Burnout (épuisement professionnel) : cadre juridique et reconnaissance en maladie professionnelle.

Par M.Kebir, Avocat.

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Explorer : # burnout # Épuisement professionnel # risques psychosociaux # maladie professionnelle

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Le burnout, un syndrome lié au travail, n'est pas encore officiellement reconnu comme une maladie professionnelle en France. Pourtant, il soulève des questions juridiques concernant la responsabilité des employeurs dans la prévention et la protection des employés face aux risques psychosociaux, tout en nécessitant des démarches spécifiques pour une reconnaissance individuelle.
Description rédigée par l'IA du Village

Combinant enthousiasme désenchanté, surinvestissement - désillusion, mal-être consécutifs aux dysfonctionnements organisationnels, le burnout est loin de bénéficier, au demeurant, d’une reconnaissance juridique - entière et généralisée.

Faisant face à une souffrance aggravée par l’environnement professionnel hostile, les salariés disposent, pourtant, d’un mécanisme de reconnaissance de l’origine professionnelle de la pathologie « caractérisée », non désignée dans un tableau de maladie professionnelle.

Ainsi, suivant un processus souvent long, la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une pathologie non-inscrite aux tableaux des maladies professionnelles, comprenant le burnout, repose sur des exigences rigoureuses sur fond du contradictoire procédural- reconnu à l’employeur. Dans certains cas, la faute inexcusable est susceptible d’être retenue à l’égard de celui-ci.

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Expression d’un mal-être, d’une souffrance, souvent silencieuse causés par le travail, les risques psychosociaux (burnout, harcèlement…) sont les manifestations d’un préjudice dont la gravité varie, notamment, en fonction du contexte et des facteurs endogènes.

Légalement, la maladie professionnelle peut être définie comme une affection, résultant d’agents physiques auxquels est exposé, de façon habituelle, le salarié durant ses activités professionnelles [1].

De par son ampleur et dommages y afférents, l’OMS introduit le burnout dans la Classification Internationale des Maladies (CIM). À cet égard, la CIM-11 fait de l’épuisement professionnel un « facteur ayant une influence sur l’état de santé », « associé au travail » [2].

Il suit de là que le burnout n’est pas reconnu, par l’OMS, comme une maladie professionnelle, à part entière (Voir en ce sens : Santé au travail : burn-out et faute inexcusable de l’employeur).

En France, la Loi « Rebsamen » du 17 août 2015 en son article 33 [3] ouvre la voie à la reconnaissance des maladies psychiques professionnelles, sans pour autant l’intégrer dans la nomenclature des maladies professionnelles.

Partant, l’état du droit actuel est loin de refléter les dimensions réelles de l’épuisement professionnel. Objet de nombreux recours judiciaires, le burnout, intimement lié aux risques psychosociaux, est évoqué comme circonstance de souffrance ayant trait aux conditions de travail. Devant, au fond, en fonction des circonstances, engager la responsabilité de l’employeur.

Dès lors, quels critères juridiques en vue de la reconnaissance du burnout au titre de la législation appliquée aux maladies professionnelles ?

En cela, au regard de la date de diagnostic du burnout, deux types d’enjeux peuvent être évoqués.

A posteriori il s’agira d’assurer, au salarié victime, un meilleur accompagnement financier, psychologique et médical. Également, c’est à ce stade qu’il conviendra de poser la question de la responsabilité de l’employeur - au titre de son obligation de sécurité.

A priori, la difficulté réside dans l’anticipation des facteurs susceptibles de provoquer cet épuisement. En cela, le dialogue social, la formation aux RPS, une meilleure Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT) sont autant d’outils de prévention efficaces.

Éléments de définitions.

Phénomène de santé mentale au travail, nombreux sont les salariés qui s’estiment victimes de ce mal-être existentiel, à la fois, professionnel et personnel [4].

Le burnout est devenu la principale conséquence du stress au travail, touchant aussi bien les salariés du secteur privé que du secteur public.

Conceptuellement, l’épuisement physique, émotionnel et mental est la résultante de conditions de travail dégradées. Cette dégradation est causée, notamment, par la surcharge de travail, l’absence de moyens mis en œuvre par rapport aux résultats, un engagement émotionnel trop fort, etc.

