Agonir son syndic relève du sport national. Combien de consultations de copropriétaires échauffés s’entament par : « je veux faire un procès à mon syndic ! »
Parfois justifiées, parfois excessives, les procédures de mise en cause de la responsabilité du syndic sont surtout très abondantes devant les Tribunaux. Il faut préciser qu’elles peuvent être exercées non seulement par le Syndicat des copropriétaires, sur le terrain contractuel, mais également par tout copropriétaire et même par un tiers, sur le plan de la responsabilité civile délictuelle de droit commun.
En outre, la Cour de cassation a reconnu récemment la possibilité pour un copropriétaire, qui avait pourtant voté en faveur du syndic et lui avait donné le quitus, d’engager et de mener favorablement son action en responsabilité [1].
Notons, ici, que l’on ne parle pour l’instant que de responsabilité civile pour faute de gestion du syndic. Mais, qu’en est-il de la responsabilité pénale ?
Si, un temps, les affaires judiciaires de syndics crapuleux pouvaient faire la une des actualités, les législations récentes ont sécurisé les modalités d’exercice du syndic, notamment par la création du compte bancaire séparé pour le Syndicat des copropriétaires, abaissant le taux des affaires pénales. Cependant, le spectre de la responsabilité pénale du syndic reste un planeur éveillé qui mérite que l’on s’y attarde.
Balayons tout d’abord les idées simplistes à défaut d’en être des reçues. Non, les syndics ne sont pas des escrocs et cet article n’est pas un complément d’un numéro de « Faites entrer l’accusé ». Il est en revanche évidemment que « oui » la position du syndic dans la gestion administrative et comptable de la copropriété favorise les infractions pénales. Il est en outre certain que la plupart de ces délits sont de nature financière…quoique !
En effet, le syndic peut être confronté à la matière pénale de divers manières. S’il peut en être l’objet des poursuites, il peut également en user à titre de protection personnelle. Enfin, il doit être entendu qu’il n’existe pas de régime pénal spécifique à la copropriété, au contraire de la matière civile qui connaît un droit particulier au travers de la Loi du 10 juillet 1965 et du Décret du 17 mars 1967. Aussi, le syndic n’est pas seul à pouvoir souffrir d’une mise en cause pénale qui peut, aisément, s’étendre à d’autres acteurs de la copropriété.
Quelles sont les causes de responsabilité pénale du syndic ?
Le syndic peut être mis en cause pénalement à plusieurs titres. Sa responsabilité peut autant tenir à un délit de droit commun qu’à la spécificité de la copropriété. Mais, il peut également être inculpé en raison de son propre statut. Aussi, pour mieux appréhender cette responsabilité, il convient de détailler les différents délits.
Les délits de droit commun : il faut entendre cette désignation comme les infractions qui ne sont pas attachées à la spécificité de la copropriété mais plutôt à la personne même du syndic. Il est ici plus question d’infractions intuitu personae que de contraventions à des règles particulières relevant de l’exercice de la profession.
Une des infractions les plus courantes est l’atteinte à l’intégrité physique.
- Volontaire : le syndic assène un coup de poing dans une assemblée générale mouvementée.
- Involontaire : un copropriétaire se blesse dans un escalier commun mal entretenu.
Malheureusement, l’actualité récente à largement mis en avant ce type de responsabilité pénale. Il suffit de citer les effondrements d’immeubles à Marseille et à Lille.
Il est certain que la responsabilité pénale du syndic est recherchée quant à l’entretien de l’immeuble. De même, toujours en cours, l’explosion de gaz rue de Trévise à Paris en 2019 qui avait fait plusieurs morts. La mise en cause pour homicide involontaire du syndic est toujours débattue devant les Tribunaux.
L’abus de confiance reste également la reine des infractions propre aux syndics. Défini à l’article 314-1 du Code pénal, il est :
« le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé ».
