Procédure disciplinaire du CNAPS : comment réagir ?

Par Karin Hammerer, Avocate.

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Explorer : # procédure disciplinaire # cnaps # défense juridique # sanction administrative

Suite à un contrôle, les entreprises de sécurité privée et leurs dirigeants se retrouvent bien souvent embarrassés face au CNAPS (Conseil national des activités privées de sécurité).
Voici un petit guide pour savoir comment réagir si le CNAPS engage une procédure disciplinaire à votre encontre.

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Suite à un contrôle sur site, plusieurs phases se succèdent :

- Le contrôle sur pièces et l’audition.

Il s’agit de la phase d’instruction préalable. Elle permet au CNAPS de réunir les éléments à décharge mais également évidemment à charge.

En effet, les documents collectés à cette occasion serviront ensuite de base à l’éventuelle sanction disciplinaire que cet organisme pourrait décider ultérieurement.

Ils peuvent également conduire le CNAPS à procéder à un signalement auprès des autorités judiciaires, ce qui peut déclencher l’ouverture d’une enquête de police voire de poursuites judiciaires. Ce signalement est d’autant plus gênant que, même s’il ne fait l’objet d’aucune suite judiciaire, il conduit automatiquement à l’inscription du dirigeant ou de l’agent concerné au sein du Traitement des antécédents judiciaires (TAJ), ce que le CNAPS ne manquera pas de relever à l’occasion de la prochaine demande de délivrance ou de renouvellement d’une carte professionnelle ou d’un agrément dirigeant.

Par conséquent, la prudence s’impose.

En vertu de l’article L634-3 du Code de la sécurité intérieure, les agents du CNAPS peuvent demander communication de tout document nécessaire à l’accomplissement de leur mission. Son pendant, l’article R631-14 du même code, oblige les acteurs de la sécurité privée à collaborer loyalement et spontanément à leur contrôle. Dès lors, une entreprise contrôlée n’a d’autre choix que de communiquer au CNAPS les documents qu’il réclame, sous peine de commettre un manquement passible d’une sanction.

Pour autant, si on peut être tenté de fournir au CNAPS des documents supplémentaires pour justifier de sa bonne foi, il convient d’être extrêmement vigilant sur ceux-ci afin de ne pas fournir aux CNAPS davantage de matière à son contrôle. Une information en apparence anodine pourrait conduire le contrôleur à élargir ses investigations ou un simple oubli de mention lui fournir un nouveau grief. Dans le doute, il est préférable de s’abstenir.

De même, à l’occasion de l’audition, il vaut mieux privilégier des réponses courtes et directes plutôt que de partir dans des circonvolutions oratoires et dire des choses qui pourraient ensuite être retenues à votre encontre.

Et il faut également prendre soin de bien relire le procès-verbal qui sera dressé à l’issue de l’audition avant de le signer puisqu’il fera foi par la suite. Or, celui-ci est bien souvent élusif et lacunaire, ce qui peut donner un sens différent à ce qui a été dit.

- L’engagement de la procédure disciplinaire.

La procédure disciplinaire débute par l’envoi d’un courrier par le directeur du CNAPS.

Ce courrier doit informer de l’ouverture de cette procédure, des faits reprochés, indiquer la sanction envisagée ou proposée à la commission de discipline, la possibilité d’être assisté d’un conseil ou représenté par un mandataire son choix, et inviter la personne physique ou morale concernée à présenter ses observations écrites/ou orales dans un délai de 15 jours.

Doivent y être joints les rapports ou procès-verbaux qui établissent les faits reprochés.

Le délai de 15 jours précisé est le délai minimal en dessous duquel le CNAPS ne peut prendre aucune sanction. Cela ne veut pas dire que celle-ci interviendra immédiatement à son issue. Bien souvent, elle ne sera prononcée que plusieurs semaines voire mois après. Néanmoins, il convient de le respecter, sous peine que la défense intervienne trop tardivement si le CNAPS venait à faire preuve de diligence.

Aussi, dès réception de ce courrier, il faut être très réactif et immédiatement :

- Si l’on souhaite être accompagné, prendre contact avec un avocat qui saura vous conseiller ;

- Solliciter communication de l’entier dossier du CNAPS à l’adresse mail de la délégation territoriale de cet organisme qui est fournie si seul le compte-rendu final de contrôle est communiqué, à l’exclusion des pièces sur lesquelles celui-ci repose. En effet, on ne peut préparer utilement une défense sans connaître l’intégralité des éléments sur lesquels les griefs reprochés reposent ;

- Réunir l’ensemble des documents utiles pour soit contester les fautes invoquées, soit démontrer les efforts de régularisation et/ou d’amélioration mis en place depuis le contrôle.

D’un point de vue matériel, les observations émises peuvent utilement prendre la forme d’un courrier reprenant grief par grief les faits reprochés et se terminant par un argumentaire sur le quantum de la sanction envisagée.

Il faut y distinguer :
- Les griefs avec lesquels on est en désaccord juridiquement ou factuellement pour lesquels il faudra fournir les raisons de sa contestation ;

- Des griefs qui sont établis et qu’ils seraient donc contreproductifs de contester ; il est préférable pour ces derniers de reconnaître les faits, d’expliquer le cas échéant le contexte spécifique qui a pu conduire à ces manquements et de montrer que l’on a tiré les enseignements des erreurs réalisées, de sorte que celles-ci ne se reproduiront plus.

Dans les deux cas, tous les arguments invoqués devront être appuyés autant que possible des pièces et/ou références juridiques les justifiant.

Si la commission de discipline est saisie car une interdiction temporaire d’exercer et/ou une pénalité financière importante est envisagée, une convocation est adressée à la personne mise en cause au moins 15 jours avant sa tenue.

Toutes observations écrites doivent parvenir à cette commission au plus tard 5 jours avant sa réunion.

Il est également utile d’y assister pour pouvoir plaider sa cause de vive voix et fournir, le cas échéant, les informations complémentaires qui manqueraient aux membres de la commission.

- La sanction.

Il faut distinguer selon que la commission de discipline soit ou non intervenue.

Si c’est la commission de discipline qui prononce la sanction, elle doit le faire en principe dans un délai de 2 mois à compter de sa saisine par le directeur. Cependant, aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect de ce délai, de sorte qu’on peut s’attendre à ce qu’il soit dépassé.

La décision de la commission de discipline est contestable dans un délai de 2 mois devant le tribunal administratif.

Si c’est le directeur qui adopte la sanction, aucun délai n’est prévu pour son prononcé.

Elle peut donc intervenir à tout moment après l’expiration du délai de 15 jours laissé à l’intéressé pour présenter ses observations, y compris plusieurs semaines ou mois plus tard.

Or le délai pour contester une sanction adoptée par le directeur est particulièrement bref puisqu’il est de seulement 15 jours. Il faut donc rester très vigilant tant que l’on n’a pas reçu la décision.

Cette contestation doit prendre la forme d’un recours administratif préalable obligatoire devant la commission de discipline, dont la décision se substituera à celle du directeur.

Ce n’est qu’après que le tribunal administratif pourra être saisi si nécessaire et, ce, dans un délai de 2 mois.

Karin Hammerer, Avocate au Barreau de Lyon spécialiste en droit public
www.hammerer-avocat.fr

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