En 2019, l’OMS (Organisation mondiale de la Santé) définissait le burnout comme un syndrome résultant d’un stress chronique professionnel, pointant des failles dans sa prévention et gestion. Pour l’essentiel, trois éléments caractérisent ce syndrome :

  • L’épuisement
  • La diminution de l’efficacité professionnelle
  • Un sentiment négatif vis-à-vis du travail.

De plus, il importe de relever que la classification des maladies (CIM-11) qui entrera en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2022 ne mentionne pas le burnout au titre des maladies professionnelles mais comme un phénomène lié au travail. Au sujet des raisons et obstacles à la non-reconnaissance, une réponse ministérielle apporte les clarifications suivantes :

« En complément du système de tableaux, une procédure de reconnaissance fondée sur une expertise individuelle par des Comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP), composés de médecins. Cette procédure intervient notamment lorsqu’il est établi qu’une maladie, non désignée dans un tableau, est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux au moins égal à 25% (article L461-1 alinéa 7 du Code de la Sécurité sociale). L’article 27 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi a consacré cette voie de reconnaissance individuelle pour les pathologies psychiques.
En outre, un renforcement de l’expertise médicale des CRRMP a été mis en place par le décret n° 2016-756 du 7 juin 2016 pour permettre le recours à des médecins psychiatres. Une reconnaissance des pathologies psychiques dans le cadre du système des tableaux de maladies professionnelles n’est pas adaptée pour plusieurs raisons. D’abord, la désignation de la pathologie est particulièrement complexe. Ensuite, la fixation du délai de prise en charge - correspondant au délai maximal entre la cessation d’exposition au risque et la première constatation médicale de la maladie - serait difficile à déterminer, car extrêmement variable d’un individu à un autre. Enfin, aucune liste des travaux susceptibles de provoquer l’affection ne pourrait être fixée.
S’agissant des perspectives réglementaires, la réponse ministérielle précitée précise :
Au-delà des avancées mentionnées en termes de reconnaissance et de réparation, la priorité absolue du Gouvernement reste le renforcement de la prévention. A cet égard, des actions sont menées depuis plusieurs années, dans le cadre de la branche AT/MP de la Sécurité sociale et du Plan santé au travail
 » [5].

Dans le même ordre d’idées, un arrêt du Conseil d’État juge de manière inédite, qu’un arrêt de travail au motif de burnout ne peut être regardé comme un arrêt de complaisance.

Un arrêt de travail pour "burnout" n’est pas un arrêt de complaisance.

Pour rappel, le médecin doit, déontologiquement, mentionner sur la prescription d’arrêt de travail, "les éléments d’ordre médical justifiant l’interruption de travail".

Qui plus est, la délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite [6].

A ce titre, par sa jurisprudence notable du 28 mai 2024, le Conseil d’État a jugé que :

"L’existence d’un syndrome d’épuisement professionnel sans disposer de l’analyse des conditions de travail du salarié émanant notamment du médecin du travail ne saurait caractériser l’établissement d’un certificat tendancieux ou de complaisance au sens des dispositions de l’article R4127-28 du Code de la santé publique" [7].

En l’espèce, pour confirmer la sanction litigieuse prise à l’égard d’un médecin traitant du salarié, la Chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins, s’était référée aux recommandations de bonne pratique de la Haute Autorité de santé (HAS) en matière de "repérage et de prise en charge cliniques du syndrome d’épuisement professionnel ou burnout".

La chambre disciplinaire considère que, à l’effet de motiver la prolongation de l’arrêt de travail par l’existence d’un burnout, le médecin ne pouvait se fonder sur les seules déclarations de la patiente - indiquant que son stress et son angoisse trouvaient leur origine dans son activité professionnelle - sans disposer de l’analyse de ses conditions de travail émanant notamment du médecin du travail.

En conséquence, pour la Chambre disciplinaire, le médecin a méconnu l’obligation déontologique relative à la délivrance d’arrêts de complaisance.

