Vous avez procédé à une dématérialisation complète de votre activité : quelles difficultés avez-vous rencontrées, et quels bénéfices en retirez-vous actuellement ?
Nous sommes effectivement passés en moins d’un an d’un environnement 100% « papier » à un environnement complètement dématérialisé grâce à la création d’une plateforme de gestion numérisée des contentieux.
Ce projet a nécessité la récupération et le transfert, selon une nouvelle organisation définie par les juristes, d’un nombre incalculable de données et la numérisation d’un énorme volume de documents.
Compte tenu de l’ampleur de ce chantier, l’une des principales difficultés fut de réussir à dégager le temps nécessaire à la concrétisation de ce projet et au respect des délais que nous nous étions fixés. Toute l’équipe a donc collaboré au projet, ce qui nous a permis également, en confrontant nos points de vue, de nous assurer mutuellement de l’adhésion de tous à ce véritable changement de méthode de travail.
S’agissant plus particulièrement de la création de notre plateforme de gestion numérisée, nous avons dû dès le départ être très vigilants sur la détermination de nos besoins, pour éviter de se disperser dans des fonctionnalités a priori séduisantes mais finalement peu utiles. Dans le même ordre d’idées, il a également fallu réussir à faire en sorte que des intervenants de métiers très différents (juridique, informatique…) arrivent à se comprendre rapidement. Sur ce point, les juristes ont parfaitement réussi à vulgariser leur activité pour faire comprendre leur besoin, tirer un réel profit de l’expertise de ces développeurs et éviter certains écueils.
Cette transformation a permis à l’équipe (composée de jeunes collaborateurs) d’être plus agile, de supprimer les tâches à faible valeur ajoutée et de développer une part de télétravail.
Mais surtout, le temps précieux libéré par cette nouvelle façon de travailler nous a permis de nous investir dans la création d’un dispositif interne de médiation juridique qui a profondément modifié le rôle du juriste en contentieux social.
Comment se déroule la procédure de médiation que vous avez mise en place dans votre entreprise ? Quels sont les premiers résultats ?
Dans le cadre du plan stratégique RH de l’entreprise l’Expérience salarié qui, par une démarche constante de progrès, vise à repositionner le salarié au cœur des attentions, la Direction Juridique Social a imaginé un dispositif de médiation conventionnelle des contentieux sociaux.
C’est un dispositif qui permet à tous les salariés d’Air France qui estiment rencontrer une difficulté juridique à l’occasion de l’exécution ou de la rupture de leur contrat de travail d’obtenir rapidement et gratuitement une solution à leur différend en s’appuyant sur l’intervention d’un tiers, le médiateur, choisi par le salarié sur une liste de 6 médiateurs expérimentés.
Son fonctionnement est régi par une Charte de la Médiation et repose sur le volontariat des parties, la possibilité d’y mettre fin à tout moment, la confidentialité et la gratuité pour le salarié.
Les salariés expriment très facilement leur demande de médiation sur l’Intranet de l’entreprise. Celles-ci sont examinées par les juristes de la Direction Juridique Social qui y répondent, en liaison avec le réseau RH.
Les réunions de médiation se déroulent dans un endroit dédié, propice à la communication et à la confidentialité des échanges.
Ce dialogue direct entre le collaborateur et l’entreprise permet de résoudre rapidement les conflits et favorise l’émergence de solutions parfois très originales.
Beaucoup d’accords ont d’ores et déjà été trouvés dans le cadre de ce dispositif et ces solutions, choisies et partagées, ont été déterminantes dans la restauration de la qualité de la relation de travail.
Ceci est un facteur clé dans une industrie de service où le produit est fabriqué devant le client.
Comment les différents volets de votre innovation ont redéfini le rôle des juristes de votre département ?
A travers cette double innovation – dématérialisation et médiation juridique – la Direction Juridique Social d’Air France a participé à un changement en profondeur du rôle du juriste : expert agile, il n’est plus seulement le dernier recours dans la gestion des différends juridiques, il devient un acteur à part entière de la fonction RH, en contribuant à restaurer la qualité de la relation de travail.