La position même du syndic favorise ce type de délit. Le cas classique est le fait pour lui de conserver des primes ou des ristournes versées par des entreprises prestataires de service, sans les restituer à la copropriété.
Les délits attenants à la spécificité de la copropriété : cette fois-ci, il s’agit de considérer la mission du syndic, telle que dévolue par l’article 18 de la Loi du 10 juillet 1965. Or, ce mandat lui impose de respecter un nombre important de règles, notamment en matière de construction, mais également en matière salariale.
En matière de construction, plusieurs textes constitutifs de règlementations d’urbanisme et environnementaux sont grevés d’une sanction pénale en cas d’irrespect. Citons, à titre d’illustration, le défaut de souscription à l’assurance Dommage-Ouvrage passible pour le syndic de six mois d’emprisonnement et d’une amende de 75 000 euros [2]. De même que le refus pour le syndic de se soumettre à une injonction de l’administration de procéder à des travaux de ravalement est puni d’une amende de 3 750 euros [3]. Les infractions de ce type sont pléthores et cela nécessite la plus grande prudence du syndic.
En matière salariale, le syndic peut également mettre en jeu son intégrité pénale. En effet, en application de l’article 31 du Décret du 17 mars 1967, il est l’employeur de la copropriété et :
« engage et congédie le personnel employé par le syndicat et fixe les conditions de son travail suivant les usages locaux et les textes en vigueur ».
De ce fait, il est soumis à la législation du travail et peut entièrement être incriminé en cas de violation comme, par exemple, du travail dissimulé.
Les délits propres au statut de syndic professionnel : depuis la Loi Alur du 26 mars 2014 (Loi n° 2014-366), l’activité de syndic a été particulièrement encadrée et est conditionnée à des obligations réglementaires. Le plus souvent professionnel, le syndic engagera sa responsabilité pénale en se mettant en infraction par rapport à la réglementation liée à son propre statut. Deux infractions courantes peuvent être excipées : le syndic ne justifie pas de carte professionnelle (dite carte « S ») / le syndic ne dispose pas d’une garantie financière et d’une assurance professionnelle.
La responsabilité pénale incombe-t-elle au syndic, personne physique, ou à son Cabinet, personne morale ?
L’un des principes fondamentaux du droit pénal est que :
« nul n’est responsable pénalement que de son propre fait » [4].
Ainsi, il ne peut être admis que seule la personne même du gestionnaire fusse condamnable. D’autant quand le délit est intentionnel et résulte de ses agissements.
Cependant, depuis 1994, le Code pénal prévoit une responsabilité des personnes morale.
A cet effet, l’article 121-2 du Code pénal dispose :
« Les personnes morales, à l’exclusion de l’Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ».
Cette responsabilité, cumulative avec celles des personnes physiques, impose que la faute ait été commise par un représentant ou un employé du Cabinet de syndic, mais également pour le compte de ce Cabinet. Aussi, il est envisageable, notamment pour les infractions non-intentionnelles, que soit recherchée la responsabilité pénale de l’agence commerciale.
Le syndic bénévole est-il responsable pénalement ?
En effet, hormis les infractions attachées au statut de syndic professionnel (c.f. supra), le syndic bénévole est soumis aux mêmes types de responsabilités civile et pénale que le professionnel. Ceci est par ailleurs problématique car le syndic bénévole n’est pas tenu de s’assurer, ni même de justifier d’une garantie financière. Il est étonnant que le législateur ait laissé ce statut en l’état qui, à mon sens, ne garantie aucune sécurité sur la compétence ou même l’intégrité du bénévole. En tout état de cause, la qualité de bénévole n’est aucunement exonératoire d’une responsabilité pénale.
La faute du Syndicat des copropriétaires est-elle exonératoire de la responsabilité pénale du syndic ?