Accueillant favorablement le pourvoi, le Conseil d’état estime que le constat de "l’existence d’un syndrome d’épuisement professionnel sans disposer de l’analyse des conditions de travail du salarié émanant notamment du médecin du travail ne saurait caractériser l’établissement d’un certificat tendancieux ou de complaisance".

Ce faisant, cette jurisprudence peut être inscrite comme un pas supplémentaire dans l’édifice prétorien relatif au burnout. En ce qu’elle confère au médecin un pouvoir nouveau : arrêter, de manière autonome, un salarié pour burnout, indépendamment de toute formalité préalable : s’appuyer sur l’analyse circonstanciée du médecin du travail.

La maladie professionnelle.

Les maladies professionnelles reconnues, sont référencées dans des tableaux annexés au Livre IV du Code de la Sécurité sociale.

Dès lors, les maladies professionnelles figurant à l’un de ces tableaux sont prises en charge par la CPAM.

En clair, est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau :

"Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime" [8].

S’ajoute à ce cadre légal la possibilité de la reconnaissance hors tableau appuyée par une expertise individuelle.

Reconnaissance hors tableau du burnout.

Au demeurant, le législateur et le juge distinguent burnout et maladie professionnelle. Le salarié en situation d’épuisement professionnel ne saurait, à ce titre, bénéficier de la présomption d’origine professionnelle de la dégradation de son état de santé [9]. Et prétendre, sur ce fondement, aux prestations sociales.

Pour autant, depuis 2017, les salariés disposent d’un nouveau mécanisme de reconnaissance de l’origine professionnelle de la pathologie « caractérisée », « non désignée dans un tableau de maladie professionnelle ». En d’autres termes, il s’agit d’ouvrir la reconnaissance de l’origine professionnelle [10], à l’égard de la pathologie non inscrite au tableau des maladies professionnelles - dont est victime un salarié.

Lequel devra, en premier lieu, établir le lien direct entre la maladie et son « travail habituel », au même titre que « l’incapacité » professionnelle qui résulte de cette souffrance [11]. Il va sans dire qu’une expertise médicale sur l’origine et l’ampleur de la pathologie, devra nécessairement être établie par le salarié.

Par ailleurs, la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie est assujettie à l’avis du comité de reconnaissance des maladies professionnelles [12].

Ce n’est qu’à l’issue de ces longues démarches qu’un salarié, dont la pathologie psychique est reconnue comme étant d’origine professionnelle, pourra bénéficier des « prestations, indemnités ou rentes » [13] allouées à cet effet.

En cela, la jurisprudence fournit des exemples de situation d’épuisement professionnel ayant été reconnues au titre d’une maladie professionnelle :

  • « La caisse établit, autrement que par les affirmations de l’assuré, que M. Y a été victime d’une altération brutale de son état psychique, présentant un burnout aigu, survenu aux temps et lieu de travail, faisant immédiatement suite à un entretien de nature disciplinaire auquel il avait été convoqué par son employeur » [14].
  • « Le 13 février 2015 Mme X a formé une demande de reconnaissance du caractère professionnel d’un syndrome dépressif. Suite à l’avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Paris en date du 13 avril 2016, la caisse a reconnu le caractère professionnel de cette dépression » [15].

En substance, tel qu’exposé supra, lorsque le salarié est atteint d’une maladie non mentionnée dans un tableau, la caisse primaire (CPAM) ne peut reconnaître l’origine professionnelle de la maladie qu’après avoir recueilli l’avis d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP), sur la base de conditions cumulatives :

  • une incapacité permanente de travail supérieure à 25%
  • un lien direct et essentiel entre la maladie et le travail.

Au surplus, CRRMP dispose d’un délai de quatre mois pour se prononcer. Il lui est loisible de procéder à des examens complémentaires ou à des enquêtes, proroger le délai de deux mois supplémentaires.

Concrètement, lorsqu’une affection ne remplit pas toutes les conditions d’un tableau, elle peut néanmoins être reconnue comme maladie professionnelle :

  • Le CRRMP, composé d’experts médicaux, statue sur le lien de causalité entre la maladie et le travail habituel de la victime
  • Son avis s’impose à CPAM.

