Application de la loi dans le temps : ce barème ne s’appliquera aux instances introduites après la publication de la loi (mi-juillet 2015).

Le projet de loi précise que l’article entre en vigueur le lendemain de la publication de la présente loi. Lorsqu’une instance a été introduite avant cette date, l’action est poursuivie et jugée conformément aux dispositions législatives antérieures à la présente loi.

Ces dispositions s’appliquent également en appel et en cassation.

Cela signifie qu’il faut saisir les prud’hommes avant la publication de la loi au Journal officiel (Publication prévue mi juillet 2015) pour éviter le barème « Macron ».

Le Conseil Constitutionnel va-t-il valider ce barème ? Réponse dans les semaines à venir.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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Discussion en cours :

  • par Gislaine Touroude , Le 2 juillet 2015 à 18:18

    Merci pour cet exposé si clair.
    Question : Un ex-employeur, a-t-il intérêt à proposer une transaction à l’ex-salarié licencié sans motif réel et sérieux, entre le passage en conciliation et le jugement programmé en octobre au regard de la Loi Macron ?
    Merci de votre réponse

    Mimi en pleine tourmente

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