La prime sur les dividendes. Par Ginette Leclerc, Avocat

La prime sur les dividendes.

Rédaction du village

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Il est de notoriété publique, même au-delà des frontières de l’Europe, que le droit du travail français est très favorable aux salariés, y compris en termes de licenciement, de temps de travail et de retraite. La France vient juste de confirmer sa vocation sociale en créant une obligation pour les sociétés de partager les dividendes avec leurs salariés...

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En y regardant de plus près, cette nouvelle obligation tient toutefois plus du symbole que d’une réelle contrainte financière pour les sociétés et leurs actionnaires.

Pourquoi ?

Depuis des années, les syndicats et les salariés poursuivent leurs revendications sur les salaires et le « pouvoir d’achat » et ce, même si le Code du travail prévoit déjà deux mécanismes de partage des profits, l’un obligatoire (pour certaines sociétés), l’autre optionnel, mais dans les deux cas assortis d’un régime préférentiel concernant les cotisations ou « charges sociales ». La pression des syndicats s’est accentuée depuis le début de la crise financière, ceux-ci avançant, entre autres, que les actionnaires obtenaient une part disproportionnée de la richesse – ou valeur ajoutée – créée par les salariés.

Dans le contexte politique actuel et compte tenu des promesses faites par le Président Sarkozy lors de sa dernière campagne électorale, une nouvelle loi prévoyant une « prime sur les dividendes » pour les salariés est entrée en vigueur le 29 juillet 2011 (la « Nouvelle Loi »). Cet article présente les principales modalités de cette prime qui est soumise à des conditions flexibles, ce qui devrait permettre aux sociétés de garder la main sur les coûts associés à cette nouvelle obligation.

Qui ?

L’obligation de verser une « prime sur les dividendes » s’applique aux sociétés commerciales françaises qui ont, de manière régulière, au moins 50 salariés (les « Sociétés Concernées »). Le décompte des salariés est fait conformément aux règles du Code du travail relatives à la participation aux résultats de l’entreprise.

Les sociétés commerciales contrôlées par l’État sont également, sous certaines conditions, soumises à cette obligation.

Quand ?

L’obligation d’une prime sur dividendes est déclenchée par la déclaration d’un dividende par part sociale ou action (selon le type de Société Concernée), lorsque ce dividende est supérieur au dividende moyen déclaré sur les deux exercices précédents (un « Dividende Visé »). Les autres distributions au profit des associés ou actionnaires, par exemple, celles résultant d’un rachat d’actions, n’entrent pas dans le périmètre de cette obligation.

Une règle différente s’applique lorsque la Société Concernée fait partie d’un groupe et que ce groupe doit, en application du Code du travail, constituer un comité de groupe. Sans entrer dans le détail, un tel comité est obligatoire lorsqu’une entreprise a son siège en France et contrôle ou a une influence déterminante sur d’autres entreprises (une « Entreprise Dominante »).

Dans un tel cas, l’événement déclencheur est la déclaration d’un Dividende Visé par l’Entreprise Dominante. Ainsi, la filiale française d’une Entreprise Dominante devra payer une prime sur les dividendes même si cette filiale n’a pas déclaré de dividendes depuis plusieurs années. Bien que la Nouvelle Loi ne soit pas limpide sur ce point, la réciproque semble se vérifier : une telle filiale ne sera pas soumise à l’obligation de payer une prime sur les dividendes même si elle déclare un Dividende Visé mais que l’Entreprise Dominante n’en déclare pas. Cette interprétation est soutenue par les autorités administratives compétentes. En ce qui concerne les groupes contrôlées par une société étrangère, la règle générale s’applique : la prime est liée à la déclaration d’un Dividende Visé par la filiale française si elle est une Société Concernée.

Bien que la loi nouvelle ne soit entrée en vigueur qu’à la fin du mois de juillet, elle s’applique aux dividendes déclarés depuis le 1er janvier 2011.

Comme preuve de la flexibilité de ces nouvelles mesures, une société pourra échapper au versement de la prime sur les dividendes si elle a déjà octroyé un bénéfice additionnel et non-obligatoire à tous ses salariés, si ce bénéfice est attribué, en tout ou en partie, en contrepartie de l’augmentation des dividendes.

Comment et combien ?

La Nouvelle Loi ne fixe aucun montant ni règle de détermination du montant de la prime. Un accord doit être conclu entre la Société Concernée et les salariés ou leurs représentants, y compris le comité d’entreprise, dans les trois mois suivant la décision de l’assemblée des associés ou actionnaires déclarant les dividendes. La prime n’est pas nécessairement versée en numéraire, mais elle doit s’ajouter au salaire ainsi qu’aux autres éléments obligatoires de la rémunération des salariés.

Si aucun n’accord n’est conclu dans les trois mois, le montant et les autres modalités de la prime sont déterminés unilatéralement par l’employeur, après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent. Une circulaire émise par les autorités françaises compétentes met en garde : le montant de la prime ne saurait être purement symbolique. Parallèlement, l’avantage fiscal consenti par la Nouvelle Loi en ce qui concerne la prime – c’est-à-dire l’exemption de certaines contributions de sécurité sociale pour le salarié et l’employeur – joue à concurrence d’une prime d’un montant maximum de 1 200 € par salarié et par an.

Au regard des dispositions régissant la déclaration de dividendes par les sociétés commerciales françaises, la date limite pour parvenir à un accord sera généralement le 30 septembre. Exceptionnellement, étant donné sa date d’entrée en vigueur, la Nouvelle Loi reporte cette date butoir au 31 octobre 2011 pour les Dividendes Visés déclarées en 2011.

L’accord sur la prime ou le procès-verbal, établi par l’employeur, constatant l’absence d’accord sur la prime doit être transmis à l’autorité compétente sous peine de perdre le bénéfice de l’exemption de contributions de sécurité sociale.

A qui ?

En principe, tous les salariés à l’emploi d’une Société Concernée pendant l’exercice considéré ont droit à la prime sur les dividendes, bien que ce droit puisse être conditionné à une ancienneté minimale d’au maximum trois mois prévue dans l’accord conclu sur la prime. Cela ne signifie pas pour autant que tous les salariés doivent nécessairement recevoir la même prime, qui peut ainsi varier en fonction de l’ancienneté ou en proportion du salaire.

Pour combien de temps ?

La prime sur les dividendes est une mesure temporaire, dans l’attente de l’adoption, au plus tard au 31 décembre 2013 à la suite de négociations interprofessionnelles à l’échelle nationale, d’une nouvelle loi concernant le partage de la « valeur ajoutée ». Dans l’intervalle, le Gouvernement devra avoir transmis au Parlement, au plus tard le 31 décembre 2012, un rapport évaluant les accords et les mesures prises concernant la prime sur les dividendes et proposant, si besoin, des adaptations législatives.

Rédaction du village

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