Formellement, constitué par la caisse d’assurance maladie, le dossier comprend, notamment, un avis motivé du médecin du travail de l’entreprise de la victime et un rapport de l’employeur, permettant d’apprécier les conditions d’exposition de cette dernière au risque professionnel [16].

Par ailleurs, réalité connue du monde du travail, le stress figure parmi les facteurs aggravants, à l’origine du burnout.

Stress, harcèlement et burnout.

Au registre du stress, l’article L1222-1 Code du travail prescrit que « le contrat de travail est exécuté de bonne foi ». De sorte que : "l’augmentation constante de la charge de travail" d’un salarié est une exécution déloyale du contrat [17].

A cet égard, il y a lieu de relever que, depuis 2012, la Haute assemblée admet la faute inexcusable de l’employeur dans le cas où l’accident du travail est dû à un stress subi, généré par la surcharge du travail.

Ainsi, il est de jurisprudence constante que les méthodes de gestion d’un supérieur hiérarchique peuvent caractériser un harcèlement moral, en ce sens que :

"Peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; le directeur de l’établissement soumettait les salariés à une pression continuelle, des reproches incessants, des ordres et contre-ordres dans l’intention de diviser l’équipe se traduisant, en ce qui concerne M. X..., par sa mise à l’écart, un mépris affiché à son égard, une absence de dialogue caractérisée par une communication par l’intermédiaire d’un tableau, et ayant entraîné un état très dépressif ; qu’ayant constaté que ces agissements répétés portaient atteinte aux droits et à la dignité du salarié et altéraient sa santé, elle a ainsi caractérisé un harcèlement moral, quand bien même l’employeur aurait pu prendre des dispositions en vue de le faire cesser [18].
En outre, la Cour de cassation exige des juges du fond de rechercher si le salarié n’avait pas été exposé à un stress permanent et prolongé à raison de l’existence d’une situation de surcharge de travail conduisant à un épuisement professionnel de nature à entraîner une dégradation de son état de santé susceptible de caractériser un lien entre la maladie de la salariée et un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité
" [19].

En substance, au fil de sa jurisprudence, la Cour régulatrice établit un lien entre harcèlement moral, stress et méthodes managériales. Dit autrement, un supérieur hiérarchique, soumettant ses subordonnés à une pression continuelle - des reproches incessants, des ordres et contrordres dans l’intention de diviser l’équipe, se traduisant, pour le salarié, par sa mise à l’écart, un mépris affiché à son égard, une absence de dialogue caractérisée par une communication par l’intermédiaire d’un tableau, ayant entraîné un état dépressif-, est passible de sanctions sur le fondement du harcèlement moral.

Ceci, peu important la circonstance que l’employeur ait pris des dispositions tendant à le faire cesser.

Responsabilité l’employeur : obligation de prévention et de sécurité.

Renforçant le champ des obligations en matière des conditions de travail, tel que dit supra, l’article L4121-1 du Code du travail fait peser sur l’employeur une obligation de sécurité à l’égard du salarié [20].

Admis au visa de cette disposition, les risques psychosociaux et les maladies psychiques professionnelles ne font pas exception au régime légal.

De ce point de vue, l’état de stress [21], au même titre que le harcèlement sexuel ou moral [22], peuvent être des facteurs de risque pour la santé physique et mentale des salariés.

Il reste que l’employeur qui ne prendrait pas toutes les mesures nécessaires visant à anticiper, prévenir, et faire cesser ces facteurs de risques, commet une « faute inexcusable » [23].

En clair, pour la Haute Assemblée,

« En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L452-1 du Code de la Sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ».

Ici, c’est en matière du licenciement que la jurisprudence assimile le burnout à une souffrance devant alerter l’employeur. Partant, le licenciement prononcé pour insuffisance professionnelle à l’égard d’un salarié qui, peu avant la mesure, avait alerté l’employeur sur son état de santé, est présumé discriminatoire pour raison de santé [24].

Il en résulte qu’un tel licenciement, « dépourvu de causes réelles et sérieuses », engage lourdement la responsabilité de l’employeur.

En somme, l’anticipation du burnout doit s’inscrire dans le droit fil des mesures préventives liées aux risques professionnels.

