Prestations soumises à la TVA : quand le lien direct fait défaut.

Par Arnaud Soton, Avocat.

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Le cas examiné concerne la facturation de frais administratifs par un loueur de véhicules en cas d'infractions commises par les conducteurs des véhicules loués. La question était de savoir si cette somme entrait dans le champ d'application de la TVA La Cour administrative d'appel de Nantes a jugé que ces frais n'étaient pas liés directement à un service rendu à titre onéreux et ne constituaient pas une prestation accessoire à la location de véhicule. Par conséquent, la société a été déchargée de la TVA correspondante.
Description rédigée par l'IA du Village

On connaît les dispositions du fameux article 256 du Code général des impôts qui précisent que sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel.
Retour sur la décision CAA de Nantes, 1ʳᵉ chambre, 11/06/2024, 23NT00848.

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On en a toujours déduit qu’il n’est pas de service taxable en l’absence d’un lien direct entre celui qui fournit le service et son bénéficiaire. Ce lien direct n’est caractérisé que si d’une part, le service est rendu directement à un bénéficiaire déterminé et d’autre part, il existe une relation qualifiée de nécessaire entre le niveau des avantages retirés par le bénéficiaire du service et la contre-valeur qu’il verse au prestataire.

Si la notion de lien direct n’est pas le critère exclusif de détermination du champ d’application de la TVA, il faut reconnaître qu’elle revêt une importance fondamentale dans l’appréciation du caractère imposable ou non d’une opération.

Pour être imposables à la TVA, les livraisons de biens corporels et les prestations de services doivent donc être effectuées à titre onéreux, et pour déterminer si une opération est dans le champ d’application de la TVA, il convient de rechercher si elle procure un avantage au client et si le prix est en relation avec l’avantage reçu ; étant entendu que si l’une de ces deux conditions n’est pas remplie, l’opération n’est pas placée dans le champ d’application de la TVA.

Au cas particulier, un loueur de véhicules facturait une somme forfaitaire au titre des frais de gestion administrative des contraventions au Code de la route visant les conducteurs des véhicules loués. Une telle facturation de frais administratifs pour traitement de dossier pour une somme forfaitaire de 25 euros était prévue au contrat de location.

En effet, le contrat de location conclu entre le loueur et chaque client ou locataire de véhicule stipule que conformément au principe de personnalité des peines, le locataire est responsable des infractions qu’il commet pendant la durée de la location et que ses données personnelles pourront être communiquées aux autorités compétentes qui en feraient la demande et le cas échéant, il serait redevable de frais administratifs pour traitement de dossier s’élevant à 25 euros.

En fait, en cas d’infraction commise par le locataire du véhicule, la société reçoit la contravention et engage alors des démarches administratives consistant à rechercher l’identité du locataire du véhicule lors de la commission de l’infraction, à souscrire la requête en exonération indiquant à l’autorité concernée l’identité de l’auteur de cette infraction et à informer ce dernier sur la commission de celle-ci. La question est de savoir si une telle somme entre dans le champ d’application de la TVA. Selon la société, une telle opération n’entre pas dans le champ d’application de la TVA, ce qui n’est pas du goût de l’administration fiscale qui a procédé aux rectifications de la TVA correspondant à cette somme.

La société (la SAS Auto 44), a alors demandé au Tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1ᵉʳ janvier 2013 au 31 décembre 2015, sur la base de cette somme. Malheureusement, par un jugement du 27 janvier 2023 le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande et a confirmé les rectifications.

La société a alors fait appel devant la Cour administrative d’appel de Nantes qui lui a donné gain de cause en annulant le jugement rendu par le Tribunal administratif de Nantes. Pour la CAA de Nantes, en effet, une telle somme forfaitaire n’avait nullement pour objet de rémunérer la société d’un élément de la prestation consistant dans la location d’un véhicule. Cette somme est sans lien direct avec un service rendu à titre onéreux dans la mesure où, d’une part elle ne constitue pas la contrepartie d’une prestation de service individualisable et que d’autre part, elle n’est pas une prestation accessoire à la prestation de location de véhicule. Or, le versement d’une somme ne peut être regardé comme la contrepartie d’une prestation de service rendue à titre onéreux au sens des dispositions de l’article 256 du Code général des impôts précité, entrant, par suite, dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, qu’à la condition notamment qu’il existe un lien direct entre ce versement et une prestation nettement individualisable fournie par le bénéficiaire du versement à la personne qui l’effectue.

Selon la CAA de Nantes, cette somme facturée par le loueur de véhicules à ses clients, auteurs d’une infraction au Code de la route, n’entre pas dans le champ d’application de la TVA et ne peut être soumise à la TVA. Cette somme qui n’a pas pour objet de rémunérer la société d’un élément de la prestation consistant dans la location d’un véhicule, comme l’indique le contrat de location, est sans lien direct avec un service rendu à titre onéreux. Elle ne constitue pas la contrepartie d’une prestation de service individualisable au sens des dispositions précitées du I de l’article 256 du Code général des impôts et n’est pas une prestation accessoire à la prestation de location de véhicule.

Le jugement n° 1902654 du Tribunal administratif de Nantes du 27 janvier 2023 est donc annulé par la CAA de Nantes, et la SAS Auto 44 est déchargée de la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 41 836 euros versée au titre de la période du 1ᵉʳ janvier 2013 au 31 décembre 2015. L’Etat est par ailleurs condamné à verser à la SAS Auto 44 la somme de 1 500 euros au titre de l’article L761-1 du Code de justice administrative.

Une belle victoire, pouvons-nous dire, en espérant qu’un pourvoi en cassation n’amène pas le Conseil d’Etat à en décider autrement.

Arnaud Soton, Avocat Fiscaliste
Barreau de Paris
Professeur de droit fiscal
http://www.soton-avocat.com/

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