La réponse est oui ! Cela diffère en un sens du droit pénal classique qui n’admet pas, comme cause d’irresponsabilité, la faute de la victime dès lors qu’elle n’est pas exclusive du dommage. Au regard de la configuration en copropriété, il a été largement admis que le syndic puisse dégager sa responsabilité s’il est démontré, non pas que le Syndicat des copropriétaires a commis une faute, mais que le syndic n’en a pas commise.
Aussi, notamment dans le cadre des blessures ou homicide involontaires, si le syndic avait proposé au vote les travaux pour éviter le dommage et que le Syndicat des copropriétaires les a refusés en assemblée générale, la responsabilité du gestionnaire pourra être écartée. Encore faudra-t-il démontrer que ces travaux n’étaient pas urgents, au sens de l’article 37 du Décret du 17 mars 1967. De même que le syndic qui voit la proposition de souscrire à une assurance Dommage-Ouvrage écartée par l’assemblée générale, couvrira certainement sa responsabilité pénale par la suite. En tout état de cause, si l’absence de faute ne s’avère pas exonératoire, elle pourra a minima jouer sur l’atténuation de la peine.
En outre, et cela rejoint le paragraphe ci-dessus sur la responsabilité pénale des personnes morales, le Syndicat des copropriétaires peut être inculpé s’il est démontré, qu’en connaissance de cause, l’assemblée générale a refusé une résolution et s’est mise en porte-à-faux pénalement (refus de souscrire à une assurance Dommage-Ouvrage, de procéder à des travaux sous le coup d’une injonction administrative…).
La responsabilité pénale peut-elle être protectrice pour le syndic ?
Effectivement ! Le syndic, comme tout justiciable, peut parfaitement se constituer partie civile s’il s’estime victime des agissements d’un copropriétaire. Il est possible de citer les mêmes infractions de droit commun, comme l’abus de confiance et les violences volontaires.
Le plus courant reste tout de même ce que l’on nomme les « délits de presse » (Loi du 29 juillet 1881). La plus connue est évidemment la diffamation. De même que l’injure est un délit souvent caractérisé en copropriété. Il doit toutefois être noté que la plupart des faits se déroulant dans le cadre d’assemblées générales, l’infraction devient non-publique et passe au stade de contravention, ce qui en diminue considérablement la peine.
En définitive, bien que rarement caractérisée, la responsabilité pénale du syndic demeure un sujet sur lequel les professionnels, mais également les bénévoles, doivent se pencher afin de se prémunir contre toute mise en cause. D’autant que justement, lors d’un mécontentement, le syndic est généralement le premier pointé du doigt.
Discussion en cours :
Ce sujet peut être plus ou moins complexe. La normalité fonctionnelle n’est pas établie, il suffit de suivre les informations. De très nombreux incendie surviennent dans le cadre de travaux de copropriété notamment lors de la réfection d’étanchéité de toiture.
Ces incendies pourraient être évités si le syndic était formé à ce domaine et s’assurait que le chantier réponde aux dispositions Règlementaires s’appliquant. Tous les outils existent mais ils sont souvent causes d’impopularité ou de contraintes à satisfaire.
De même certains groupements constructifs, avec des habitations et des commerces se trouvent sous l’égide d’un syndic. Dans la cadre d’Etablissements Recevant du Public (E.R.P.) il semblerait que ceux-ci soient gérés parfois par un syndic qui puisse igonrer la possible fonction de Responsable Unique de Sécurité.
S’agissant de la conservation des documents, notamment des plans et autres, les syndics s’en affranchissent.
Pourquoi la technocratie, car ce n’est pas le ministre qui prépare les textes Règlementaires, voire même les signe, a-t-elle peur de ces acteurs ? Imposer et contrôler la rigueur à satisfaire favorisera ceux qui exercent avec éthique et honneur et fera le ménage dans un milieu relativement opaque. Cela pourra aussi sauver du patrimoine et placer là où elles doivent être les vraies responsabilité entre syndic et corporpiétaires.