Pour le dire autrement, par-delà le panorama des maladies, liées au travail - indemnisables, la prévention des risques professionnels doit être la priorité du dirigeant. Qui plus, cela relève d’une obligation légale.

En ce sens, la loi du 2 août 2021 [25], relative aux conditions de travail, renforce la prévention en matière de santé professionnelle, autant elle modernise les services de prévention.

Ici, l’article L2312-5 Code du travail prévoit que l’employeur est tenu d’évaluer les risques, dans la définition des postes de travail.

De même, ladite loi élargit les missions des services de santé du travail. Lesquels doivent travailler, « à la réalisation d’objectifs de santé publique afin de préserver, au cours de la vie professionnelle, un état de santé du travailleur compatible avec maintien en emploi ».

En matière de harcèlement, les articles L1152-1 et L1153-3 du Code du travail ont été du reste modifiés, étendant, dès lors, le domaine de la qualification.

Sur ce point, l’ANI du 9 décembre 2020, relatif à la santé au travail, [26], élargit le champ des mesures préventives liées à l’amélioration des conditions de travail.

Réagir à l’épuisement professionnel.

Au-delà de la dénonciation de la situation de souffrance à l’employeur, le CSE, le médecin du travail, l’inspection du travail, soulignons que l’obligation de sécurité incombant à l’employeur se décline tout aussi en obligation de prévention des risques psychosociaux : burnout, harcèlement, stress...

Au fond, eu égard aux dispositions des articles L1152-4 et L4121-1 et L4121-2 du Code du travail régissant la préservation de la santé mentale, l’employeur est soumis à une obligation d’anticipation des risques : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » [27].

En clair, il résulte des textes précités que les mesures nécessaires s’entendent de deux manières :

  • l’entreprise doit mettre en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité des salariés
  • empêcher la réalisation du risque.

De sorte que l’inaction de l’employeur est fautive : l’employeur est responsable des agissements de harcèlement de ses salariés, « sauf s’il justifie avoir pris toutes les mesures de prévention et, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer une mesure de harcèlement moral et a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser » [28].

Sur ce point, parmi les mesures efficientes de prévention :

  • sensibiliser aux risques
  • former les collaborateurs à déceler les situations de harcèlement et réagir promptement. La formation fait partie des actions de prévention visées à l’article L4121-1 Code travail
  • promouvoir les outils relationnels : écoute active, intelligence émotionnelle, dialogue contributif…

En la matière, le CSE dispose de prérogatives propres. Le comité peut, entre autres :

  • être informé sur ces faits [29]
  • susciter toute initiative utile et proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral. Le refus de l’employeur est motivé [30]
  • exercer son droit d’alerte [31].

Par ailleurs, conformément aux articles L4622-2 et L4624-3 Code du travail, le médecin du travail conseille les parties concernées sur les mesures nécessaires afin de prévenir le harcèlement sexuel ou moral.

A cet égard, tout salarié (victime ou témoin) qui dénonce des faits de harcèlement bénéficie d’une protection [32].

Toujours est-il que, s’il est informé de harcèlement moral au sein de l’entreprise, l’employeur est tenu d’agir [33], et mener ou faire une enquête (Harcèlement au travail : l’enquête interne).

Enfin, précise l’article L1152-6 Code du travail, la médiation est autant un instrument de prévention que de résolution en matière de harcèlement et des RPS.

Prévenir le burnout.

La dégradation de la santé au travail, indépendamment des actions vertueuses de la QVCT [34], se mesure, notamment, à l’aune d’indicateurs probants.

A ce titre, l’absentéisme et les RPS en sont l’illustration de l’altération du sens et des conditions de travail [35].

A cet égard, les experts y voient la conséquence de l’environnement du travail et les déséquilibres dommageables entre vie personnelle et professionnelle.

De même, dans le cadre de la prévention primaire exposée ci-avant, l’article L4121-2 du Code du travail fixe neuf principes généraux de prévention, notamment :
« Adapter le travail à l’homme et planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral ».

Au fond, à l’effet d’écarter la survenance des risques professionnels, des mesures accessibles sont à la portée de l’organisation :

  • réduire la charge de travail
  • droit au repos [36]
  • droit à la déconnexion [37]
  • créer des espaces d’échange
  • promouvoir le dialogue et l’écoute active
  • management bienveillant ; exprimer reconnaissance et confiance
  • former à la qualité relationnelle.

En la matière, concernant les salariés en forfait jours, l’employeur doit garantir une charge de travail et une amplitude horaire raisonnables [38].

Du reste, du point de vue des objectifs et charge de travail, il est de jurisprudence constante que c’est à l’employeur de démontrer que les objectifs sont atteignables et mesurables [39].

En définitive, outre le cadre légal incitant à faire de la prévention une priorité, la quête de sens et la fidélisation des salariés s’illuminent quand la santé mentale est protégée ; les droits essentiels sauvegardés.

Par suite, objectif de taille, le premier défi relativement au burnout se gagne sur le terrain de la prévention continue, intégrale, harmonisée et adaptée. Dans le sillage de l’obligation de sécurité des organisations et la promotion de la culture d’entreprise éthique et responsable.

M. Kebir
Avocat à la Cour - Barreau de Paris
Médiateur agréé, certifié CNMA
Cabinet Kebir Avocat
contact chez kebir-avocat-paris.fr
www.kebir-avocat-paris.fr
www.linkedin.com/in/maître-kebir-7a28a9207

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Notes de l'article:

[1Article L461-1 Code de Sécurité sociale.

[2ICD-11 for Mortality and Morbidity statistics, 24, QD85.

[3La Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi.

[5Réponse du Ministère du travail, de la santé et des solidarités publiée le 11/04/2024 :
https://www.senat.fr/questions/base/2024/qSEQ240210210.html

[6Article R4127-28 Code de la santé publique.

[7CE, 6 juin 2018, n°405453.

[8Article L461-1 Code de la Sécurité sociale.

[9Article L461-1 §2 du Code de la Sécurité sociale.

[10Article L461-1 §3 du Code de la Sécurité sociale.

[11Ibid.

[12Article L461-1 §5 du Code de la Sécurité sociale.

[13Article L461-3 §2 du Code de la Sécurité sociale.

[14CA Paris, Pôle 6 - chambre 13, 8 janvier 2021 n° 18/04145.

[15CA Paris, Pôle 6 - chambre 13, 14 mai 2021 n° 18/10518.

[16Pour aller plus loin : Ameli : maladie professionnelles.

[17Cass. Soc. 8 septembre 2021 n° 19-21.386.

[18Cass. Soc, 10 novembre 2009, 07-45.321, Publié au bulletin.

[19Cass. Soc, 13 mars 2013, 11-22.082, Publié au bulletin.

[20Cass Soc, 28 février 2002, n° 00-11.793.

[21Cass Soc, 13 mars 2013, n° 11-22.082.

[22Cass Soc, 13 mars 2013, n° 11-22.082.

[23Cass Soc, 28 février 2002, n° 00-11.793.

[24Cass Soc, 5 février 2020, n°18-22.399.

[25Loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail.

[26Accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020 relatif à la prévention renforcée et à une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail.

[27Article L4121-1 Code du travail.

[28Cass. Soc. 1ᵉʳ juin 2016, n° 14-19.702.

[29Article L2312-8, 3° Code du travail.

[30Article L2312-9 Code travail.

[31Article L2312-5 du Code du travail.

[32Article L1152-2 Code du travail.

[33Cass. Soc. 27 nov. 2019, n° 18-10.551.

[34Qualité de vie et des conditions de travail.

[35Selon une étude Datascope 2022, l’observatoire de l’absentéisme, les facteurs psychologiques, l’épuisement professionnel sont responsables de 22% des arrêts de travail de longue durée : 4 points de plus qu’en 2019.

[36Article L3121-33 Code du travail.

[37Loi n° 2016-1088, du 8 août 2016 : Article 55 et suivants.

[38Article L3121-64 Code du travail ; Cass. Soc 9 novembre 2022, n°21-13.389.

[39Cass. Soc.15 décembre 2021, n° 19–20.978.

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